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Billet de blog 11 mars 2024

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Les Cheyennes de Gaza

En diffusant « Les Cheyennes », un film de John Ford, daté de 1965, la chaîne Arte avait-elle pensé aux possibles recoupements et analogies avec « l‘oeuvre sioniste » en nous livrant, même en version hollywoodienne romancée, quelques vérités et ressorts historiques à propos de toute colonisation?

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Une fois n’est pas coutume. Qu’il nous soit donc permis de faire de la  Récup’ à notre profit, en sens inverse de celle pratiquée d’habitude par  l’hydre du capitalisme. Ce monstre aux capacités illimitées, dont celles de «  récupérer »  et  détourner à son profit, tout événement politique ou culturel. A l’instar, par exemple,  d’un Benetton  qui fit scandale avec ses immenses affiches utilisant, comme toile de fond,  la misère du monde, propre à mieux vendre sa marque de vêtements au nom d’un souci planétaire et d’un respect de la diversité ethnique.

Aussi faut-il saluer tant soit peu ce  film qui nous livre les principaux ingrédients des ressorts et de la volonté de « liquidation- dissolution »  d'un peuple, ou du moins de sa réduction à la portion congrue, toujours accompagné du vol et de l’accaparement des terres.  Démontrant, s’il fallait encore le prouver, que toute conquête de territoire habité, toute œuvre de colonisation porte en ses flancs les mêmes dynamiques idéologiques,  les mêmes actes de violence exercés à l’égard de ceux que l’on veut dominer ou voir disparaître.

 Il suffit de commencer par ces deux merveilleuses répliques : « Un bon indien est un indien mort » et « Dès la sortie du ventre de sa mère, un cheyenne est un futur guerrier ». Quoi de plus littéral, de plus évident et si répétitif ?

 La suite vient toute seule et tout «  naturellement ». Confiner les tribus cheyennes dans un espace restreint, ériger des forts , des frontières, y compris avec le high tech de l’époque- le chemin de fer-, construire des forts et utiliser des canons face aux flèches et aux simples fusils ( confisqués par les cheyennes au cours de leurs attaques), les réduire à la faim en exterminant  les troupeaux de bisons en migration, profiter de rivalités internes à la communauté cheyenne et de la présence de jeunes couillons qui veulent en découdre pour réprimer davantage…La maîtrise de l’espace se fait étape par étape et  les moments de «  négociations » se concluent par de l’emprisonnement !

 Ne sont pas en reste les traumatismes personnels d’officiers qui veulent, eux aussi, en découdre, comme cet impulsif sergent dont le père fut tué lors d’affrontements avec les indiens, portant seuls la responsabilité de tout «  massacre » !

 Et puisque toute production hollywoodienne demande «  violence, sexe et  happy end », on a bien sûr droit à la cerise sur le gâteau : la jeune et jolie quaker blonde qui, non seulement tient lieu d’UNWRA, mais passe, impie,  de l’autre côté. Ne voulant pas abandonner les enfants  cheyennes à qui elle faisait la classe, rêvant d’en faire de jeunes civilisés, elle accompagnera leur déroute tout au long de leur misérable pérégrination. Son attitude et sa beauté éveilleront la conscience d’un officier qui, derechef, n’hésitera pas à lui proposer des épousailles, tout en cherchant des appuis gouvernementaux pour limiter la casse et obtenir un sort meilleur pour les cheyennes et les enfants encore en vie.  Du cœur, donc,  à tous les étages et démonstration que le camp des méchants comporte plein de gentils.

Ce qui n’empêchera pas la quasi éradication d’un peuple, dont la « férocité » légendaire (attaques de diligences,  campements de braves colons, razzias de jeunes filles blanches, embuscades sauvages etc…) a contribué à conserver toute bonne conscience à l’égard d’un génocide d’autochtones aux mœurs d’un autre temps !

Arracher un peuple à sa terre ancestrale,  le déplacer sans cesse,   confiner ce qu’il en reste dans un espace limité, lui faire endurer les mauvais traitements, les geôles, la famine, le froid (celui du Nebraska) et même aller jusqu’à l’hécatombe : la «  Conquête » américaine n’a pas de prix. Et tant pis si, pour « s’installer » et instaurer la « modernité », il faut en passer par là.

 Remplacez cheyenne par palestinien et servez chaud !

 Adèle 47.

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