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Billet de blog 21 septembre 2025

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En Syrie, Israël étend son occupation et expulse des populations civiles (HRW)

Alors que nos élites politico-médiatiques feignaient de s’émouvoir du sort des Syriens sous Assad pour légitimer son renversement et briser l'Axe de la Résistance, elles sont totalement indifférentes aux atrocités perpétrées par les terroristes du régime d'Al-Qaïda et de l'armée d'occupation. Ce rapport de Human Rights Watch donne un aperçu des crimes de guerre sionistes en Syrie.

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Le déplacement forcé est un crime de guerre ; des maisons ont été rasées, et des Syriens ont été détenus et transférés illégalement vers Israël.

Rapport d'Human Rights Watch, 17 septembre 2025

Source : hrw.org

Traduction du premier tiers de l'article en français par HRW, complétée en intégralité par Alain Marshal (avec ajout de notes entre crochets). Précisons que ce qui est « révélé » dans cet article a été dénoncé depuis le mois de février par des sites indépendants comme Drop Site News.

Illustration 1

Des soldats israéliens patrouillaient dans une rue de Jubata al-Khashab, ville située dans le sud de la Syrie, le 20 décembre 2024. © 2024 Aris Messinis/AFP via Getty Images

  • Les forces israéliennes qui occupent certaines parties du sud de la Syrie depuis décembre 2024 ont commis divers abus à l’encontre des habitants, notamment des déplacements forcés, qui constituent un crime de guerre.
  • Parmi les autres abus figurent des saisies et démolitions de maisons, le refus d’accès aux moyens de subsistance et le transfert illégal de détenus syriens vers Israël.
  • Les autres gouvernements devraient suspendre toute forme de soutien militaire à Israël qui est susceptible de faciliter les atteintes aux droits humains et les violations du droit international dans le sud de la Syrie, et imposer des sanctions ciblées aux responsables de ces abus.

(Beyrouth) – Les forces israéliennes qui occupent certaines parties du sud de la Syrie depuis décembre 2024 ont commis divers abus contre les habitants, notamment des déplacements forcés, qui constituent un crime de guerre, a déclaré aujourd’hui Human Rights Watch. Les forces israéliennes ont saisi et démoli des maisons, empêché des habitants d’accéder à leurs biens et moyens de subsistance, et arrêté arbitrairement des habitants pour les transférer en Israël.

Depuis la chute de l’ancien gouvernement syrien en décembre 2024, Israël a pénétré en profondeur dans la zone démilitarisée surveillée par l’ONU qui sépare le plateau du Golan – un territoire syrien occupé par Israël depuis 1967 – de la partie du gouvernorat de Quneitra qui reste sous contrôle syrien, et a rapidement établi neuf postes militaires s’étendant du mont Hermon à la ville de Quneitra et à certaines parties de l’ouest de Deraa. Israël a également intensifié ses frappes aériennes contre des infrastructures militaires [Israël a également frappé des infrastructures civiles telles que des centres de recherche, assassiné des scientifiques, etc.]. Depuis février, des responsables ont déclaré à plusieurs reprises leur intention de « démilitariser complètement » le sud de la Syrie et ont affirmé à maintes reprises que les forces israéliennes resteraient indéfiniment sur le territoire nouvellement conquis [ainsi, le prétexte de la présence du Hezbollah ou de l'Iran, repris en chœur par nos médias pour justifier les agressions contre la Syrie du temps de Bachar al-Assad, apparaissent comme des mensonges grossiers, Israël n'ayant que d'insatiables appétits expansionnistes présentés par des journalistes complices comme des « préoccupations sécuritaires »].

Syrie : Roland Dumas lâche une bombe ! © Roy Vingt

Roland Dumas, ex-ministre des Affaires étrangères : l’invasion des rebelles en Syrie a été préparée en Angleterre pour destituer le régime syrien à cause de ses positions anti-israéliennes

De récentes informations parues dans les médias font état de nouvelles incursions terrestres israéliennes dans le village de Quneitra et d’une intensification des opérations aériennes au-dessus de Quneitra et de Deraa, qui confirment que les opérations se poursuivent dans le sud de la Syrie. Depuis 1967, Israël empêche des dizaines de milliers de Syriens déplacés de retourner dans le Golan.

« Les forces militaires israéliennes qui mènent des opérations en Syrie ne devraient pas avoir carte blanche pour saisir des maisons, les démolir et en expulser les familles », a déclaré Hiba Zayadin, chercheuse senior sur la Syrie à Human Rights Watch. « Les récentes interventions d’Israël dans le sud de la Syrie ne sont pas des actes légitimes dictés par la nécessité militaire, mais des exemples issus du manuel déjà utilisé dans les territoires palestiniens occupés et dans d’autres parties de la région visant à priver les habitants de leurs droits et libertés fondamentaux. »

Entre juin et septembre 2025, Human Rights Watch a mené des entretiens avec huit habitants de la région, dont cinq habitants du village d’Al-Hamidiya dont les maisons ont été démolies, un avocat qui est aussi activiste et qui a été brièvement détenu par les forces israéliennes, un leader communautaire et un habitant du village de Jubata al-Khashab, situé à huit kilomètres de là, où les forces israéliennes ont empêché les habitants d’accéder à leurs terres agricoles. Les chercheurs ont examiné des photographies et des vidéos envoyées par les personnes interrogées et ont analysé des images satellite afin de corroborer leurs témoignages, de déterminer quand et où des installations militaires avaient été construites et d’évaluer l’étendue des zones rasées ou démolies.

Human Rights Watch a également mené des entretiens avec des proches et des témoins de la détention de sept Syriens détenus depuis décembre 2024 et d’un enfant qui avait 17 ans au moment de sa détention en avril 2024. Les huit personnes ont été transférées en Israël, où, selon témoins et proches, elles sont toujours détenues au secret sans avoir été inculpées. Human Rights Watch a écrit aux Forces de défense israéliennes [quelle honte de désigner ainsi des forces d'occupation génocidaires qui mettent tout le Moyen-Orient à feu et à sang] le 3 septembre 2025 pour leur faire part de ses conclusions et leur demander des informations sur les détenus. Une réponse écrite a été reçue le 8 septembre, dans laquelle l’armée israélienne a déclaré qu’elle opérait dans le sud de la Syrie « pour protéger les citoyens de l’État d’Israël ». Les points clés de cette réponse sont repris dans le présent communiqué, le cas échéant.

Le 16 juin, à Al-Hamidiya, dans la zone démilitarisée surveillée par l’ONU le long de la « ligne de séparation » avec le plateau du Golan occupé par Israël, les forces israéliennes ont démoli au moins 12 bâtiments, obligeant huit familles à quitter leur domicile. Les soldats ont expulsé ces familles en décembre 2024, le jour où le gouvernement de Bachar al-Assad en Syrie est tombé, et leur ont ensuite expliqué que ces expulsions et démolitions étaient nécessaires en raison de la création récente d’une installation militaire à proximité.

« Notre maison était celle qui était la plus proche du poste militaire, elle a donc été la première à être démolie », a déclaré un habitant. « Le terrain qui l’entourait, que nous avions planté d’arbres, a été complètement rasé avec la maison. Il ne restait plus rien. Nous vivons dans des conditions extrêmement difficiles depuis que nous avons perdu notre maison et nos terres. »

À Jubata al-Khashab, les forces israéliennes ont construit une autre installation militaire et ont commencé à défricher de vastes étendues de terres, notamment une réserve forestière vieille de plus d’un siècle. Les habitants ont indiqué que les forces israéliennes leur avaient interdit l’accès aux terres agricoles et aux pâturages situés à proximité de l’installation.

Des images satellite analysées par Human Rights Watch ont confirmé que la construction des deux installations militaires avait commencé début janvier 2025, à moins d’un kilomètre au nord des limites des villages concernés.

Voir Reuters : en Syrie, le nouveau régime massacre impunément les minorités

Selon l’article 49 de la Quatrième Convention de Genève, le droit international humanitaire interdit le déplacement forcé de civils dans un territoire occupé, sauf en dernier recours et uniquement si des raisons militaires impératives l’exigent ou si cela est nécessaire pour la sécurité de la population civile elle-même. Pour être légale, une évacuation doit en outre respecter des garanties procédurales et humanitaires strictes : les civils doivent être déplacés dans des conditions humaines, vers des logements adéquats, et leur sécurité, leur bien-être et leur retour dès que les hostilités le permettent doivent être assurés. Le déplacement forcé injustifié en territoire occupé constitue un crime de guerre. Israël n’a pas non plus le droit de transférer des détenus hors du territoire occupé vers Israël, quelles que soient les circonstances. La destruction de biens civils est également interdite, sauf si elle est absolument nécessaire dans le cadre d’opérations militaires en cours, c’est-à-dire si elle est directement liée et strictement nécessaire dans le cadre de combats en cours, et non justifiée par des considérations stratégiques ou sécuritaires de long terme.

L’armée israélienne a affirmé que ses activités étaient « conformes au droit international », que les démolitions à Al-Hamidiya étaient des mesures « opérationnelles nécessaires », qu’« aucun civil [...] ne résidait dans les bâtiments » et que les arrestations et transferts vers Israël s’appuyaient sur des renseignements et étaient soumis à un contrôle judiciaire. Toutefois, les actions documentées d’Israël dans le sud de la Syrie ont violé les lois de la guerre.

À Al-Hamidiya, aucun plan d’évacuation n’avait été mis en place ; les soldats ont pris d’assaut la zone et expulsé physiquement les habitants sans prendre aucune disposition pour assurer leur sécurité, leur hébergement ou leur retour. Il n’y avait pas non plus d’hostilités en cours dans la zone pendant les expulsions, la construction d’installations militaires ou les démolitions de maisons, ni depuis.

Plutôt que de répondre à une menace immédiate, les forces israéliennes semblent avoir évacué et détruit des habitations dans le cadre d’une stratégie plus large visant à renforcer leur présence militaire. Même si les références des responsables du pays à une présence indéfinie ne prouvent pas à elles seules l’intention de déplacer définitivement les populations [HRW nous affirme donc que les affirmations israéliennes quant à leur volonté d'occuper de manière permanente le sud de la Syrie ne sont pas une preuve de leur volonté d'occuper le sud de la Syrie de manière permanente...], les démolitions, la construction d’infrastructures militaires fixes et les restrictions d’accès continues rendent tout retour à court terme pratiquement impossible et contredisent toute affirmation [purement imaginaire, donc : HRW se fait l'avocat d'Israël au-delà du réel] selon laquelle le déplacement serait strictement temporaire.

La lettre de l’armée israélienne ne mentionnait pas spécifiquement ses actions à Jubata al-Khashab ni la détention en avril 2024 d’un jeune de 17 ans originaire du village, et ne fournissait aucune information sur les lieux de détention ni sur l’accès à un avocat ou à leur famille pour les sept autres détenus dont Human Rights Watch a documenté les cas.

Les autres gouvernements devraient suspendre leur soutien militaire à Israël tant que ses forces continueront de commettre en toute impunité des violations graves et généralisées, notamment des crimes de guerre. Les gouvernements devraient également revoir et, le cas échéant, suspendre leur coopération bilatérale et interdire le commerce avec les colonies de peuplement israéliennes, notamment sur le plateau du Golan syrien occupé.

Les États-Unis, l’Union européenne, le Royaume-Uni et d’autres pays devraient faire pression pour que les responsables de ces actes rendent des comptes dans le cadre de procédures relevant de la compétence universelle, et soutenir les procédures de la Cour pénale internationale (CPI). Ils devraient également imposer des sanctions ciblées à l’encontre des responsables israéliens coupables de violations graves et persistantes du droit international humanitaire, notamment le blocage du retour des Syriens déplacés, et les maintenir jusqu’à ce que des mesures vérifiables permettent un retour sûr, volontaire et digne des personnes déplacées, a déclaré Human Rights Watch.

« L’inaction d’autres gouvernements face au comportement illégal d’Israël dans la région permet à ce pays d’appliquer ses tactiques répressives en toute impunité », a conclu Hiba Zayadin. « La communauté internationale devrait agir dès maintenant pour suspendre son soutien militaire, imposer des mesures ciblées et soutenir la mise en œuvre de l’obligation de rendre des comptes, notamment devant la CPI. »

Déplacements, démolitions de maisons à al-Hamidiya

Les forces israéliennes sont entrées dans le village d’al-Hamidiya le 8 décembre 2024, le jour où l’ancien président Bachar al-Assad a été renversé. « Ils sont entrés dans notre village à bord de deux [véhicules blindés], ils ont pointé leurs armes sur nous et ont crié en hébreu, une langue que nous ne comprenions pas », a raconté un habitant déplacé. « Pris de peur, j’ai fui la maison avec mes enfants, sans même emporter de vêtements. Nous avons tout laissé derrière nous. »

Une autre femme a déclaré que des soldats israéliens avaient fait une descente chez elle ce jour-là : « Ils sont arrivés en chars, lourdement armés, avec de grands sacs à dos, et ont fait irruption dans notre maison. Leur comportement montrait clairement qu’ils avaient l’intention de rester. » Les soldats ont braqué leurs armes sur elle et ses deux filles, tout en forçant son mari et son fils à entrer dans une autre pièce, sous la menace. « Mes filles et moi avons été retenues ainsi de 11 heures à 15 heures. Mon mari et mon fils n’ont été libérés qu’à 23 heures ce soir-là. Les soldats étaient assis dans notre salon, riant et parlant une langue que nous ne comprenions pas, comme si c’était chez eux. »

Voir Sous le nouveau régime syrien, l'esclavage sexuel des femmes alaouites

Finalement, la famille a reçu l’ordre de partir, sans pouvoir emporter aucune affaire. « Depuis, nous vivons dans une petite pièce de la maison de mes parents [à al-Hamidiya] », a-t-elle expliqué. La famille vit depuis lors dans ces conditions de surpeuplement. « Les forces israéliennes revenaient de temps en temps au village. Nous avons demandé à plusieurs reprises de rentrer chez nous ou au moins de récupérer nos affaires, mais elles ont toujours refusé pour des “raisons de sécurité”, ou répondu qu’elles “examineraient notre demande”. »

Un autre habitant a également raconté avoir été contraint de quitter sa maison sous la menace des armes ce jour-là. Sa famille n’a pas non plus été autorisée à prendre quoi que ce soit. « Juste les vêtements que nous portions », a-t-il dit. Il a trouvé refuge chez des proches dans un village voisin, tandis que d’autres membres de sa famille ont été hébergés par des familles ailleurs à al-Hamidiya.
« Pendant six mois, nous avons essayé de négocier avec les forces israéliennes pour retourner chez nous ou, au minimum, récupérer nos meubles. Leur réponse était toujours la même : “Nous étudions la question”, sans aucune suite concrète. »

Une femme a déclaré que sa famille faisait partie des rares autorisées à retourner brièvement chez elles, en février, pour récupérer ce qui restait. « Quand je suis arrivée, a-t-elle raconté, la maison était sens dessus dessous. De nombreux objets avaient été volés. Il ne restait plus que mon réfrigérateur et ma machine à laver. »

Des images satellites recueillies au-dessus d’al-Hamidiya confirment que la construction de l’installation militaire, située à moins de 500 mètres au nord-est du village, a commencé après le 1er janvier 2025.

Dans la nuit du 16 juin, des bulldozers israéliens sont entrés dans la partie nord d’al-Hamidiya. « De 21 h 30 à 5 h du matin, ils ont complètement rasé la zone », a déclaré un habitant. « Ils n’ont laissé aucune fondation, rien : tout a été aplati. Au matin, les gens n’ont rien retrouvé. »

Une femme et ses enfants, qui avaient d’abord trouvé refuge chez des proches avant de s’installer dans une maison vacante mise à disposition par une autre famille du village, ont décrit ce qu’ils ont ressenti en voyant leur maison détruite cette nuit-là : « J’avais encore l’espoir de pouvoir bientôt y retourner. Chaque jour, je regardais ma maison de loin et je pleurais, rêvant d’y revenir. Puis, une nuit, dans l’obscurité, j’ai vu et entendu les bulldozers détruire mon rêve. J’ai pleuré toute la nuit, impuissante, incapable de les arrêter ou de faire quoi que ce soit. »

Sa maison, qu’elle avait reconstruite avec sa famille en 2018 après avoir été bombardée et détruite pendant la guerre en Syrie, comptait quatre pièces et un grand jardin planté de vignes. L’armée israélienne a même déraciné les ceps, a-t-elle ajouté.

« Lorsque nous sommes revenus en 2018, j’ai dû la reconstruire bloc par bloc », a-t-elle expliqué. « Nous avons réduit toutes nos dépenses, même pour la nourriture, et avons dû emprunter de l’argent à des proches juste pour la rebâtir, car nous n’avions pas les moyens de louer. Nous avons dû tout racheter : la machine à laver, le réfrigérateur, la télévision, le canapé — repartir de zéro. Et maintenant, une fois encore, je dois tout recommencer. »

Les cinq familles interrogées vivent temporairement chez des proches, soit ailleurs à al-Hamidiya, soit dans des villages voisins.
« Je vis actuellement dans une seule pièce avec la famille de mes parents », a déclaré l’une des personnes interrogées. « Ma maison d’origine avait deux étages, et maintenant nous vivons dans une seule pièce. J’ai une épouse et trois enfants. »

Human Rights Watch, grâce à l’analyse d’images satellites, a confirmé la destruction d’au moins 12 bâtiments situés à moins de 250 mètres à l’ouest d’une installation militaire israélienne nouvellement construite.

Image satellite du 5 septembre 2025, montrant une douzaine de bâtiments détruits près d'Al-Hamidiya (sud de la Syrie), suite aux démolitions menées le 16 juin 2025 par l'armée israélienne, qui y a construit une nouvelle installation militaire. © 2025 Planet Labs PBC (image satellite) / Human Rights Watch (graphique/analyse).

Les images satellites en basse résolution prises le 16 juin à 11 h 46, heure locale, au-dessus d’al-Hamidiya ne montrent aucun signe de dégâts. Vingt-quatre heures plus tard, une image capturée le 17 juin à 11 h 38, heure locale, révèle un groupe de bâtiments détruits à la lisière nord du village.

Coupure des moyens de subsistance et destruction des arbres à Jubata al-Khashab

Les habitants déplacés de Jubata al-Khashab ont raconté avoir été privés d’accès aux terres agricoles et aux ressources naturelles qui faisaient vivre leurs familles et leurs communautés. Ils ont déclaré que les forces israéliennes avaient soit rasé, soit clôturé les champs cultivés, les pâturages et les vergers. « Les terres autour de [notre maison], que nous avions plantées d’arbres, ont été entièrement rasées en même temps que la maison », a témoigné une femme. « Il ne reste plus rien. »

Illustration 4

Carte du sud de la Syrie, montrant les sites d’installations militaires israéliennes établies depuis début janvier 2025. Ces installations ont entraîné la destruction de forêts près de Jubata al-Khashab, et la démolition de maisons à Al-Hamidiya. La zone grise (à gauche) correspond à la partie du plateau du Golan occupée par Israël. La zone à rayures rouges (à droite) correspond à la zone surveillée par la Force des Nations Unies chargée d'observer le désengagement (FNUOD, ou UNDOF en anglais). Graphique © 2025 Human Rights Watch

« Nous possédons 50 dunams [5 hectares] de terres agricoles », a déclaré une autre habitante. « Une partie était cultivée en blé ou en orge, l’autre servait de pâturage pour les moutons. » Elle a précisé que les forces israéliennes avaient édifié un haut talus de terre, coupant l’accès à l’ensemble du terrain et le plaçant sous contrôle militaire total.

Un autre résident a expliqué que sa famille avait été privée de terres qui représentaient la moitié de ses revenus annuels : « Parmi elles : une superficie d’environ 750 mètres carrés fait désormais partie de la nouvelle installation militaire implantée par l’ennemi israélien sur nos terres ; un dunam [1 000 m²] situé devant notre maison ; et le jardin de la maison, qui couvre également un dunam », a-t-il dit. Ces terrains étaient plantés d’oliviers, de cerisiers, ainsi que de blé et d’orge. « Ils constituaient une source de revenus essentielle pour nous et notre famille. »

Une autre personne a indiqué que les forces israéliennes interdisaient aux habitants de faire paître leurs troupeaux sur les terres agricoles et avaient saisi de vastes portions de ces terres. « De nombreux habitants ont dû vendre leurs moutons faute de pâturages », a-t-elle déclaré. « Quant à moi, mes arbres ont été déracinés et ma maison détruite. Je n’ai désormais plus aucun accès à ma propriété, qui s’étend sur environ un dunam. »

Les images satellites recueillies au-dessus de Jubata al-Khashab confirment que la construction de l’installation militaire, située à moins d’un kilomètre au nord-ouest du village, a débuté après le 1er janvier.

Depuis le lancement des travaux, cette installation attenante à la forêt a entraîné la destruction de dizaines, voire de centaines d’arbres. En juin, plus de 45 hectares, soit environ 25 % de la forêt de Jubata al-Khashab, au nord du village, avaient déjà été entièrement défrichés.

Comparaison de deux images satellite de Jubata al-Khasab (sud de la Syrie), montrant des terrains agricoles détruits et l’abattage croissant de la zone forestière près de la nouvelle installation militaire israélienne, entre le 6 mai (première photo) et le 6 septembre 2025 (seconde photo). Jubata al-Khashab’s forest May 6, 2025: Satellite imagery: May 6, 2025 © 2025 Planet Labs PBC. Analysis and Graphic © 2025 Human Rights Watch. Jubata al-Khashab’s forest September 6, 2025: Satellite imagery: September 6, 2025 © 2025 Planet Labs PBC. Analysis and Graphic © 2025 Human Rights Watch.

Un responsable communautaire a indiqué que les forces israéliennes étaient entrées à Jubata al-Khashab le 15 décembre, peu après leur incursion dans d’autres parties du gouvernorat de Quneitra : « Elles ont établi des unités militaires sur les terres de Jubata al-Khashab et ont commencé à abattre les arbres de la réserve forestière. » Il a ajouté que les forces israéliennes avaient rasé les arbres fruitiers plantés par la municipalité de Quneitra dans les années 1990, affirmant que ces arbres gênaient la visibilité militaire et représentaient un risque potentiel pour la sécurité.

Une autre zone boisée, à l’ouest de Jubata al-Khashab, montre elle aussi des signes manifestes de destruction depuis le début de la construction de l’installation militaire, l’ampleur de la déforestation s’étant nettement accrue depuis début juin.

Au moins un tiers de la forêt a été entièrement détruit. Les habitants n’ont découvert la carte des zones destinées à être défrichées qu’après que 10 dunams (1 hectare) d’arbres fruitiers avaient déjà été arrachés, a précisé le chef de la communauté.

Il a également déclaré que de nombreux habitants se sont vu interdire l’accès à leurs terres agricoles et à leurs pâturages. « Pour ma part, je possède environ 300 dunams [30 hectares] auxquels je n’ai plus accès », a-t-il dit, précisant qu’environ un tiers était cultivé en céréales et le reste utilisé pour le pâturage des moutons et des bovins. Il a ajouté que 7 000 dunams (700 hectares) supplémentaires de terres communautaires, plantées d’oliviers, de pommiers et de cerisiers, avaient également été clôturés de barbelés ou absorbés dans des zones militaires. L’impact économique a été sévère, a-t-il insisté : « Près de la moitié des revenus des agriculteurs ont été perdus lorsqu’ils ont été coupés de leurs terres », a-t-il déclaré. « Aucune de ces destructions n’a fait l’objet d’une indemnisation ni d’une réparation. »

Un autre habitant du village a déclaré : « Mon village, Jubata al-Khashab, et les zones voisines ont subi un vaste défrichage des terres agricoles [par les forces israéliennes], y compris des vergers remplis d’arbres fruitiers – pommiers, cerisiers, abricotiers et oliviers –, dont beaucoup avaient plus de trente ans. » En mai, les forces israéliennes ont rasé sa parcelle agricole, ainsi que des oliviers âgés de plus de vingt-cinq ans, et ont saisi un hectare de ses terres.

Lors de réunions avec des représentants de la communauté, le chef de la communauté a indiqué que des officiers israéliens avaient invoqué l’absence d’autorité de l’État syrien et les menaces d’infiltration pour justifier l’occupation de zones civiles et la fouille de maisons à la recherche d’armes dans les villages proches de la ligne de séparation. Selon eux, les responsables israéliens ont également invoqué les événements à Gaza pour justifier ces actions, alors même que Human Rights Watch a constaté que la conduite d’Israël dans cette zone constituait le crime contre l’humanité d’extermination ainsi que des actes de génocide.

Aucun des habitants interrogés n’a déclaré avoir reçu une quelconque indemnisation ou réparation, ni avoir été prévenu à l’avance, ni avoir bénéficié d’un hébergement sûr.

La destruction de maisons et de terres agricoles, ainsi que les restrictions d’accès à la terre et à l’eau, violent les droits des personnes protégées et peuvent constituer une punition collective illégale et un déni de moyens de subsistance, soulignant le manquement d’Israël à ses obligations envers la population civile placée sous occupation.

Détentions et transferts forcés vers Israël

Les forces israéliennes ont également arrêté arbitrairement plusieurs Syriens dans le sud de la Syrie, dont certains ont été transférés en Israël et y sont détenus sans inculpation, ont indiqué des témoins.

Le 12 juin, vers 2 h 30 du matin, les forces israéliennes ont mené un raid dans le village de Beit Jinn, dans la campagne de Damas, à trois kilomètres à l’ouest de la ligne de désengagement. Elles ont arrêté sept hommes et tué un homme atteint d’un handicap cognitif, ont déclaré deux habitants du village et des proches des détenus, qui ont fourni leurs noms et leurs âges.

Les sept détenus sont : Ahmad Hussein al-Safadi (né en 1991), Mohammad Hussein al-Safadi (né en 1986), Hossam Mohammad al-Safadi (né en 1994), Amer Mohammad al-Badawi (né en 1984), Mohammad Badi’ Hamadeh (né en 1992), Ali Qassem Hamadeh (né en 1982) et Ma’moun Mohammad al-Saadi (né en 1983).

Le frère de l’un des détenus a déclaré avoir reçu un appel téléphonique de l’épouse de son frère vers 2 h 45 du matin, lui annonçant que les forces israéliennes avaient fait irruption dans la maison et arrêté son mari, Amer al-Badawi, 41 ans, père de quatre enfants. Le proche a indiqué s’être immédiatement rendu en voiture au domicile voisin de son frère, mais que les forces israéliennes l’avaient bloqué, avaient pointé leurs armes sur lui, l’avaient forcé à se coucher au sol et avaient confisqué son téléphone. Lorsque son fils est arrivé peu après, les forces israéliennes l’ont traité de la même manière.

« Toute l’opération a été soudaine et terrifiante, en particulier pour les enfants et les femmes », a poursuivi le parent, ajoutant que les forces israéliennes avaient lâché des chiens policiers contre les femmes et utilisé des grenades assourdissantes ainsi que des balles réelles, provoquant une panique généralisée. Lorsque l’homme atteint d’un handicap cognitif « a vu les soldats, il a crié : “Allahu Akbar, les voleurs sont là !et ils lui ont immédiatement tiré six balles, le tuant sur place ».

Un deuxième habitant, parent de trois hommes arrêtés cette nuit-là, a confirmé ces événements. Il a déclaré que les forces israéliennes qui avaient pris d’assaut le village comptaient plus de 100 soldats, appuyés par des véhicules blindés, du matériel militaire et des chiens policiers, et que trois des hommes arrêtés étaient ses cousins.

L’armée israélienne a affirmé que les hommes arrêtés appartenaient au groupe armé palestinien Hamas et que son opération nocturne, « fondée sur des renseignements recueillis ces dernières semaines », avait conduit à l’arrestation de « plusieurs terroristes du Hamas » qui planifiaient « de multiples attaques terroristes » contre des civils et des troupes israéliennes en Syrie. Elle a déclaré avoir transféré les détenus en Israël pour les interroger plus avant. Interrogée sur l’existence éventuelle de victimes lors de son raid, l’armée israélienne a indiqué à Reuters que des coups de feu avaient été tirés et qu’« une cible avait été touchée » lorsqu’un des suspects avait tenté de fuir ; dans une lettre adressée par la suite à Human Rights Watch, elle a précisé que le suspect s’était approché des forces d’une manière jugée menaçante pour leur sécurité et qu’il avait été abattu.

S’exprimant auprès de Reuters, un porte-parole du ministère syrien de l’Intérieur a contredit l’affirmation selon laquelle les hommes arrêtés étaient membres du Hamas, affirmant qu’il s’agissait de civils de la région.

« Jusqu’à présent, nous ne savons pas où se trouve mon frère ni quelles accusations pèsent contre lui », a déclaré le frère de l’un des hommes, insistant sur le fait que ceux-ci n’avaient aucun lien politique. « Personne ne sait où ils sont détenus, et il n’existe toujours aucun moyen de les contacter depuis le territoire israélien », a-t-il ajouté, précisant qu’il s’agissait « d’agriculteurs et de bergers, dont la plupart étaient analphabètes ».

Mohammad Fayyad, militant et avocat syrien originaire de Quneitra, a déclaré que les forces israéliennes avaient arrêté plus de 20 personnes depuis décembre. La plupart ont depuis été relâchées. Il a indiqué avoir lui-même été brièvement détenu le 7 janvier dans le village d’al-Hamidiya alors qu’il couvrait, aux côtés du journaliste français Sylvain Mercadier, l’incursion israélienne, tous deux portant des gilets de presse.

« Nous avons été emmenés au bâtiment du gouvernorat à Quneitra », a-t-il déclaré, où les forces israéliennes avaient établi leur présence. « On m’a bandé les yeux et nos appareils ont été fouillés puis détruits. » Il a ajouté qu’ils avaient été faussement accusés d’avoir des liens avec le Hezbollah. Après 14 heures, les deux hommes ont été libérés sans inculpation.

Un habitant de Jubata al-Khashab a rapporté que les forces israéliennes avaient arrêté son fils de 17 ans le 25 avril 2024, alors qu’il travaillait dans les terres agricoles de la famille, situées dans la zone tampon placée sous surveillance de l’ONU. Le garçon portait une carte de permis délivrée par l’ONU, autorisant les agriculteurs et bergers à accéder aux terres proches de la ligne de démarcation. Les forces israéliennes l’ont transféré à la section pour mineurs de la prison d’Ofer, en Cisjordanie occupée, où il est détenu en détention administrative, sans inculpation et au secret.

Depuis son arrestation, sa famille n’a eu aucun contact direct avec lui, a précisé son père. Il a ajouté que le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) était la seule organisation à lui avoir rendu visite, confirmant son lieu de détention et son état de santé stable.

En vertu de la Convention relative aux droits de l’enfant, la détention d’un mineur doit constituer une mesure de dernier recours, être aussi brève que possible, et tout enfant détenu doit avoir rapidement accès à une assistance juridique et pouvoir communiquer régulièrement avec sa famille, sauf circonstances exceptionnelles.

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