Je vous écris aujourd’hui en tant que française résidente à l’étranger, mais aussi native de Caen, en Normandie, et vous comprendrez l’importance de ce point par la suite. Monsieur Anglade, je vous ai déjà contacté il y a quelques semaines concernant la situation à Gaza en vous faisant part de ma grande détresse quant à l’inaction de la France face aux atrocités commises par l’état colonial israélien à Gaza, violences qui se sont maintenant étendues en Cisjordanie occupée, malgré un cessez-le-feu, certes fragile, mais qui ne devrait sans doute pas autoriser une intensification du vol des terres Palestiniennes par des colons extrémistes. Mon courrier n’a obtenu de votre part aucune réponse.
Aujourd’hui, les annonces effroyables de Trump sur le destin de Gaza, plongent une population polytraumatisée par des mois de guerres et des décennies d’occupation dans une anxiété profonde. Je souhaite aujourd’hui connaître la position de la France face à ces annonces, mais aussi ce qu’il en est du respect du mandat d’arrêt international contre le premier ministre israelien, qui n’a rien trouvé de plus amusant que d’offrir un bipeur en or à Trump, en référence à l’attaque israélienne au Liban qui a tout de même causée la mort de plusieurs innocents, sans compter le nombre de blessés, et parmis eux des enfants.
Est-ce que la France se tiendra aux côtés de personnalités politiques sous le coup d’un mandat d’arrêt international, et dont les crimes commis depuis plusieurs mois ont poussé des organisations internationales et des juristes à parler de génocide à Gaza ? Ou bien, est-ce que la France se rangera du côté des quelques pays courageux qui commencent à enquêter sur les soldats de retour de Gaza, qui ont reconnu la Palestine, mais qui aussi appliqueront la décision de la cour internationale de justice?
Ma deuxième question porte maintenant sur le projet de loi du ministre de l’intérieur visant à rétablir le délit de séjour irrégulier dans une énième et grotesque loi immigration. A l’heure où les pensées se rabougrissent, se tournent de plus en plus vers le fascisme, est-il vraiment nécessaire de céder à l’extrême-droite au lieu de la combattre? Je sais qu’une grande partie de la classe politique aime à dénigrer la gauche, à la calomnier et la caricaturer, mais sans doute faudrait-il rappeler au président et à l’ensemble de ses ministres et députés, que c’est grâce à ce peuple de gauche, qui a en horreur les idées d’un parti fasciste et fondé par des membres de la Waffen-SS, qu’ils sont aujourd’hui élus.
Des tentatives de réécriture de l’histoire peuvent être osées par quelques opportunistes, mais comme je le mentionnais plus haut, je viens de Normandie, région ravagée par les bombes et la guerre 39-45. Je suis aussi la petite-fille d’un homme qui a été déporté par le gouvernement collaborationniste de Pétain, dans un camp de travail en Autriche, dans le cadre de la STO, qui a réussi à s’en échappé, et à se cacher pendant le restant de la guerre chez des résistants à Vire, en Normandie, grâce à des faux papiers. Tous les documents de mon grand-père datant de cette période se trouvent au Mémorial de Caen, qui pour l’avoir visité de nombreuses fois, porte de façon claire le message du “plus jamais ça”.
Criminaliser à ce point la migration, c’est céder à l’extrême droite, c’est renier toutes nos convictions, et nous ranger du côté du pire. Si la justice pour le moment nous épargne, c’est l'Histoire qui jugera sévèrement cette descente collective dans les abîmes fascistes.
La mise en application de cette loi immigration, mais aussi du rétablissement du délit de séjour irrégulier est une faute lourde et met en danger des populations très précarisées. C’est aussi légitimer des discours que l’on entend de plus en plus dans les médias et à l’assemblée et qui visent à rendre coupable les migrants de tous les maux de notre société. Ce discours est à la fois dangereux et raciste. Monsieur Anglade, nous sommes des citoyens français, résidents dans un pays européen, tout cela grâce à des lois qui nous offrent la possibilité de circuler librement au sein de l’Union Européenne. N’est-il pas cynique et contradictoire que de soutenir une loi criminalisant la circulation de personne dans votre situation? Car, une fois l’extrême-droite au pouvoir en 2027, qu’en sera t-il de votre liberté de circuler en Europe ?
Sachez que mes années auprès de diverses associations m’ont permis d’apprendre une chose : peu importe toutes les lois abominables que le gouvernement Macron peut imaginer dans le seul espoir de grappiller quelques semaines supplémentaires de pouvoir avec l’aide de l’extrême-droite, il y a un monde qui lui est et lui restera inconnu, celui d’une société civile humaine et solidaire, qui ouvrira constamment ses portes aux réfugiés, et à tous ceux que l’état criminalise et dont le destin tragique ne vient même plus heurter sa conscience.