Les morts ne souffrent plus
Mais, les vivants, quand tonnent les bombes
N'ont plus d’espace pour souffrir
Plus de temps pour le deuil, la douleur pétrifiée
Sur l’ombre des gravats et des corps mutilés
Les yeux des enfants, grand ouverts
Sur des interrogations, des pertes inconnues
Et leurs lèvres, leurs bouches ne diront plus rien longtemps.
De jeunes apprentis nazis rassemblent des silhouettes
Des cohortes de Figuren anonymes,
Pour faire d'elles des « musulmans »
Fantômes des Konzentrationslager qui ont renoncé à la vie
Et se traînent incertains, pas à pas, sur le sol
La tête et le regard déjà promis au néant.
De jeunes gars shootés, drogués qui veulent faire plus ou mieux
Pareil et autrement
Sans savoir leur déchéance et les abîmes qu’ils dressent…
Nous, ailleurs, ici, nous souffrons de la honte
La colère ne nous tient plus chaud
Aucune colombe aucune fleur ne vient hanter nos nuits
Mais le désespoir est interdit.
Ici, pas de barbelés pour se jeter dessus,
En finir avec le factice, l’indécence et l’ordre de nous taire
Les yeux de nos proches sont bandés
Mais les langues s’agitent comme des têtards affolés
Qui brament leurs certitudes dans le vide.
Il nous faut résister, au moins un peu comme eux
Qui subissent et résistent
Il faut se rappeler, il nous faudra le faire
Comme le demandent les poètes assassinés !
 
                 
             
            