Les journalistes internationaux sont interdits à Gaza et des dizaines, déjà sur place, ont été tués sous les bombardements. Mais nos excellents députés de l’Assemblé Nationale ont été assujettis à un spectaculaire visionnage. Ils en sont ressortis en état de choc, traumatisés, découvrant, une fois n’est pas coutume, les horreurs de la guerre. Et même, quelle surprise!, l’existence d’une jouissance dans l’acte même de mettre à mort autrui.
Accordons-leur quelques circonstances atténuantes : ils sont le produit de 40 ans de fabrique de l’ignorance, ils n’ont pas fait leurs humanités à l’université mais au sein d’écoles spécialisées, ils sont en rupture de connaissances historiques et autres disciplines en sciences humaines. Ils ne savent donc pas que tout tortionnaire et guerrier cherche à être maître de la mort à travers l’agonie de l’autre, où gît aussi, en version macabre, une sorte d’érotisme viriliste. Ils ne savent pas non plus combien la pratique du viol est hautement symbolique et qu’elle fait partie depuis longtemps des «techniques de guerre ». Les casques bleus en Yougoslavie, qu’ont-ils fait d’autre ?
Et puis, ils n’ont pas trop fait la guerre d’Algérie ou passé leurs week-end avec des GI ou des barbouzes, ni dans les camps d’entraînement d’un Tsahal rénové, ni aperçu leurs tee shirts avec de jolis dessins de femmes musulmanes et de jeunes palestiniens en cible ( aussi bien que les nez crochus « juifs » des cibles en carton du GUD)… Ni vu un certain film israélien, dénonçant les pratiques des corps d’élite. Ils n’ont pas vu les milices chrétiennes libanaises massacrer à Sabra et Chatilla, ni des soldats israéliens regarder le spectacle du haut des miradors… d’où le retournement de plusieurs officiers de Tsahal, glorieux vétérans de la guerre du Sinaï, mais peu habitués à ce genre de pratique ni à cette absence d’éthique…
A quelques exceptions prés, nos députés n’ont reçu en héritage que le « choc des civilisations » avec une grille de lecture du monde taillée sur mesure, dans une vision strictement dualiste- le camp du bien, le camp du mal, du noir ou du blanc, point barre. Ils ne connaissent pas dans leur chair, ni dans leur âme, le dur savoir du « populaire » : être bernés, humiliés, opprimés, exploités et transformés, quand il le faut, en chair à canon.
Que leur reste-t-il ? De l’effroi, de la compassion, du recueillement sincère, peut-être même une grosse angoisse existentielle, avant d’aller faire un tour devant les micros, sans trop bien savoir qu’ils font eux-mêmes partie du spectacle.
Mais bref, on leur a offert une petite Shoah en modèle réduit. Et bien sûr ils ont succombé. Qui ne l’aurait pas été, à la vue d’atrocités ? Comptez sur les dirigeants du peuple élu pour savoir où sont ses « devoirs » et quelle tache ils doivent accomplir. : assurer encore une fois leur impunité cette fois encore au nom de « la défense » du pays. De quoi s’assurer des « droits » infinis. Comme il n’y plus vraiment beaucoup de judéité en Israël, mais des israéliens qui prétendent être tellement « juif » qu’ils peuvent parler au nom de tous les juifs de la planète, il n’est pas étonnant que ce retournement de mission et cette confusion de valeur s’accomplissent à nouveau.
L'hyperréalité porte ses fruits : on oublie qu’en un mois il y a eu plus d’enfants tués à Gaza qu’en un an et demi en Ukraine, et que les tonnes de bombes déversées, dépassent le largage à Hiroshima. Et personne pour réclamer un pendant à ce film d’horreur. A part quelques images sur les immeubles détruits, quelques prise de vue sur des familles éplorées, des visages juste un petit peu ensanglantés, rien ou pas grand chose sur le phosphore blanc qui détruit et consume de l’intérieur, sur les corps désarticulés, affamés, cramés, empoisonnés par l’eau de mer sur des enfants agonisant, mais qui ne veulent pas mourir. Ah, si le coup des bébés prématurés…on s’en occupe disent les responsables militaires qui comprennent si bien le cœur des mères occidentales !
Lorsqu’on voit des films d’horreur, on n’a plus beaucoup de temps pour s’occuper des déclarations des dirigeants israéliens ni trouver curieux cette reprise de l’utilisation de « bus » pour déporter les palestiniens hors de Gaza. Tout le monde n’est pas censé se rappeler cette pratique sous Vichy, notamment lors de la rafle du Vel d’Hiv en juillet 42. On a pas non plus le temps de s’interroger sur les raisons d‘un autre détournement politique : s’occuper avant tout de la montée de l’antisémitisme, devenue la principale préoccupation en France, y compris pour Marine Lepen! Joli comme tour de passe-passe. Ils sont forts les juifs de droite et d’extrême droite, ils savent jouer au billard !
Le prochain Nuremberg, s’il existe, s’occupera-t-il de tous les complices de crimes de guerre et contre l’humanité ? Cela ferait bien du monde…
Vaille que vaille, il faut bien avancer et continuer de travailler : les lois contre les migrants n’attendent pas. Messieurs Zemour, Darmanin et consorts, vous avez à remercier l’Etat sioniste et ses zélotes français. Et n’oubliez pas les retours d’ascenseurs, entre ardents nationalistes, entre colonialistes chevronnés, acharnés, on se doit bien ça !
Resterait juste une prière à faire : que tous les bons sentiments, les bonnes intentions d’une gauche française, y compris celle qui travaille ou prétend travailler pour la cause des opprimés et des braves gens, dans l’hexagone s’entend, se taisent au lieu de continuer à nous faire endurer leur mal-être, leur honte rentrée, post pétainiste ! Lorsqu’on dit aimer à ce point le genre humain et vouloir la paix entre israéliens et palestiniens, il n’y a qu’une chose à faire : cesser de se ridiculiser en demandant un drapeau palestinien sur la Tour Eiffel pour faire bon poids, bonne mesure ( Au secours, Guy Debord, encore du spectacle!), et demander, pour Gaza et la Cisjordanie, un Cessez le feu immédiat, sans condition. Archav, maintenant!