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Portfolio 25 mars 2023

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Demandeurs d'asile en 89, témoignage d'un combat

Eté 2016, 50 demandeurs d'asile arrivent dans le nord de l'Yonne, "mis à l'abri" dit le gouvernement, en fait parqués, triés en vue d'expulsion dans le cadre de la procédure Dublin. Le blog accompagne sur trois ans leur et notre combat. La loi Darmanin est reportée mais pas annulée. Le danger reste présent et majeur. En ce 25 mars, jour de mobilisation générale, un témoignage.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

  1. Illustration 1
    Attente - dessin d'Elisabeth

    Des textes

    Des images

    Leur parole

    Au jour le jour ...

    Des extraits du blog comme témoignage de

    Ce qu'ils ont vécu

    Et que d'autres continuent à vivre ...

    https://demandeursdasileen89.over-blog.com/

  2. Illustration 2
    https://demandeursdasileen89.over-blog.com/2017/03/paroles-de-demandeurs-d-asile.html

    Je ne dors pas, je pense à Dublin

    Souvenir. C'est la fin de l'après-midi. J'arrive à Coallia. 1er étage. Les demandeurs sont là. Je demande à l'un.

    - Tu as bien dormi.

    - Non.

    Pourquoi dis-je bêtement

    Il répond seulement :

    - Dublin

    Paroles de demandeurs d'asile - Demandeurs d'asile en 89 (over-blog.com)

  3. Illustration 3

    Pourquoi l'Italie nous aime-t-elle tant?

    Parole de demandeur d'asile

    Nombre de demandeurs d'asile relèvent de l'Italie, premier endroit où ils ont enregistrés. Beaucoup de Soudanais. Ils ne veulent pas retourner en Italie. Des gens demandent mais pourquoi. Eux, ils savent bien pourquoi. Aussi, expulsés en nombre, ils reviennent dans la foulée, la plupart après plus de trois ans de fuite et de démarches auront l'asile, reconnus donc comme réellement en danger personnellement.

    Je garde du quotidien avec eux un souvenir affectueux et admiratif.

    Leur délicatesse,

    leur volonté,

    leur capacité à vivre ensemble,

    à assumer ensemble.

    Ils écriront au début de ce long parcours une superbe lettre qui sera superbement ignorée.

    https://demandeursdasileen89.over-blog.com/2017/03/un-appel-des-demandeurs-d-asile-soudanais-d-auxerre.html

  4. Illustration 4

    La France ne m'a même pas écouté une seule fois

    Nous sommes assis face à lui dans la cuisine. A. ne parle plus beaucoup depuis plusieurs semaines sur son départ. Il veut dire quelque chose. Il  commence d’une voix décidée se lançant comme on se lance à l’eau :

    - Je suis en France depuis,

    Il calcule,

    - 11 mois …

    Il s’arrête.

    - Je suis venu demander la protection de la France.

    Il s’arrête

    - La France ne m'a même pas … écouté une seule fois.

    Cette phrase, c'est la seule qu'il ait dite ces derniers temps. Il l'a dite à plusieurs reprises. Avec les mêmes silences. Pour lui le résumé absolu de ce qu'il a à dire.

    Elle résonne et se heurte aux murs froids qui nous entourent et part dans le silence froid de l'indifférence qui nous entoure.

     D. Auxerre, le 9 avril 2017

    La France ne m'a même pas … écouté une seule fois - Demandeurs d'asile en 89 (over-blog.com)

  5. Illustration 5

    Pensées noires d'un dimanche soir

    Chroniques de départs annoncés - 12 mars 2018


    Aujourd'hui nous sommes allés avec des amis de Nuitdebout distribuer aux C.P.** pour le rassemblement de demain. Pour moi, toujours un moment heureux. Rencontrer des habitants, certains connus depuis longtemps, d'autres dont on fait la connaissance. Et aussi l'impression d'être utile et à la bonne place.

    Une nouvelle semaine s'ouvre.
    Y aura-t-il des convocations?
    Le préfet ne va-t-il pas décider des centres de rétention au lieu des assignations?
    Comment vivent en ce moment ceux qui ont choisi de repartir dans la rue?
    Et ce demandeur arrêté cette semaine et en centre de rétention?

    Je hais ces dimanches soirs encore plus que les autres soirs.
    Annonces ou non de semaines sombres?

    La police et l'enfermement du début à la fin de leur "vie" en France, des cars qui les ont amenés dans l'Yonne aux avions qui les renvoient,
    Des expulsions des campements aux antichambres du départ à Coallia.

    Nous faisons tous ce que nous pouvons.
    Cette machine inexorable peut-elle être enrayée?

     

    * Voir la lettre sur le blog

    Pensées noires ... du dimanche soir - Demandeurs d'asile en 89 (over-blog.com)

  6. Illustration 6

    Quoi de neuf? - Rien de spécial.

    Depuis la période de Sens, cette phrase est le sésame pour échanger avec les demandeurs d'asile. C'est le résultat du travail des amis du "Formule 1". Le sésame pour la communication avec ceux qui parlent de mieux en mieux mais aussi avec ceux qui ne parlent pas beaucoup le français et même avec les nouveaux auxquels la phrase est transmise.

     Aujourd'hui, nous l'utilisons pour savoir si de nouvelles convocations sont tombées. Par SMS ou Whatsapp, elle permet de communiquer chaque jour à distance, c'est aussi la phrase rituelle qui ouvre  les soirées.

    La réponse espérée que tous connaissent aussi : "Rien de spécial".

    Depuis trois semaines, c'est cette dernière que nous entendons. Avec comme corolaire un si petit espoir, beaucoup d'interrogation et tant d'angoisse quotidienne pour les demandeurs concernés.

    Quoi de neuf? ... Traduire, y-a-t-il eu une nouvelle convocation? - Demandeurs d'asile en 89 (over-blog.com)

    Dublin, normal. Des mots qui veulent tout dire ... - Demandeurs d'asile en 89 (over-blog.com)

  7. Illustration 7

    Fin de l'histoire! Fin de l'histoire?

    Chronique d'un triste foyer - chronique de départs annoncés - Dublin, l'injuste convention (1)

    Cette chronique reprend dans l'inverse chronologique des moments d'écriture du quotidien des demandeurs d'asile relevant de Dublin

    Le 22 juillet, des demandeurs d'asile arrivent à Sens dans le 89. En septembre, ils sont transférés à Auxerre, dans un triste foyer. Le premier accueil de nous qui les avons accompagnés est glacial et glaçant : les premiers mots, d'un "assistant social" restent gravés:

    "Vous  ne les connaissez pas!"

    "Et de toute façon, ils vont tous partir."

    Ces mots gravés dans la mémoire, ressurgissent en ce jeudi de fin du mois de mars 2017 quand s'écrivent ces lignes.

    Fin de l'histoire!
    Fin de l'histoire?

    C'était jeudi le soir, très tard
    La nuit même
    La soirée s'était allongée

    De cours de français sur demande
    A repas du soir collectif
    A café soudanais
    aromatisé de cannelle,
    cardamone et gingembre
    A conversations décousues
    Avec l'un, avec l'autre.
    Avec l'un sur l'inquiétude pour sa santé
    Le foyer lui disant qu'il devait attendre une
    carte vitale alors qu'il possédait l'attestation sécu/cmu

    Et dans la nuit,
    doucement l'un des demandeurs d'asile
    dit : mon attestation se termine là. Et il
    ajoute: ... fin de l'histoire!


    Ces mots résonnent aujourd'hui
    Alors qu'un SMS  de lui m'avertissait ce matin.
    "J'attends les policiers
    et peut-être qu'ils viendront chez moi me chercher".

    Les pensées noires du dimanche soir
    se sont donc concrétisées.
    Celles qui succèdent au soulagement
    de la semaine passée sans notification.
    Et ce demandeur qui au foyer
    est connu pour sa réflexion, son calme,
    sa volonté attend aujourd'hui
    son renvoi dans un vrai désespoir.

    Fin de l'histoire!
    Fin de l'histoire?

    Pouvons-nous nous résoudre à cette fin
    Rester sans rien faire, manifester, dire.

    Il est le premier d'une nouvelle longue liste
    promise par le préfet.
    Arrivés en juin, à quelques semaines de la
    possibilité de pouvoir voir sa demande examiner ici,
    Ils viennent les chercher ... un par un.

    Fin de l'histoire?

    D.

    Fin de l'histoire! Fin de l'Histoire? - Demandeurs d'asile en 89 (over-blog.com)

  8. Illustration 8

    Ce soir, c'est mardi, c'est Soudan, c'est Souchon

    Ce soir, c'est mardi, il est 20 heures, l'équipe football s'en va,

    C'est un demandeur là depuis plusieurs années

    qui motive toutes les semaines chacun avec constance et obstination.

    C'est ça le quotidien ici, la prise en charge des demandeurs par les

    demandeurs eux-mêmes. Face à l'absence de toute activité,

    pour au minimum meubler le temps et sortir de soi.

      

    Ce soir, c'est aussi soirée félicitations.

    Les encore "Dublin" félicitent les nouveaux "normaux".

    La préfecture de l'Yonne après des mois de

    tergiversations applique en effet les promesses faites

    pour les "Dublin" venant de Calais. Tous ceux

    qui sont dans l'Yonne et viennent de Calais

    ne dépendent plus de cette convention.

    Fin de mois d'angoisse, de peur.

      

    Mais ce soir, c'est aussi Souchon, un des demandeurs d'asile,

    musicien, fait entendre aux autres la chanson  "C'est déjà ça",

    il traduit pour eux les paroles. Soudan, oh mon Soudan ...

    On oscille entre sourire et yeux qui se voilent de tristesse.

     

     

    Ce soir, c'est toujours au milieu des autres l'attente

    pour l'un des demandeurs d'asile de la deuxième convocation.

    Toujours l'angoisse au ventre, l'angoisse au cœur.

      

    Et c'est aussi toujours l'inquiétude pour l'un des demandeurs

    qui semble être entré dans un silence sans fond depuis

    la convocation et la fuite d'un de ses amis.

      

    Ce soir, c'est mardi,

    Un mardi comme les autres mardis ...

    Ce soir, c'est mardi, c'est Soudan, c'est Souchon ... Demandeurs d'asile en 89. - Demandeurs d'asile en 89 (over-blog.com) 

     

  9. Illustration 9

    A quoi servons-nous? A cela.

    Depuis juillet 2016, nous nous battons sur Sens au quotidien auprès des demandeurs d'asile.

    Il a fallu un certain temps pour que chacun ici prenne conscience de ce que représentait Dublin.

    Avec le transfert des DA sénonais sur Auxerre, nous avons fait connaissance des autres demandeurs d'asile dont K.

    Pendant tout l'hiver, nous en avons vu tant s'enfuir sans que cela mobilise suffisamment autour de nous. Notre première mobilisation sur Dublin a été devant l'Yonne Républicaine de Sens.


    Certains d'entre nous ont pu continuer à aller à Auxerre.
    Des amis qui ont mis en route des cours de français
    Et nous qui allons régulièrement à Coallia,
    Bravant dès le premier jour les interdits de Coallia.


    Nous avons passé cet horrible hiver.
    Certains demandeurs s'enfermant comme K. dans le mutisme, à partir du moment où les premières notifications ont eu lieu et que les premiers demandeurs prenaient "la fuite" (comme aime à les déclarer l'Etat français) rejoignant les pavés de France et d'Europe. Les soirées tristes et chaque lundi l'angoisse de nouvelles notifications dans la semaine qui s'ouvrait.

    Les demandeurs d'asile eux-mêmes se sont battus : ainsi, il existe un superbe texte des demandeurs d'asile soudanais rédigé au cœur de l'hiver. Les DA ont aussi réagi collectivement à des moments de grande injustice.

    Nous les avons accompagnés dans les moments de désespoir, nous avons tout fait pour mobiliser autour de nous, et nous avons commencé à les accompagner dans leurs démarches.


    Puis sont venus les deux mois sans expulsion ("grâce" aux élections) et l'explosion de joie quand beaucoup de ceux qui restaient sont alors devenus "normaux".

    C'est là que K.est sorti de journées de sommeil et de silence et s'est coupé les cheveux dans un geste symbolique comme pour une nouvelle vie.


    Puis sont venus les moments de nouvelles angoisses. Celles que l'on connaît avec les refus de l'Ofpra.

    Mais K. faisait partie de ceux dont le dossier était si noir que l'Ofpra même dès l'audition a indiqué
    qu'il aurait l'asile. Et pourtant sans ces deux mois inespérés, il aurait fait partie de ceux qui auraient été notifiés Italie
    et serait comme nos amis aujourd'hui au Prahda devant la terrible alternative de l'avion ou de la rue.

    Si nous avons pu être ainsi auprès d'eux, c'est aussi grâce aux amis du collectif, aux électrons libres et à des militants de Sens (et des environs),
    qui ont toujours été attentifs à nous, à notre présence, à la fatigue que cela
    représentait. A eux qui sont encore présents à chaque mobilisation pour Appoigny.


    C'est à cela que nous servons.
    Notre combat contre Dublin, contre les refus d'asile
    Notre accompagnement indéfectible au quotidien face à leur désespoir et dans les moments de joie.
    Notre aide dans les démarches.

    Nous nous réjouissons pour K. bien que nous sachions les souffrances qu'il a dû endurer
    pour être ainsi reconnu.


    Mais nous restons plus que jamais et complètement mobilisés contre le tri dans les CAO, et l'angoisse des transferts vers le Prahda.
    Contre le dispositif d'expulsion rapide du Prahda
    Face aux multiples refus de l'Ofpra.
    Dans la préparation du passage devant la CNDA.


    Le combat pour l'asile reste le combat essentiel. Et c'est un combat.
    Ce soir, c'était jour de fête, d'autant plus émouvant que beaucoup de ceux qui riaient avec lui ont eux des refus de l'Ofpra. C'est un nouveau témoignage des qualités humaines de ces demandeurs.

    Ainsi S.et Abd. qui comme deux autres Afghans n'ont toujours pas reçu l'annonce de leur passage en procédure normale, qui vivent depuis fin juillet 2016, dans ces multiples attentes, étaient partie prenante de ce bonheur partagé.

    17 octobre, date symbolique. Dominique, Un témoignage

    A quoi servons-nous? ... Sommes-nous prêts vraiment à les laisser renvoyer dans le pays qu'ils ont fui?.? - Demandeurs d'asile en 89 (over-blog.com)

    Ces rires et sourires, une image que nous aimerions voir, que nous devrions voir plus souvent. - Demandeurs d'asile en 89 (over-blog.com)

  10. Illustration 10

    Ça va aller ...

    Ils sont partis tout au long de ces trois années ...

    Ils squattent maintenant d'autres pays d'Europe

    qui ne veulent pas plus d'eux

    Avant de partir, ils disent

    Pour couper court à tout,

    ça va aller ...

     

    Ils ne veulent pas d'argent.

    Ils sourient,

    Et ils s'éloignent

    Refusés ici,

    Tentant ailleurs.

     

    Dublin ou déboutés.

    Ils ont passé toute une partie de leur vie déjà,

    dans cette Europe ici et ailleurs.

     

    Après des soirs et des soirs d'attente,

    les repas, les dossiers, les espoirs, les tristesses,

    Quand tout est fini, ils partent

     

    Dans cette Europe de non droit

    Et d'inhumanité,

     

    A M., demandeur soudanais,  parti maintenant depuis presque une année ...

    https://demandeursdasileen89.over-blog.com/search/ca%20va%20aller/

  11. Illustration 11
    Dominique sur la droite sur la photo, ici au Prahda

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