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Billet de blog 5 octobre 2025

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LE SÉLECTIF RÔLE REPRODUCTEUR DES OVULES

Il est scientifiquement établi que, depuis la nuit des temps, la fécondation résulte d’une « rencontre » entre l’ovule et le spermatozoïde. Cette logique biologique apparaît unanime pour la reproduction sexuée d'organismes comme les êtres humains, la grande majorité des animaux et la plupart des végétaux, mais elle recèle également des contrastes et des arcanes lors du processus syngamique.

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Pour ce qui est de la procréation humaine naturelle, l’ovule libéré par l’un des ovaires migre aléatoirement dans l’un des deux tubes utérins pour rejoindre l’utérus de la femme. L'ovule est censé alors orienter vers lui les gamètes mâles par moult signaux biochimiques. L’ovocyte mature est ensuite pénétré par le spermatozoïde le mieux encouragé par les molécules chimiotactiques distillés. Dès lors, « le sperme de l'homme préféré par l'ovule n'appartient pas forcément à son compagnon amoureux » (1). Autrement dit, dans ce phénomène complexe, l'affinité biologique des cellules reproductrices est une évolution purement chimique et mécanique, dépourvue d'émotion ou de conscience, qui n'implique aucune harmonie de sentiments.

Compatibilité génétique

À défaut d'un choix affectif quelconque, l'acte de la fécondation est impitoyablement réglé par la capacité ou l'incapacité effectives des spermatozoïdes à nager et à franchir les membranes de l'ovule. Les inaptes périssent dans cette épreuve en milieu semi-visqueux, et sont évacués avec les habituels flux menstruels et pertes vaginales. Ainsi, en remontant vers les salpinx positionnés de part et d'autre de l’utérus, les spermatozoïdes réagissent différemment à chaque lot de liquide folliculaire ovarien. Et parmi les centaines de millions de concurrents précipités par l'émission spermatique, l'heureux qui se distingue par une forte intrépidité et une meilleure compatibilité génétique, est sélectionné pour la fusion des noyaux haploïdes et la création du zygote, concrétisant en somme l'amorce de la grossesse.

Les monozygotes se constituent dès qu’un seul ovule, fécondé par un unique spermatozoïde victorieux, se divise en deux embryons disjoints qui partagent, au départ, une information génétique quasi identique. En ce qui concerne les dizygotes, deux ovules distincts pénétrés par deux robustes spermatozoïdes, grâce à la libération des enzymes de l’acrosome, induisent deux embryons ayant chacun son propre patrimoine génétique. S'agissant des triplés, soit trois ovules sont fécondés par les trois spermatozoïdes méritants sur le podium, soit un ovule spécifique est pénétré et se divise en trois embryons, soit enfin deux ovules sont fécondés par deux gagnants gamètes mâles et l'un de ces embryons est segmenté en deux parties (3).

Forme de sélection sexuelle

Prenons l’exemple très rare de la reproduction de nonuplés. Neuf ovules sont fécondés séparément par neuf spermatozoïdes hardis, respectivement réceptifs aux substances chimioattractives émises par les gamètes femelles, occasionnant ainsi la formation de neuf embryons distincts. Une telle hyperovulation, sans insémination artificielle, est exceptionnelle, à l’instar des nonuplés maliens (4), qui ont fêté leur quatrième anniversaire en mai 2025, enchantés de détenir le record planétaire du plus grand nombre d'enfants vivants, cinq filles et quatre garçons, issus d’un même accouchement risqué.

Dans ce cas extraordinaire comme dans les fécondations courantes, les gamètes femelles, exclusivement porteurs du chromosome X, ne peuvent choisir le sexe des gamètes mâles, pourvus du chromosome X ou Y. Par le hasard génétique, seule la fusion du spermatozoïde X avec l'ovule X donne une fille (XX), tandis que la fusion du gamète Y avec l'ovule X procure un garçon (XY). Les ovules n'influencent donc pas le sexe des futurs mioches, dans leur sélectif rôle reproducteur incarné par l'attrait naturel des spermatozoïdes super-performants. Aussi assistons-nous, sans aucune manipulation génétique, à une forme de sélection sexuelle, marquée par une compétition effrénée conférant l'atout décisif aux gamètes mâles plus aptes à féconder.

Alain Boutat
Épidémiologiste,
Économiste et Politiste 
Lausanne

(1) Kern J. « Les ovules choisissent les spermatozoïdes qui les féconderont », FUTURA, 27/06/2020.
(2) Fitzpatrick JL et ali. « Chemical signals from eggs facilitate cryptic female choice in humans », Proceedings of the Royal Society B, 10/06/2020.
(3) Dürig-Jaquier M. Au cœur de la gémellité incarnée, Éditions Slatkine, 2024.
(4) Konaté DM. « Les nonuplés maliens nés au Maroc célèbrent leur quatrième anniversaire », Le 360 Afrique, 05/05/2025.

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