L'épicentre du séisme se situe à la frontière des plaques tectoniques eurasienne et indo-australienne. Aux premières lueurs du jour, la secousse délivre à fond « une énergie équivalente à 23’000 bombes atomiques d’Hiroshima » (1). Et d’immenses vagues déferlent sur l’ensemble du littoral du golfe du Bengale, atteignant parfois une hauteur de 35 mètres et dévastant sauvagement l’essentiel sur leur passage, dans une rude succession de flux et de reflux marins.
Bilan effroyable
En un temps bref, une quinzaine de pays sont nûment touchés par les flots destructeurs venus du vieil « océan Oriental », en pleine saison touristique habituelle, semant une terrible désolation dans les zones lourdement sinistrées : Indonésie, Sri Lanka, Thaïlande, Inde, Birmanie, Maldives, Malaisie, Bangladesh… jusqu’aux côtes lointaines de l’Est africain et du Nord-Ouest australien (2).
Le bilan exhaustif est effroyable : les victimes piégées sont estimées globalement à environ 330 milliers de morts et de disparus, 125’000 blessés et 1,7 million de personnes déplacées. Des corps sans vie échoués sur les rivages désolés, des habitations éventrées, des infrastructures ensevelies sous la boue et des plages jonchées d’innombrables décombres, témoignent de l’ampleur considérable de la catastrophe naturelle, humaine et économique en présence (3).
L’un des plus meurtriers tsunamis de l’histoire
En effet, alors en période festive de fin d’année 2004, les pays en bordure de l’océan Indien et ceux d’autres régions affectées du globe, totalisant une soixantaine de nationalités différentes sur les lieux de l’horrible tragédie, doivent, hélas, se résigner aux malheurs cruels qui frappent leurs ressortissants dans divers sites ravagés par l’un des plus meurtriers tsunamis de l’histoire (4).
Le cataclysme va inciter bon nombre de nations à la coopération, en vue de généraliser des détecteurs d’ondes causées par les séismes sous-marins et les éruptions volcaniques ; ceux-ci étant susceptibles d’entraîner d’énormes raz-de-marée sur les côtes. Le dispositif de détection repose sur un appareillage technique de sismomètres et de marégraphes, implanté au fond de l’océan et destiné à mesurer les variations de pression induites par des phénomènes géologiques.
Systèmes de prévention
L’appareillage fournit un signal à une bouée en surface, qui est censée relayer l'information cruciale vers un satellite chargé d’alerter en temps réel les centres d'urgence et de protection civile. En 2004, six de ces dispositifs de détection et d’alerte avaient été déployés dans le Pacifique, confronté à 80 % des risques majeurs de vagues géantes et déferlantes, mais aucun d’eux ne fut placé dans l'océan Indien durement affecté par le mémorable désastre (5).
Il est désormais connu mouches en lait que de précieuses vies humaines auraient pu être sauvées, si des systèmes de prévention avaient dûment été installés. Sur la cinquantaine de détecteurs d’ondes que comptent aujourd’hui les étendues d’eau bordées par les continents de la planète bleue, six sont opérationnels dans l'océan Indien (6). Aussi y a-t-il lieu de rendre hommage aux infortunées victimes de la « tsunamétrie » défaillante il y a 20 ans.
Alain Boutat
Épidémiologiste,
Économiste et Politiste
Lausanne
(1) Lay et al. « The Great Sumatra-Andaman earthquake of 26 December 2004 », Science, Vol. 308, May 2005, p. 1127-1133.
(2) Chanson H. « Le Tsunami du 26 Décembre 2004 : un Phénomène Hydraulique d'Ampleur Internationale. Premiers Constats », La Houille Blanche, 2005, p. 25-320.
(3) Simon T. « Il y a vingt ans, un tsunami XXL dévastait l’Asie », Tribune de Genève, 21/12/2024.
(4) Le Monde avec AFP. « Le tsunami de 2004 : un des pires cataclysmes des temps modernes », 26/12/2014.
(5) Bardon A. « Dix ans après le tsunami de 2004, l’océan Indien mieux armé pour faire face à une catastrophe », Service de presse de l’UNESCO, 22/12/2014.
(6) Folger T. « The Calm Before the Wave: where and when will the next tsunami hit? », National Geographic, Vol. 221, February 2012, p. 54-77.