Après des années de raids de la police de Vancouver, le 05 mars 2024 la municipalité autorisait finalement Dana Larsen, fondateur du Coca Leaf Cafe et de plusieurs « Mushroom Dispensary », à vendre des substances psychédéliques. Comme il l’affiche sur son site internet, « Nous sommes désormais le seul magasin au monde à disposer d’une licence commerciale autorisant explicitement la vente de champignons psychédéliques, de LSD, de DMT et d’autres enthéogènes. » L’occasion pour moi d’aller le rencontrer pour fêter cette décision historique ! [Ce texte a été rédigé en mars 2024 suite à ma visite]
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Dana Larsen a toujours été un militant de la décriminalisation des stupéfiants. La stratégie mise en place pour forcer les autorités à faire évoluer la législation concernant ces substances est celle qui avait déjà été utilisée par lui et par d’autres activistes pour le cannabis, près de 20 ans plus tôt : ouvrir illégalement des boutiques et tenir le coup face aux pressions policières jusqu’à obtenir gain de cause. Une stratégie payante, au Canada comme en France où cette technique a été employée par les magasins de CBD.
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Depuis quelques mois, plusieurs autres boutiques ont ouvert dans la ville, suivant l’exemple de Larsen. Nous en avons visité quelques-unes avec l’historienne Erika Dyck, spécialiste de l’histoire des psychédéliques, afin de documenter cette émergence. Les devantures sont criardes, présentent des néons avec des champignons, on ne peut pas dire qu’ils se cachent !
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À l’intérieur, les ambiances sont extrêmement diverses : certains magasins sont épurés, style « clinique », avec des vendeurs très axés « médecine ». D’autres ont des décos plus « flower power » ou hyper branchées, présentant la grande diversité du marché capitaliste des psychédéliques. On y trouve des bonbons, des chocolats, du beurre de cacahuète, des sodas à la psilocybine, avec packaging fluo et références à Alice au pays des Merveilles (par exemple). Une de ces boutiques propose pas moins de 34 variétés de champignons hallucinogènes, à acheter de 1 à 28 grammes, allant de 10 à 235$.
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Des entreprises illégales se créent pour fournir ce marché, comme le « Magic social club ». Je ne fais pas de pub mais c’est pour que vous puissiez avoir une idée ! Une de ces entreprises, « Entourage therapeutics », est officiellement dans le secteur du cannabis. On ne trouve pas de produits aux champignons sur leurs réseaux sociaux (leur site est en travaux). Mais j’ai trouvé dans une boutique une barre de chocolat à la psilocybine de leur marque. D’ailleurs, le fondateur de cette entreprise a précédemment travaillé chez… Sandoz !
*Sandoz est l’entreprise pharmaceutique ayant découvert le LSD en 1938, grâce à son chimiste Albert Hofmann.
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Officiellement, ces boutiques ne vendent que des champignons hallucinogènes, mais une fois rassuré, l’un des vendeurs nous a ouvert une boîte secrète avec notamment du LSD et de la DMT.
On trouve aussi des stickers dans toute la ville pour acheter des psychédéliques :
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Dana Larsen, lui, est le seul à proposer des contenus de Réduction des Risques ainsi qu’un dispositif de test des substances, et à vendre ouvertement toutes sortes de psychédéliques. On peut aussi acheter dans ses boutiques des pieds de cannabis (qui décorent d’ailleurs les tables du café), ou des cactus peyotl ! Un distributeur vend du kratom, et on peut s’arrêter pour lire des ouvrages sur les psychédéliques en dégustant un thé à la coca ou un shot de LSD.
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J’ai également pu visiter les mêmes magasins qui commencent à s’ouvrir à Toronto. Très drôle sur celle-ci, on peut voir que c’était avant un magasin de cannabis :
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Celui là vend de la 5-Meo DMT et… des champis avec des goûts de chips !
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Celui-là était trop mignon, à l’étage d’une résidence, le seul qu’on ai visité à avoir des documents de réduction des risques :
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Celui-ci est plus « dark ». Le marketing des produits est beaucoup moins psychédélique :
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Et pour finir, celui-là est le premier à avoir ouvert dans la ville, en 2022. Le vendeur nous a dit que des médecins venaient acheter des champignons pour en faire l’expérience avant d’en administrer un jour à leurs patient·es :
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Quelques mois après ma visite, le magasin de Dana Larsen à Vancouver a subit un nouveau raid de la police, illégal cette fois-ci. Ils ont tout cassé dans le magasin, saisi des œuvres d’art, des livres et évidemment les produits. Je ne sais pas où ça en est. Dana est vraiment un héros de la lutte contre la prohibition et pour la Réduction des Risques (RDR). Le chemin sera encore long vers la légalisation définitive, mais des pionnier·es ouvrent la voie !
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