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Billet de blog 26 juillet 2025

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De Georges à Georgia : l’Algérie entre Golgotha et Numidie

Georges sort des geôles, Georgia ouvre les salons : la Méditerranée rejoue ses paraboles.

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Illustration 1

25 juillet 2025. Deux images méditerranéennes, deux histoires qui se croisent : à Beyrouth, Georges Abdallah retrouve la lumière après quarante ans d’ombre ; à Rome, Abdelmadjid Tebboune commence par poser avec Georgia Meloni avant de saluer le Pape. La France libère un homme, l’Italie libère un marché. Georges et Georgia, deux noms pour deux paraboles.

➡️À l’est, le Christ laïc sort des geôles

Georges Abdallah, « Jésus de la cause palestinienne », s’avance enfin libre. Quarante ans derrière les barreaux – quarante ans, chiffre biblique, chiffre d’épreuves. La France laïque, fille aînée de l’Église, aura joué les inquisiteurs modernes, gardant ce prisonnier politique comme une hostie rancunière dans ses geôles.
Rome a cloué Jésus sur la croix. La République, elle, a inventé la crucifixion douce : quarante ans de Golgotha républicain pour un homme qui refusait de renier sa foi politique.
Aujourd’hui, elle le libère comme Ponce Pilate se lave les mains – tardivement, sans repentir.

➡️À l’ouest, la Papesse avant le Pape

À Rome, Tebboune suit un chemin inverse à celui des anciens pèlerins : il commence par la Papesse avant de voir le Pape. Georgia Meloni l’accueille au Palazzo Chigi. Papesse blonde, Madone des pipelines, elle incarne le pragmatisme latin : ici, pas de sermons sur la démocratie, pas de nostalgie coloniale, mais des contrats, des chiffres, des gazoducs.
Pipeline avant psaumes : telle est la liturgie nouvelle d’une Europe qui commerce avant de confesser.

➡️Rome, hier empire, aujourd’hui tentation

Jadis, on entrait dans Rome par ses temples avant d’aller au Sénat. Aujourd’hui, on entre par les contrats avant les bénédictions. Ironie : la France, qui se prétend laïque, reste prisonnière de ses réflexes moraux, quand Rome, catholique assumée, sépare la morale des affaires. Et l’Algérie, qui fut Numidie, retrouve cette Ville éternelle qui jadis la domina – mais cette fois, en négociateur. Comme un écho antique, Tebboune semble fouler ces marbres en invoquant une mémoire impériale : celle d’un temps où l’Afrique n’était pas vassale mais province romaine, où Cirta et Timgad dialoguaient avec Rome d’égal à égal.

➡️Deux libérations, un écho antique

Georges sort des ténèbres, Georgia illumine les salons italiens. Deux libérations : l’une sacrificielle, l’autre transactionnelle. Entre Golgotha et Palazzo Chigi, l’Algérie rêve d’un troisième acte : retrouver cette souveraineté qu’aucun contrat ne garantit, mais qu’aucune servitude ne devrait corrompre.

L’Algérie invoque sa Numidie romaine, comme pour dire aux empires : elle fut jadis votre égale, et rêve encore de l’être.

Entre la chevelure sauvage de Georges et le brushing parfait de Georgia, toute la Méditerranée tient dans un paradoxe : l’ascèse contre la mise en scène.

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