La situation porte de la Chapelle est maintenant bien différente que celle connue depuis plusieurs mois par les riverains et réfugiés de ce quartier du nord parisien. En effet, malgré une distribution d'environ 300 petits-déjeuners ce dimanche 10 septembre, il n'y a aucun signe d'un éventuel campement aux abords du boulevard Ney.
Il faut aussi noter une forte présence policière aux alentours du camp humanitaire. Environ 6 fourgons sur un périmètre très restreint. Un camion de gendarmerie est même stationné sur l'ancien point de distribution du petit-déjeuner, les fonctionnaires d'état eux-mêmes installés devant leur véhicule, armes sorties et bien mises en évidence.

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Ce matin, les policiers sont compréhensifs et nous laissent garer le camion à côté du nouveau lieu de distribution quotidien, une petite place située à une centaine de mètre du camps. Cependant, cette clémence n'est pas toujours observée.
La semaine passée, les bénévoles de l'association Solidarité migrants Wilson ont du organiser à même le sol le petit-déjeuner, le dressage des tables ayant été interdit par les gendarmes. Ces derniers resteront tout le temps de la distribution derrière l'équipe bénévole.
Néanmoins, une question se pose : où est-ce que dorment les migrants depuis la dernière évacuation ? Le contraste est saisissant entre le calme boulevard Ney, les dizaine de corps épuisés au sol, regroupés sous un des ponts du carrefour, et les 300 personnes présentes à la distribution.
Je demande alors à quelques réfugiés ce qu'il se passe la nuit, et où est-ce qu'ils dorment. Ils me montrent des rues adjacentes, les ponts. Ils me font part d'un autre « mushkila », un problème récurrent. Leurs regards se tournent vers le camion de police. Ils miment un homme en train de dormir se faire réveiller par coups de matraque, ou coup de pied.

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Ces témoignages se répètent et traduisent un changement de politique à l'égard des réfugiés : Les rendre invisibles et par conséquent plus vulnérables. Sûrement que les échecs successifs des 35 évacuations en moins de 2 ans à Paris y sont pour quelque chose. Opter pour la politique du pire afin de « dissuader » les candidat.e.s à l'exil.
Cependant, au lieu d'opter pour une réponse humaine et digne, le gouvernement donne l'impression de s'engouffrer dans la tendance du tout répressif, en ajoutant à cela humiliation et harcèlement à l'égard des réfugiés et des associations, comme le montre le cas récent de l'équipe Médecins du Monde, interrompue en plein travail par les forces de l'ordre à Paris
Cette politique visant à rendre les réfugiés invisible dans l'espace public est tout simplement dangereuse et honteuse pour un pays dit "démocratique". En effet, en dispersant ainsi les réfugiés, l'état se rend coupable de non-assistance à personne en danger, laissant alors des personnes affaiblies par plusieurs mois d'exil à la merci de groupe de passeurs, et précarisant encore plus le travail des associations locales.
Le gouvernement doit clarifier sa position sur la question migratoire. L'hypocrisie dont se rend coupable Emmanuel Macron n'est plus tolérable. Nous ne pouvons accepter de notre président qu'il tienne un discours axé sur l'humain - « Laissez les migrants dehors est indigne de notre pays »-, pour ensuite laisser une politique répressive s'installer dans les rues de Paris.

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