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Billet de blog 25 mars 2023

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Monsieur Macron, je vous ai compris

Il y a une rengaine qui revient régulièrement depuis le début des débats sur la réforme des retraites, comme l’a récemment rappelé le député Jean-Louis Bourlanges sur la matinale de France Inter. Nous, le peuple français [...], la majorité serions trop bêtes pour comprendre les enjeux de cette réforme qui nous vole deux années de vies.

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Il y a une rengaine qui revient régulièrement depuis le début des débats sur la réforme des retraites, comme l’a récemment rappelé le député Jean-Louis Bourlanges sur la matinale de France Inter. Nous, le peuple français, les sans-dents, la foule, les gaulois réfractaires, et autres adjectifs  assassins distillés par-ci, par-là, dans un franc mépris, oui nous, la majorité serions trop bêtes pour comprendre les enjeux de cette réforme qui nous vole deux années de vies.

Disons-le trivialement, nous serions donc des abrutis, pas assez éduqués, des beaufs en meute, nous démarquant par une absence de bonnes manières, une inculture crasse, qui nous empêcherait de comprendre quoique ce soit à l’économie et aux réformes sociales du gouvernement. Cette parfaite compréhension des enjeux serait donc réservée à l’élite macronienne. .

Du haut de votre mépris, vous qui savez, qui avez le monopole du bon goût et de la vérité, pensez-vous que nous sommes trop benêts pour ne pas comprendre l'indécence d’un patron, au hasard prenons Patrick Pouyanné, qui se voit proposer une augmentation de salaire au montant scandaleux en pleine crise sociale? Quand nos augmentations de salaires, si nous en obtenons, s'essoufflent en chemin en raison de l’inflation. Que nous devrions en plus de cela calmer notre colère et accepter une fois de plus cette main-mise sur nos vies par un groupe minoritaire qui n’a de cesse de nous humilier et appauvrir au travers de lois anti-sociales?

Nous ne voulons plus d’un régime bourgeois et déconnecté, nous ne voulons plus nous soumettre à un seul récit de vie, ni une seule ligne de conduite qui ne représente en rien  nos trajectoires de vies diverses.

Nous ne voulons plus que nos vies soient détruites et décidées par une bande d’irresponsable avide, qui brade notre futur à l’aide d’allers-retours inutiles en jet-privé, de pêches intensives, et de forages pétroliers, tout en prenant soin de ne rien faire ruisseler.

Nous pensons que le bonheur et l’épanouissement se trouve ailleurs qu’au travail car oui combien d’heures supplémentaires ai-je effectuée sans être rémunérée dans le secteur de la restauration, et combien de fois ai-je dû me battre pour faire valoir mes droits, et quelle colère je ressens lorsque je vois les patrons de mon secteur d’activité bafouiller à la télévision qu’il n’y a plus de main d’œuvres disponible, sans remettre en cause l’exploitation qui a provoquée cette fuite des salariés. C’est fini, nous ne serons plus être exploités, et nous ne remiserons plus nos vies pour y laisser notre santé mentale et physique. Nos droits sont et resteront prioritaires face à vos profits.

Et dans un dernier souffle, vous venez convoquer  l’immigration, dont vous savez que le sujet viendra réveiller les passions  racistes chères à une certaine partie de notre population, car du fascisme qui monte, de nos inquiétudes face à la peste brune, vous n'en avez cure. Pire, vous nous soumettez au chantage en laissant sous-entendre que si nous l’ouvrons un peu trop, l’extrême-droite arrivera au pouvoir. Mais vous n’êtes pas un rempart contre l’extrême-droite, bien au contraire, vous l'alimentez en vous attaquant à la gauche de façon permanente, tout en reprenant les thèses racistes du parti fondé par un ancien membre de la Waffen-SS. Et de ce chantage, je me suis libérée, les dernières semaines ayant remis au goût du jour l’espoir. 

Et à tout cela, il faut ajouter cette violence policière, dernier rempart de vos névroses bourgeoises, qui avant de s'appliquer de façon méthodique en manifestation, était déjà fort bien visible dans les banlieues françaises à l’encontre des personnes non-blanches, et que j’ai pu notifier maintes et maintes fois dans ma ville, Saint-Denis. Mais cela aussi se fissure, car même le Conseil de l’Europe vous sermonne, et il est devenu quasiment impossible de vous cacher derrière une éventuelle violence légitime d’état. Plus personne ne vous croit.

Alors oui, Monsieur Macron, nous vous avons bien compris, mais comprenez à votre tour que nous sommes bien déterminés à ne plus laisser à la bourgeoisie et au capital le loisir d’exploiter nos vies pour leurs profits. 

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.