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Billet de blog 20 juillet 2014

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Je suis en colère, retour de manif interdite

Je reviens d'une manifestation pacifique à Barbès agressée à coups de grenades lacrymogènes pendant près de deux heures sans que nous n'ayons rien fait sinon exercer notre droit légitime à manifester notre solidarité avec un peuple crevant sous les bombes. Bloqués sous le métro de la station Barbès et sur une grande partie du boulevard du même nom, nous avons tenté à un moment de partir en manifestation sur le boulevard.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Je reviens d'une manifestation pacifique à Barbès agressée à coups de grenades lacrymogènes pendant près de deux heures sans que nous n'ayons rien fait sinon exercer notre droit légitime à manifester notre solidarité avec un peuple crevant sous les bombes. Bloqués sous le métro de la station Barbès et sur une grande partie du boulevard du même nom, nous avons tenté à un moment de partir en manifestation sur le boulevard. C'est là que les gentils CRS de la préfecture de police nous ont agressés sur ordre du larbin du grand amoureux du peuple rom qui a montré qu'il avait bien rejoint le camp que combattait jadis ses parents. Et pendant deux heures sans discontinuer ils ont aspergé le boulevard Barbès de grenades lacrymogènes.

Néanmoins, l'immense majorité d'entre nous est restée calme durant tout ce temps. Nos slogans étaient ceux de notre colère face au crime et de notre solidarité avec les victimes : "Nous sommes tous des Palestiniens", "Enfant de Gaza, enfant de Palestine, c'est toute l'humanité qu'on assassine", "Israël assassin". Bien sûr, nous n'avons pas oublié notre monarque bien aimé de la Très, Très, Très Démocratique République Française : "Israël Assassin, Hollande complice" et "Hollande, on n'oubliera pas". Il faut dire que ce triste sire, qui ne mérite même pas notre mépris, aime boire le vin de l'infamie et trahir tous ses amis. Judas, c'était contre trente deniers, lui le fait gratuit. Enfin gratuit... Il faudra un jour prochain regarder de plus prêt (non, il n'y a pas de faute d'orthographe). MDP, on compte sur toi.

Et les pioupious en bleu étaient quand même colère. Faut dire qu'on les a fait tourner en bourrique. Ils pensaient avoir tout quadrillé, fermé le métro et bloqué les accès à Barbès. Mais c'était sans compter sur le nombre qu'on était. et leur filet s'est retrouvé plein de trous. Les gens se faufilaient par les petites rues, les passages qu'ils n'avaient même pas l'air de connaître. Et quand ils arrivaient pour bloquer, c'était déjà trop tard, les oiseaux avaient filé et piqué sur Barbès. Ça a dû beaucoup les énerver, d'autant qu'ils se ramassaient régulièrement des quolibets ironiques du genre "C'est dur de tuer la liberté" auxquels ils ne savaient pas quoi répondre, ou encore, "On recommence l'Algérie ?" Beaucoup avaient l'air gênés.

Bref, on a quand même réussi à être entre 5000 et 10.000 rassemblés sur le lieu annoncé de la manif. Mais, il faut préciser que nombre d'entre nous ont tourné autour de la manif sans pouvoir la rejoindre, sans compter ceux qui nous ont dit qu'ils avaient les enfants et ne pouvaient pas leur faire prendre de risque à juste titre, nous l'allons voir tout à l'heure. Il nous a fallu près d'une heure pour trouver une issue dans ce jeu de cache-cache avec les forces du désordre.

Le temps avançant, nos CRS au coin du boulevard Rochechouard et de Barbès ont commencé à se dégourdir les jambes en opérant quelques mini-charges, histoire d'obtenir une réaction pour pouvoir commencer à cogner. On les sentait de plus en plus avec des fourmis dans la matraque. Et puis d'un coup, n'y tenant plus ils foncent sur nous, non plus sur 3 ou 4 mètres mais sur plus d'une dizaine, prenant au passage des gens qui avaient le malheur de se trouver sur leur chemin. Et voilà nos joyeux martiens défenseurs des assassins de Gaza, qui agressent une femme d'âge moyen qui ne les avaient pas vu arriver. Et les voilà à trois ou quatre en train de la matraquer comme au bon vieux temps de mai 68 (Ah  ! la  nostalgie du porte-gourdin). Des jeunes se précipitent alors pour essayer de la dégager, mais, mains nues, ne peuvent pas faire grand chose et se replient pendant que nos kidnappeurs filent avec leur proie. Un certain nombre de gens indignés jettent ce qu'ils ont sous la main, ce qui donne l'occasion à nos joyeux lurons vallsophiles de lancer une nouvelle charge et d'opérer d'autres enlèvements, etc., etc. Régulièrement, les choses se calment parce que nous sommes nombreux à dire aux quelques individus énervés de se calmer, mais sans service d'ordre organisé, il est impossible de créer un rideau. Surtout que les CRS reviennent foutre le bordel et que tout recommence.

Si vous entendez parler d'arrestations et de condamnations, ayez ce raisonnement en tête : des terroristes d'État en bleu, armés d'objets contondants et casqués, sont à l'origine de tous les incidents, tous sans exception, pour ce qui concerne l'intersection Barbès-Rochechouard et devraient être ceux qui passent en procès, à commencer par leurs chefs. Ils ont déclenché des hostilités avec la ferme volonté d'obtenir une bagarre générale. Un certain Hollande a déclaré voici peu qu'il ne pouvait tolérer des affrontements entre Français. Qu'il applique cela à ceux qui ont profité de l'impunité que leur fonction leur donne pour créer du désordre et agresser des gens pacifiques et désarmés, qui criaient au même moment "Liberté, Liberté". Mais, pour Hollande, je crains que le mot liberté veuille dire seulement liberté de boursicoter, liberté de licencier, liberté d'interdire la grève, liberté de néo-coloniser, liberté de passer des vacances dans des États criminels, liberté de trahir ses électeurs etc. Mais la liberté du peuple à exprimer ses points de vue, j'ai peur qu'il ne comprenne pas. D'ailleurs, le peuple, qu'est-ce que c'est ?

De retour chez moi, j'allume la télé et découvre que l'événement était couvert par des journalistes que l'on n'a jamais vu et qui se trouvaient, comme on le voit sur les images du côté des CRS et, à aucun moment, dans la manif. Seuls un ou deux free-lances se trouvaient là. Cela laisse à penser qu'il a dû y avoir un bon petit déjeuner à l'Élysée ou à Matignon entre propriétaires de médias et nos bien aimés dirigeants, qui nous ouvrent la voie lumineuse du socialisme, de la République, de la liberté, de l'égalité et de la fraternité. Euh, non, la fraternité existe mais uniquement entre copains et coquins, entre gouvernement et patronat et entre Hollande et le criminel de guerre Netanyahou. Et je parie que les pâtisseries étaient vraiment, vraiment délicieuses.

On ne peut pas non plus passer sous silence tous ses grands dirigeants, qui prétendent être la nouvelle gauche, Mélenchon, Laurent, tous absents. Ah, mais c'est vrai, la manif était interdite. Et, eux sont des gens responsables. Ils sont légalistes. On leur dit de fermer leur gueule, ils ferment leur gueule. Le président, il a dit : "Tu peux causer, mais dans les médias, pas dans la rue. Quoi ? Les médias ne veulent pas te donner la parole. Oh, les vilains, c'est pas gentil. Mais je ne peux rien y faire, c'est la liberté de la presse...." Et toi Laurent, et toi Mélenchon : "Oui, m'sieur, on sera sages." Heureusement, certaines organisations ont eu la sagesse de ne pas être sages et obéissantes et d'envoyer paître le président : NPA, Union des Juifs Français pour la Paix ainsi qu'une Association des Maghrébins, plus diverses autres organisations d'entraide et de solidarité, etc. Je ne cite ici que seules celles que j'ai vu. Il paraît qu'Ensemble était là, mais je n'ai pas vu de calicots ou de banderoles avec ce sigle. Une militante du parti de gauche, avec laquelle et plein d'autres, nous jouions à cache-cache avec les flics pour entrer dans la manif, nous a dit être écœurée par le double discours de son organisation : « La solidarité avec la Palestine, c'est important, mais nous sommes des légalistes, alors si tu y vas, tu ne peux y aller au nom du PG ».

Quand on entend les membres de ce gouvernement se dire socialistes, on pense immanquablement au terme stupide de social-traitre, qui eut tant d'effets négatifs dans le passé. En fait, ce serait leur faire trop d'honneur. C'est plutôt social-minable, qui conviendrait. Mais, à la réflexion, non, social est en trop.

HOLLANDE, COMME POUR GUY MOLLET, ON S'EN SOUVIENDRA. ON N'OUBLIERA PAS QUE TU AS FOULÉ AU PIED NOS LIBERTÉS. ON N'OUBLERA PAS NON PLUS TA COMPLICITÉ, VOIRE TON ENCOURAGEMENT DES CRIMES DE GUERRE COMMIS PAR TON GRAND AMI NETANYAHOU ET SA BANDE.

Je t'ai dit "tu", mais c'est parce que "vous" aurait pu te faire croire que je te respectais toi et ta fonction. Je dis tu à ceux que j'aime d'ordinaire, mais je n'avais rien d'autre sous la main pour te mettre toi et ton roquet à ta vraie place. Putain de langue française.

Pour terminer, et me calmer, une petite blague :

Un jeune Israélien avoue à sa mère qu'il est homosexuel et amoureux d'un membre du Hamas. La mère ne sait pas trop quoi penser, quoi dire. Elle réfléchit un instant et lui demande : "Il est Juif au moins ?"

Et pour vous montrer, pour reprendre les propos des larbins télévisés, que nous n'étions que quelques centaines et combien nous étions agressifs et qu'il n'y avait que des arabes, voici une petite vidéo réalisée par mon fiston, qui, suite à l'annonce de l'interdiction, a préféré venir manifester que d'aller jouer au cricket. Les images ne sont pas extraordinaires, mais c'est du vécu. Les toutes premières séquences concernent la gare du Nord où il y avait aussi un rassemblement Palestine où nous ne sommes pas restés.

manifestation palestine Paris 19 07

PS : Le site du Nouvel Obs indique d'autres manifs ayant eu lieu dans Paris. Un seul reproche à l'article : le coup de la population essentiellement maghrébine et turque et les soi-disant 2000 manifestants. Pour le reste, le caractère bon enfant était présent partout. Sans les agressions policières, tout se serait bien passé.

Si le témoignage d'Alliès est différent du nôtre, c'est qu'il est arrivé bien avant nous sur les lieux et que, nous, nous avons pris la manifestation en cours.

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