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Billet de blog 6 janvier 2022

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Michel Foucault et les enjeux méthodologiques

Il y a comme une impression de vouloir imposer un discours unique, une méthodologie unique... Comme si le terrain n'était pas important.

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Je ne sais pas mais je n’ai jamais compris cette tendance à vouloir imposer des pratiques méthodologiques univoques comme si le terrain était un élément statique, alors que chaque situation devrait convoquer telle ou telle méthode. Le terrain détermine le choix de la démarche nous permettant de mieux interroger l’objet. Ibn Rochd et Spinoza nous invitaient déjà à plonger dans les arcanes du terrain. Bien avant Foucault, Lacan, Deleuze, Bourdieu et bien d’autres qui privilégient une lecture directe du terrain, interrogeant, par exemple, l’hôpital, l’usine, l’université ou le monde carcéral. Je vais essayer ici d’expliquer comment Foucault travaille sur le monde médical et quelle méthodologie privilégie-t-il.

C’est vrai que Foucault qui a énormément interrogé le savoir médical rejette le postulat de la norme et de la normativité. Souvent, les questions méthodologiques posent sérieusement problème surtout dans l’espace médical où les égos prennent parfois le dessus au niveau du débat. Ainsi, nous sommes en présence de deux entités, l’une dominante, conformiste et l’autre, réfractaire aux normes dominantes, pragmatique, privilégiant la démarche empirique. Les deux, dans ce moment crucial, utilisent leur savoir pour détenir le pouvoir, l’un est légitimé par les instances officielles et l’autre, par des réalités extérieures.

Il va ainsi dans le sens de l’invitation de Michel Foucault qui insiste sur la nécessité pour le médecin de s’équiper d’un savoir médical sérieux qui lui permettrait de mettre en œuvre sa propre méthode et un protocole qui peut être nourri des aléas du présent. Foucault cite Arétée de Cappadoce (Premier siècle A. J-C) qui fait une distinction entre la partie diagnostique et les éléments thérapeutiques pour illustrer justement sa vérité : « il faut que nous soyons souvent pour nous-mêmes des conseillers accomplis eu égard aux choses utiles pour la santé ; car il n’y a presque aucun instant de la nuit ou du jour où nous n’éprouvions le besoin de médecine ».

Foucault va entreprendre de contester les lieux établis et les sentiers battus des rets de la méthodologie dominante. Il convoque l’archéologie du regard médical, au-delà de l’observation clinique d’un cas, il retrouve une attention particulière à la souffrance, au pathos.

La crise des cheminements méthodologiques est foncièrement idéologique, elle met en scène la question de la norme et de la normativité et la relation qu’entretiennent les uns et les autres avec la norme, réfractaire aux contours d’une position normative apparemment marqués par la croyance d’un savoir stable et d’instruments méthodologiques permanents.

La question éthique est au cœur de ce débat entre un discours normatif et des pratiques empiriques, accordant une grande importance aux empiricités. Ce n’est donc pas nouveau cette question qui met en opposition deux conceptions du monde, deux manières de construire les choses, l’une normative et l’autre empirique.

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