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Schizoanalyste - Laboratoire Auto-géré de Thérapie Culturelle - Création d'une monnaie anticapitaliste blockchain

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Billet de blog 16 février 2023

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Schizoanalyste - Laboratoire Auto-géré de Thérapie Culturelle - Création d'une monnaie anticapitaliste blockchain

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Révolution Moléculaire [ I ]

Micro-diagnostic holiste à vol d'oiseau pour une spiritualité terrienne.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Ce texte est le produit d’un délire, celui d’un malade prétentieux qui veut toujours se placer là où toute est création et échec, démolition et compostage, rumination et excrétion. Il ne porte aucune vérité, il s’agit plutôt d’une musique improvisé. Plusieurs esprits et différents instruments produisent les mélodies chaotiques. Si vous y rentrez dedans vous reconnaîtrez sûrement quelques danseurs.es et musiciens.nes. Ce bal n’est pas produit par des visages sérieux et tristes, encore moins par des mordeurs de pierres ou des aboyeurs baveux. Acceptez leurs invitations, leurs mains étendues, et dansez cette danse pour voir si vos âmes éprouvent résonance.

Illustration 1

III Ressources

II Pathologies

I

On vit dans un fange de misère psycho-sociale, dans une mer de projections, phantasmes et transferts, des brumes spectaculaires voilent nos yeux. Les idoles virales et les forces réactives règnent sur cette terre : dieu, patrie, famille, travail, capital, amour, raison, vérité, homme, femme, humain… Les bâtisseurs qui dominent et dirigent notre culture, ce sont des maquilleurs et vénérateurs des vieilles et nouvelles statues. C’est lorsqu’on prend en main le marteau philosophique qu’on constate leurs fondations de sable. Hélas, les humains, trop humains ! Leurs machines ont amplifié et donné de nouvelles formes et puissances à leur faiblesse d’esprit. L’humain, disait Zarathoustra, est quelque chose à dépasser. On est tous.tes malades d’une maladie systémique, culturelle. 

Le capitalisme n’est pas la maladie, mais un de ses symptômes. C’est la réaction chimique entre humains faibles et machines puissantes – corporelles et incorporelles. Il y en a qui s’attaquent aux machines avec une admirable ferveur, mais le capitalisme est en nous, dans la profondeur de nos âmes. Casser, abîmer, fuir certaines machines ou tourner le dos à l’Histoire est beaucoup trop facile ! Or elle est dans nos tripes, cœurs et cerveaux. Soigner nos âmes demande le plus haut courage, ça implique de faire face au vieux fange fétide qui est bien installé dans les méandres de nos psychés. Voilà pourquoi tant de masturbation contemporaine et millénaire ! Notre ferveur, donc, devrait être dirigée aussi bien vers « l’extérieur » que vers « l’intérieur », ou encore mieux, vers toutes les directions, car cette séparation n’est autre qu’un biais de la perception. 

Tel qu’un.e névrosé.e, nous identifions plus facilement les symptômes que leur cause, que la nature de la maladie. Notre trouble de base est un déséquilibre, un problème de flux, une absence d’harmonie dans et entre les trois écologies, environnementale, sociale et mentale ; une déconnexion au cosmos : la lune, les étoiles, la forêt … et surtout la vie et sa propre volonté, la volonté de puissance, ou la volonté de la volonté, qui tente de fleurir en nous et qu’on a réprimé au nom de la morale, du « progrès », des statues. On est malades parce qu’on n’a pas su cultiver et prioriser notre spiritualité, toujours associée aux croyances et religions, aux dogmes et aux idoles. Mais une spiritualité terrienne (matérialiste) reste à découvrir et à cultiver, celle de l’humaine libre et multicolore, celle du devenir et du multiple, créatrice et affirmative de la vie ; une musique d’harmonie écosophique. C’est sur cette base qu’on peut mieux comprendre notre pire symptôme molaire : le capitalisme mondial intégré (CMI) était accouché par la disharmonie, c’est un phénomène émergent, déterritorialisé et auto-catalyseur/producteur.  

Pour faire de cette spiritualité terrienne une réalité, c’est-à-dire un changement profond d’attitude face à la vie, une profonde transvaluation, on doit sérieusement aborder les phénomènes, mécanismes et dynamiques concernant la subjectivité et sa production. Sans une modification des conditions matérielles, économiques et institutionnelles, un changement si profond s’avère impossible ; et inversement, sans une transformation des mentalités, ces conditions environnementales ne peuvent pas muter. Il semblerait que nous soyons condamné.e.s à une lente évolution résultant de la constante friction entre pulsions moléculaires, organiques, mutantes et les rigides structures cristallisées en forme d’institutions. Or rien ne nous garantit que cette « évolution » nous amènera un jour dans la direction spirituelle, échappant ainsi au meilleur des mondes ou à la catastrophe apocalyptique ; le sens de la vie, la spiritualité ne sont pas des priorités dans ce monde de spectacle. Heureusement, nous ne vivons pas encore dans un système totalement totalitaire. En tant que molécules, nous avons encore de la marge de manœuvre pour nous rassembler et créer de nouveaux agencements, de nouveaux « équipements collectifs », des foyers catalyseurs de sens politico-spirituel. 

La subjectivité est produite comme on produit des chaussures ou des automobiles. Le CMI produit à la fois les marchandises et les affects qui en donnent la valeur. Il n’y a pas de marchandise sans affects. En absence d’affects capitalistiques, il n’y a pas de capitalisme. Tout projet révolutionnaire visant à renverser le capitalisme en ignorant la nature et la dynamique des affects, c’est-à-dire la nature et du pouvoir et de l’institution, est condamné à l’échec. On connaît bien le phénomène opprimé oppresseur, comme le migrant qui a « réussi » et qui se met à exploiter d’autres migrants de son propre peuple, ou  le prolétaire qui arrive à monter sa propre entreprise et reproduit l’oppression qu’iel a vécu dans sa chair pendant si longtemps, et également, au niveau familial, le.a névrosé.e qui reproduit la violence de son enfance avec ses propres enfants et/ou partenaire. Ce n’est pas étonnant qu’autant de projets dit socialistes aient non seulement échoué mais également reproduit les pires des barbaries. On ne maîtrise pas nos affects, et par extension nos institutions, car ceux-ci germent et habitent dans les couches profondes de notre psyché, où les lois de la raison sont étrangères et impuissantes.

L’inconscient, ou plus largement la subjectivité et sa production, doit donc être le champ central pour toute tentative de transformation sociale. Mais comme dans tout champs, il y a la dispute entre les forces réactives et les forces affirmatives. Il est nécessaire donc de faire un travail de déconstruction pour libérer l’inconscient des représentations conservatrices, patriarcales, essentialisantes notamment  sur trois points, a) la notion d’individu : le sujet n’est pas homogène, indivisible, il est multiple, hétérogène, et il n’est pas en relation avec un tissu social, il est dans le tissu social et n’existe pas en dehors. La névrose, et toute sorte de problème de l’âme, ne peut être conçue individuellement, elle est toujours la manifestation d’un trouble au niveau du tissu, car il n’y a que du tissu. Un tissu multidimensionnel, toujours en mouvement, en mutation, un tissu machinique. On ne s’individue (coupure) pas, on se singularise, c’est-à-dire qu’une partie du tissu prend des formes singulières. Le mycélium (réseau souterrain) et le sporophore (fruit visible - champignon) sont un seul et même organisme, b) l’inconscient n’est pas un théâtre tyrannisé par œdipe, il est machinique, de même nature que les molécules, les protéines, le ADN, la mitochondrie, les cellules, les organes, etc ; il produit comme une usine, c) le désir. Il n’est pas né du manque, il ne manque rien – encore moins le phallus –, il est plutôt produit ou production, des forces qui coulent dans un agencement donné/déterminé ; déployer sa vitalité dans un agencement ou construire un agencement qui permet la vitalité se déployer ; forces, production/construction, flux, agencement, celles-ci sont des vrais questions de désir. 

La subjectivité et ses affects est produite et façonné par les équipements collectifs et institutions (tant formelles et explicites qu’informelles et implicites), notamment la famille, définie comme l’organisme qui gère la re-production bio-psycho-sociologique, l’école, l’usine ou l’entreprise (structure, organisation, répartition), les moyens d’échange (argent, banque, système financier), et le champ médiatique (notamment le phénomène des mass média). C’est dans ces domaines-là que se joue notre avenir, ce sont les terrains les plus immédiats et quotidiens et pourtant,   l’action directe n’est pas le mode préférentiel pour la quasi totalité d’entre celleux qui s’intéressent à la politique, iels s’y adressent indirectement à travers les discours, les prières où les chants, ou les petites ou grandes actions plus ou moins radicales ou concrètes mais toujours très délimitées et ponctuelles/spécifiques, jamais générales, holistes, chimériques. Globalement, les politicien.nes, militant.es de toute sorte, syndicalistes, travailleur.euses dans le social, etc, progressistes dans un domaine, restent néanmoins conservateur.ices dans plusieurs d’autres, et iels partagent également, même chez les radicaux, le souci de garder le problème de l’inconscient bien à la distance. Rares sont celleux qui à la fois ont les pieds fermes dans ce terrain méprisé et ne s’accrochent à aucune statue, assez libres pour s’extraire de tout bruit, de tout fleuve, de toute musique, de toute ritournelle existentielle. 


Le tissu machinique, multidimensionnel est peut-être prêt à engendrer une nouvelle version d’action directe, plus mature, où le problème de l’inconscient est au cœur de son moteur. Toute action, toute tentative de transformation sera conçue à partir d’une sagesse des affects, d’une discipline méta-analytique, d’un œil d’aigle, d’un champ chimérique où il n’y a plus de frontières entre la psychologie, la sociologie, la politique, la philosophie, la poésie et la spiritualité. Il est temps pour une nouvelle génération de s’attaquer directement à ces équipements collectifs et institutions, c’est-à-dire de transformer radicalement a) la famille : démolition de la famille nucléaire, déconstruction générale de l’amour, laboratoire relationnel, thérapie psycho-sociale, b) l’école : continuer le projet d’Élise Lagier-Bruno, Célestin Freinet, et autres, ainsi que faire vivre l’éducation populaire comme jadis dans les bourses du travail, etc c) la production et sa répartition : réseaux, coopératives, vers le minimalisme pragmatique et l’autonomie, démontrer que les modèles sans patron sont non seulement viables mais désirables, d) les moyens d’échange : réduire l’incidence de l’argent, développer toute sorte de commons, créer et soutenir les monnaies locales, créer une monnaie sociale [anticapitaliste] au niveau national en se servant de la blockchain, lutter pour l’abolition du système de réserves fractionnaires, etc, e) le champs médiatique : lutter contre le phénomène mass media en produisant nos propres médias/chaînes, en finançant des médias indépendants pour qu’ils puissent rentrer dans les fréquences de radio et TV, en manifestant pour une loi des médias empêchant le monopole des riches, etc. Tout cela en restant actif.ves pragmatiquement dans les terrains de dispute classiques, lucides sur ses limitations. 

Voilà ce qu’est la révolution moléculaire, ce nouveau type d’action directe où le problème de l’inconscient – la subjectivité et sa production – est au cœur de son moteur. Une radicale et perpétuelle remise en question et une praxis créative au niveau de la vie quotidienne, au niveau des relations et des institutions les plus immédiates, tout en continuant à participer dans des luttes qui nous semblent être plus éloignées. Mais cette démarche nous met évidement face à un problème central : nous, les molécules rebelles, sommes aussi polluées par les pathologies de notre culture. Comment déconstruire et créer des jardins d’air frais si nous avons aussi des affects moisis ? La plus grande erreur chez les révolutionnaires est de croire que la seule volonté, ou le pouvoir intellectuel, est suffisante pour effectuer/provoquer/opérer un changement social profond, peu importe l’échelle. On ne change pas les troubles au niveau des affects, de même qu’on ne change pas le comportement d’un.e névrosé.e ou un.e psychotique, par décret collectif, par autorité ou par une prise de pouvoir quelconque – le soigner encore moins. Le seul moyen d’accomplir un changement profond, de guérir, est la thérapie. Or la thérapie culturelle n’existe pas encore, le spécialisme nous rend incapables de concevoir une telle idée, même si on a eu auparavant quelques médecins – notamment Épicure et Nietzsche.

Il est donc nécessaire de donner vie à nouveau type d’équipement collectif à conçu spécifiquement pour traiter la maladie culturelle ; une sorte de jardin d’Épicure actualisé et adapté à nos jours ; un organisme mutant, un laboratoire auto-géré, chimérique : à la fois école, « cabinet », gymnase, théâtre, cantine, centre d’hypnose et d’art thérapie, atelier multiple – biochimique, informatique, de bricolage, de couture, de cuisine, etc – , centre de recherche et expérimentation de nouvelles économies, de nouvelles formes de se relationner, de cohérence politique, un espace en perpétuel mouvement, le sol jamais fixe, pas de racine mais du rhizome, pas des modèles mas des structures vivantes, mutantes, un lieu de revendications, de multidirectionnalités, un centre schizoanalytique, un foyer catalyseur de sens politico-spirituel.

Ce nouveau organisme remplira une fonction de thérapie culturelle, ou psycho-sociale, en apportant aux personnes : a) une plateforme ou tissu mutant qui facilite, encourage, catalyse l’extraction de fleuves, programmes et ritournelles, c’est-à-dire qui permet aux personnes de s’extraire pendant une certaine période d’une inertie pathologique : travail, famille, ami.es, partenaire.s, école, et toute sorte de rôles, projections, attentes, oppressions et violences sociétales. Quand on a « rien à faire », certaines portes s’ouvrent ; quand on est accueilli.es pendant un certain temps par un collectif bienveillant qui ne juge pas et qui ne demande rien en retour, on peut respirer, se détendre, se concentrer, ruminer sur soi, prendre du recul, s’explorer, et se permettre d’adopter des nouvelles dispositions, par exemple initier une psychothérapie multiple, b) les ressources et agencements nécessaires pour l’auto-formation individuelle et collective sur ce qui est le plus essentiel : notre place, singularité, singularisation, et rapports dans les écologies mentale (corps-psyché indissociables), sociale (institutions et équipements collectifs) et environnementale (de ce qui est le plus immédiat jusqu’au niveau cosmique), c’est-à-dire nos rapports et articulations existentielles dans ces trois niveaux, c) les ressources, agencements nécessaires pour une thérapie psycho-sociale holiste-matérialiste, individuelle et collective d) les ressources, agencements nécessaires pour la recherche, expérimentation, création au niveau relationnelle, économique, politique, esthétique, existentiel.

Continuer la deuxième partie : Révolution Moléculaire [II]

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