Cet article se base sur une infographie récente d'Euro-Med Human Rights Monitor, elle-même basée sur les chiffres partiels des vestiges du Ministère de la santé à Gaza, qui ne reflètent qu'une partie de la réalité.
Par Alain Marshal
Le 7 octobre 2023, à la suite d'une attaque militaire menée par des factions palestiniennes de Gaza contre Israël, l'armée d'occupation a lancé une campagne dévastatrice contre la population du camp de concentration de Gaza. Depuis lors, Israël a commis des centaines de violations qui constituent des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité, que la Cour internationale de justice a qualifiés de génocide.

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Un bilan humain insoutenable
En 700 jours de guerre, plus de 74 100 personnes ont été tuées, dont 66 930 civils, 20 920 enfants (dont 4 893 âgés de moins de 5 ans, plus de 1 000 nourrissons de moins d'un an et près de 400 nouveau-nés, soit un enfant tué toutes les 52 minutes) et 14 875 femmes. 12% de la population de Gaza est soit tuée, blessée, disparue ou détenue. Les blessés se comptent par dizaines de milliers : 165 000 personnes (dont plus de 40 000 enfants), des milliers d'amputés, plus de 10 000 enfants ayant perdu un membre. Gaza est la zone qui comporte le plus d'enfants mutilés au monde, tous théâtres de guerre (et de catastrophes naturelles) confondus.
La répression s’accompagne de 5 560 disparitions forcées ou détentions arbitraires. Le nombre d’orphelins atteint 45 000, tandis que 249 journalistes et 121 secouristes, cibles privilégiées de l'armée d'occupation, figurent parmi les tués. Le secteur médical est lui aussi décimé : 1 607 professionnels de santé tués, dont 164 médecins et 376 infirmières, et 2 195 blessés.
Une population civile visée
Les civils paient le prix fort : 9 victimes sur 10 ne participaient pas aux combats. 30 % des morts sont des enfants (l'équivalent d'une classe est assassiné chaque jour), 20 % des femmes. Une stratégie délibérée de terreur et de destruction, qui frappe délibérément les plus vulnérables.
Division de la bande de Gaza
Le 13 octobre 2023, l'armée israélienne a émis des ordres d'évacuation forcée à l'encontre des habitants du nord de Gaza, leur demandant de quitter leurs maisons et de se rendre dans le sud de la bande de Gaza dans les 24 heures, qualifiant l'ensemble de la zone de « zone de combat ».
Il s'agissait du premier d'une série d'ordres similaires émis par l'armée. Quelques mois plus tard, l'armée a également émis des ordres de déplacement forcé à l'encontre des habitants de Khan Younis, provoquant de nouvelles vagues de déplacements à travers la bande de Gaza. Cette situation a entraîné le déplacement forcé de centaines de milliers de personnes, qui se sont souvent retrouvées sans endroit où aller.
Déplacements massifs et conditions de survie
La quasi-totalité des habitants a été contrainte de fuir : 99 % de la population a été déplacée au moins une fois depuis octobre 2023, en raison d'ordres incessants et contradictoires de déplacement forcé, de bombardements de zones résidentielles ou de destruction d'habitations. Bon nombre des personnes déplacées vivent toujours dans des conditions extrêmement difficiles en raison des dégâts considérables causés, dans des camps ou des abris surpeuplés sans accès adéquat aux services ou à l'aide.
Les déplacements se font vers des zones déjà surpeuplées, souvent bombardées elles-mêmes. Le nord de la bande de Gaza a été complètement coupé du sud. Des dizaines de civils qui essayaient de retourner chez eux ont été exécutés. Sans oublier les attaques contre les civils réfugiés sous des tentes, impitoyablement bombardés à toute heure du jour et de la nuit, même dans les zones déclarées par Israël comme sûres. Il s'agit d'une politique délibérée visant à faire sombrer la population dans l'épuisement et le désespoir, afin de les contraindre à évacuer Gaza définitivement, dès qu'un territoire de déportation sera déterminé.
Les conditions de vie sont tout simplement apocalyptiques :
- 98 % de la part d'eau par habitant a diminué en raison de la destruction massive des infrastructures hydrauliques
- 100 % de la population souffre d’insécurité alimentaire aiguë, 3 500 Palestiniens âgés et 1 200 enfants ayant péri du fait de la malnutrition, et plus d'un millier ayant été assassiné dans des massacres périodiques en essayant d'obtenir de la nourriture distribuée sous la supervision d'Israël.
- 80 % des missions d''aide humanitaire vers le nord de Gaza ont été bloqués.
- 100% des hôpitaux ont été détruits ou endommagés.
- 80 % des édifices ont été détruits ou endommagés.
- 95 % des écoles sont endommagées ou rasées.
Crimes de guerre documentés
Les violations recensées vont bien au-delà des bombardements : des entretiens avec 100 détenus relâchés ont révélé et documenté plus de 42 formes de traitements inhumains et dégradants, notamment des viols, agressions sexuelles, électrocution, cracher et uriner sur les détenus, fouilles à nu et assassinats délibérés sous la torture.
Le mépris du droit international
En janvier 2024, la Cour internationale de Justice avait enjoint Israël de prendre des mesures pour prévenir le génocide. Plus d’un an et demi plus tard, le rapport constate qu’Israël a échoué sur toute la ligne, ne respectant aucune des injonctions de la CIJ, à savoir :
Empêcher les massacres.
Mettre fin aux destructions massives.
Garantir l’aide humanitaire.
Stopper l’incitation au génocide.
Lever le blocus sur la nourriture et les biens vitaux.
Protéger les civils.
Bien au contraire, les atrocités n'ont fait que s'intensifier.
Une tragédie sous les yeux du monde
Près de 2,2 millions de personnes, entassées dans 365 km² (Gaza était la zone la plus densément peuplée au monde avant même le génocide, qui l'a réduite à peau de chagrin), vivent désormais privées d’eau potable, affamées et bombardées quotidiennement. Gaza incarne aujourd’hui « l’exemple le plus criant d’un génocide en direct », un crime impuni dont les chiffres ne disent qu’une partie de l’horreur, et qui éclipse les pires dystopies.
Ce n'est pas seulement Israël qui est discrédité à jamais, prenant place dans le Panthéon morbide des nations les plus criminelles de l'histoire, mais tout l'Occident civilisé (dirigeants, hommes politiques, médias, associations, syndicats, intellectuels...), et toutes les institutions internationales, qui se sont révélées incapables de prendre la moindre mesure concrète pour empêcher Israël de perpétuer son génocide. Pire encore, malgré les aveux les plus explicites du gouvernement Netanyahou, qui a tombé le masque et renoncé à l'imposture de la solution à deux Etats, qui n'a jamais été qu'un prétexte à l'expansion indéfinie d'Israël, l'intelligentsia occidentale continue à jeter la pierre aux victimes palestiniennes, tel cet immonde article négationniste de Jean-Pierre Filiu paru dans Le Monde et intitulé L’écrasante responsabilité du Hamas dans la catastrophe palestinienne. Ce brulot semble tout droit sorti du cabinet de Netanyahou, et mérite une place de choix dans les annales de l'ignominie. Notons que ce libelle et son auteur ont été invoqués comme argument d'autorité par Edwy Plenel lui-même, ce qui a suscité un tollé légitime : est-ce en réaction à cette indignation que Mediapart a mis en avant l'excellente réponse de Muzna Shihabi à Jean-Pierre Filiu ?
« L’incroyable responsabilité de la résistance dans le massacre d’oradour sur glane », « l’incroyable responsabilité des juifs dans la Shoah », « la responsabilité des Tutsi dans le déclenchement des massacres », on peut continuer longtemps avec ces insinuations révisionnistes…
— Nono (@mcnorrr) September 1, 2025
Alors que la frénésie israélienne de sang et de destruction se poursuit chaque jour, non seulement à Gaza mais également en Cisjordanie, au Liban, en Syrie et au Yémen, il est difficile de ne pas rappeler les leçons de l’Histoire : tout régime fondé sur la barbarie et l'hubris est voué à une fin ignominieuse, et ses thuriféraires et apologistes à un sort tout aussi humiliant.
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