La campagne indépendantiste a démarré le 1er août, avec une tournée dans les 341 tribus, comme annoncé dans la motion stratégie de la convention FLNKS du 18 juillet 2020, pour arriver à la victoire du oui. Comme en 2018, les comités nationalistes et citoyens à l’échèle de chaque commune sont l’élément de base de la campagne, comme l’étaient en leur temps les comités de lutte. Il y a aussi les mercredis du OUI à Nouméa sur la place du Mwa Ka. Tous les 4 du mois (4 août, 4 septembre), journée « Affichons nos couleurs » (appel à sortir avec les couleurs de Kanaky) comme en 2018. À compter du 1er septembre, les indépendantistes sont entrés dans la troisième phase de leur mobilisation, celle de l’intensification jusqu’à la consultation avec le concert pour l’indépendance au Parc Fayard le 5 septembre et un meeting final de 30 septembre à Kowé Kara à Nouméa.

Pour envisager les marges de progression possibles pour le Oui en 2020, l’enjeu de taille aujourd’hui est de mobiliser les abstentionnistes de 2018, au nombre de 33 000 inscrits sur la LESC qui se répartit avec une grande majorité dans le Sud – plus de 19 000 –, une part importante dans les îles Loyauté – 8 300 – et les reste dans le nord – 5 600. Et, contrairement à 2018, on constate peu de sondages, un seul en fait, car, dit-on, ceux de 2018 auraient démobilisé les loyalistes d’aller voter, laissant penser que l’indépendance était loin d’arriver !
Avec un taux d’abstention de près de 39 % (8 311 inscrits), les Loyauté sont le premier réservoir de votes possibles pour le oui car elles sont majoritairement indépendantistes, comme je l’ai montré dans mes papiers du JSO 147 et d'autres communes indépendantistes ont également un réservoir de voix indépendantistes mobilisables notamment sur la côte Es. Rappelons qu’en 2018 le oui a remporté un score de 39 081 voix dans les communes indépendantistes (soit 80,53 % de oui dans ces communes) et 21 118 dans les communes non indépendantistes (soit 23,36 % sur ces communes. Depuis les dernières municipales, la Nouvelle-Calédonie compte vingt-deux communes indépendantistes et onze non indépendantistes. Le taux d’abstention moyen sur les premières et des 17,74 %, soit 14 294 électeurs, ce qui représente un réservoir de voix possibles important. Sur les communes non indépendantistes, ce taux est de 11,71 %, soit 18 772 inscrits. On note donc un plus fort taux d’abstention dans les communes indépendantistes. Mais, même dans le Grand Nouméa, si on considère que 85 % des Kanak inscrits sur la LESC votent oui, on peut estimer une marge de oui possible importante, d’environ 3 500 inscrits.
Les Kanak semblent représenter aujourd'hui près de 49,5% de la LESC Celle-ci compte des nouveaux votants en 2020 (kanak et non kanak) qui ont eu 18 ans depuis 2018 et autres nouveaux inscrits, soit 6 475 en plus, ce qui nous donne donc 180 640 votants inscrits sur la liste spéciale référendaire sur 214 965 inscrits au total sur la liste générale (sur une population générale estimée en 2020 à 271 940 habitants, ce qui fait que ce sont plus des quatre cinquièmes des inscrits et deux habitants sur trois qui sont amenés à se prononcer.

Environ 5 000 électeurs des îles voteront dans les dix bureaux décentralisés à Rivière salée (au lieu de six en 2018). Les règles d’établissement procurations ont été simplifiées pour 2020. 5 300 avaient été établies pour le scrutin de 2018. Il semble qu’on puisse en attendre plus pour 2020, notamment en provenance des Kanak en France pour études ou formation au moment du scrutin (plus de 4 000 électeurs sont hors du pays). Dans les simplifications, on note que le mandataire doit être inscrit sur la liste référendaire, dans la même commune et plus forcément le même bureau) et qu’une simple copie du récépissé transmis par le mandant suffira si l’original n’est pas arrivé à temps dans la commune concernée.
Dans les nouveautés également est l’intégration du Parti travailliste dans les groupes autorisés à mener la campagne officielle, soit six au lieu de cinq : du côté anti-indépendantiste, deux groupements, les loyalistes 1 et 2, et Calédonie ensemble ; de l’autre, l’UNI, l’UC-FLNKS et nationalistes, plus le Parti travailliste.
L’Éveil océanien poursuit sa ligne ambiguë : ayant rejoint au congrès le groupe UC-FLNKS et nationaliste (totalisant ainsi 16 sièges), donnant ainsi la majorité absolue aux indépendantistes (28 élus sur 54), il ne donnerait pas de consignes de vote pour le référendum ! Donc deux pas en avant et un pas en arrière… Pourtant, la communauté wallisienne et futunienne qui représente en 2018 8,31 % des inscrits sur la LESC peut jouer un rôle important dans le résultat du référendum : choisir la voie océanienne et voter pour le oui ? L’avenir nous le dira…
Malgré le recours au conseil d’État par l’UNI, et contrairement aux règles habituellement en usage pour des élections nationales, les loyalistes ont le droit d’utiliser le « Bleu, Blanc, Rouge » dans leur propagande électorale, au prétexte que les indépendantistes utilisent aussi un drapeau (cf. Décret n° 2020-776 du 24 juin 2020 portant convocation des électeurs et organisation de la consultation sur l'accession à la pleine souveraineté de la Nouvelle-Calédonie). Mais il y a une différence de taille : l’un est celui de la république française, l’autre est l’emblème d’un groupe politique ! On peut interpréter cela comme une prise de position de l’État français pour les loyalistes et la volonté que la Nouvelle-Calédonie reste française. C’est ce qu’a dit Louis Mapou au congrès de Nouvelle-Calédonie le 20 mars dernier, lors d’un débat sur la modification des règles organisant le référendum :
« Nous considérons, en ce qui nous concerne, que l’État prend position en faveur du maintien au sein de la République. » (Louis Mapou, président du groupe UNI)
Dans le même sens est la déclaration faite dans le cadre des implications de la consultation du 4 octobre 2020 quant à la possible double nationalité en cas d’indépendance :
« Le nouvel État déterminera également les critères permettant d'avoir ou d'obtenir sa nationalité. La population qui aura la nationalité du nouvel État obtiendra alors un passeport délivré par les autorités du nouvel État et pourra demander la protection de son nouvel État à l'étranger. L'Assemblée nationale et le Sénat devront par ailleurs débattre et voter une loi pour déterminer les conditions dans lesquelles un maintien dans la nationalité française de certains ressortissants du nouvel État serait possible. »
Une autre façon de dissuader de voter oui pour les non-Kanak qui souhaiteraient bénéficier de la double nationalité ?
Et l’on parle du rôle de l’État impartial dans la consultation ?
Merci de nous avoir lu.
À suivre sous peu…