Tout film qui ne serait pas un produit de consommation de masse, demande, pour apparaître sur la scène, ce soin amoureux dont l'entourent auteurs, producteurs, acteurs, techniciens, distributeurs, programmateurs, médiateurs culturels, directeurs, réseaux de salles… jusqu'aux spectateurs. Et à l'ACID, nous croyons profondément que prendre soin des films, c'est prendre soin des spectateurs : permettre ainsi à chacun d'exister dans l'espace public, pleinement, avec ses singularités. Les films que nous soutenons, que nous chérissons, à l'année ou lors de la programmation cannoise – dans ou "Hors les murs" – se ressentent du soin dont nous les entourons. Ce qui s'est joué au Louxor, à Paris et qui se jouera dans les semaines et mois qui viennent, au gré des avant-premières, des sorties, des ACID POP et événements partout en France témoigne de ce que l'ACID défend depuis près de trente ans : la solidarité n'est pas un vain mot, elle produit des effets concrets, tangibles, dont la partie visible se matérialise en termes de fréquentation dans les cinémas. Mais il ne faudrait pas sous-estimer l'invisible, l'indicible : la fabrique, renouvelée à chaque débat, à chaque rencontre, à chaque projection, d'un commun aussi précieux qu'il est fragile, vulnérable.
À travers les films, c'est de ce commun, qu'à notre manière, nous cinéastes de l'ACID, prenons soin. Et à ce titre, notre action est politique, sociale, et donc essentielle. Nous la maintiendrons dans les mois qui viennent, sur tous les fronts où nous pouvons agir. Pour défendre avec amour ce cinéma qu'on dit « fragile », tout simplement peut-être parce qu'il n'a pas abdiqué l'idée ni l'exigence de la beauté. Gestes jumeaux, au fond, puisqu'il n'y a pas d'amour du soin* possible sans goût de la beauté**.
*Roland Gori
**Éric Rohmer