De nos vies, que faites-vous?
Il y a une photo d’Emmanuel Macron à laquelle il m’arrive parfois de repenser. Souvent en ce moment. Elle date de l’été dernier, et l’on y voit le président tout sourire sur un jet ski en mer Méditerranée. Elle m’avait perturbée puisqu’il me semblait indécent, surtout lorsque l’on est locataire de l’Elysée, de s’adonner aux joies du jet-ski dans l’un des pires cimetières du monde. Mais voilà, s’il y a une chose que j’ai appris avec la Macronie, c’est que le pire est bien certain.
Je me demande si Macron affiche ce même sourire en ce moment, ce même mépris de nos vies, faites de petits riens, notamment le petit rien de pouvoir partir en retraite à l’âge de 62 ans, pour espérer quelques années de vies en bonne santé, auprès de nos proches et de laisser libre cours à nos envies et désirs.
Mais ces vies, celles étrangères aux récits bourgeois, celles qui racontent des ouvrières partant chaque matin depuis 40 ans pour moins de 1800€ net par mois, ces cuisiniers aux dos cassés, ces enseignants, les soignants, les éboueurs, les vies endettées, oui de ces vies dont le quotidien reste inconnu dans les ministères, qu’en font-ils?
Ce gouvernement nous impose des responsabilités qui pourtant lui incombent : pisser sous la douche pour sauver la planète, travailler deux années supplémentaires pour renflouer les caisses et voter Macron pour contrer l’extrême-droite.
Rien de tout cela ne marche: nous allons encore suffoquer cet été après avoir vécu une sécheresse hivernale, les pauvres sont encore plus pauvres, les riches toujours plus riches, et l’extrême-droite est à la mode. Quant à moi, je repense à mon président sur son jet-ski, de cette démocratie qui s'abîme chaque jour un peu plus et la colère gronde.
Nos vies modelées par leurs paniques bourgeoises, nous obligeant à devenir des êtres résilients face aux vertiges de demain, quand ceux au pouvoir refusent l’idée même de discuter d’autres possibles, de rapports humains moins violents et plus égalitaires, de nos vies que nous ne voulons plus gâchées par un entre-soi blanc, bourgeois et masculin, qui ne fait plus envie qu’à eux-mêmes soit dit en passant, nos vies accablées par de sinistres ambitions politiques et d’un retour à l’ordre réactionnaire, nos vies dont je me demande ce que le gouvernement compte bien en faire d’ici deux jours.
Combien d’années allons-nous encore perdre de nos vies à contester et refuser de nous plier à l'exigence de résilience imposée par notre gouvernement face aux défis majeurs qui nous attendent, alors que nous savons très bien que des solutions pérennes existent. L’une des premières mesures à prendre serait une taxation sans précédent des millionnaires et milliardaires pour une juste répartition des richesses.
Quand allons-nous enfin quitter la lutte, ces rapports de force, et abandonner nos contestations dont le gouvernement n’a de toute façon cure, puisque l’opposition est réprimée soit par les forces de l'ordre ou par la surdité aggravée des ministres face aux mobilisations qui durent pourtant depuis des semaines?
Quand est-ce que nos voix seront entendues par ceux qui décident de nos vies?