Je vous avais parlé l'année dernière de contaminations dans un restaurant pour illustrer le problème des restaurants/cafés mais surtout des lieux clos et de l'air conditionné/ventilé. Dans ce billet, je présente un article traitant de plusieurs contaminations lors d'une quarantaine en septembre 2020 parut dans Emerging Infectious Diseases. Magnifiques cas de transmissions en lieux clos et surtout d'efficacité de traçage.
La Nouvelle-Zélande applique une stratégie Zero Covid. Il y a très peu de cas et la quasi-totalité sont des cas importés. C'est pourquoi il y a une quarantaine très stricte de 14 jours dans des hôtels dédiés à l'arrivée dans ce pays.
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Une personne (patient G) rentre d'un voyage en Inde le 27 août et effectue sa quarantaine obligatoire. Elle présente des résultats négatifs aux tests PCR effectués à J3 et J12 de la quarantaine et est donc normalement "libérée". Bizarrement à J19, elle présente des symptômes. Test PCR positif, G est déclarée infecté et le traçage débute le 18 septembre 2020. Ainsi toutes les personnes ayant été en contact avec elle sont tracées et contrôlées. G est arrivé à Christchurch le 27 août 2020 (J1) avec 145 autres passagers. Parmi les 145, 8 sont testés positifs lors de la quarantaine. Pour 3 d'entre eux (patients A, B, C), le virus qu'ils portent est génomiquement lié à G (transmission entre eux). A, B et C étaient assis lors du vol depuis l'Inde à deux rangées les uns des autres (taux d'occupation seulement 35%, masque obligatoire). Ils ne se connaissent pas et ne se sont pas parlés pendant le vol.
A et B ont été testés positifs à J3, le 30 août. Ils ont donc été contaminés avant le vol d'une source commune par une même personne (à l'aéroport de départ en Inde ?).
C a montré des symptômes le 6 septembre (J10) et a été testé négatif à J3 et positif à J12 (8 septembre 2020). Il a donc été contaminé par A ou B durant le vol.
A l'arrivée, on fournit des masques chirurgicaux neufs à tous et sont transportés aux hôtels de quarantaine dans des cars par groupe de 10 pour le maintien de la distanciation. Le lieu de la quarantaine est un hôtel commercial dédié à la quarantaine, pas de balcon, salle de bain et toilettes privées (pas de contamination en fumant sur le balcon ni en partageant des lieux communs).
Une fois testé positif à J12, C est transféré dans la partie isolement de l'hôtel. Avant ce transfert, dans la chambre voisine se trouvaient un adulte et un enfant, testés négatifs à J3 et J12 (patients D et E). Ayant été testés négatifs à chaque fois, le lieu supposé de la contamination est l'hôtel lors de la quarantaine. En fait, le prélèvement pour les tests PCR avaient lieu sur le pas de la porte des chambres. Sur les caméras de surveillance, il a été déterminé que les portes de deux chambres étaient ouvertes en même temps durant 50 secondes. Une analyse de la ventilation a montré que la pression aspirait l'air du couloir vers les chambres et donc les particules virales en suspension.
A la fin de la quarantaine, A (guéri), D et E (testés négatif et sans symptômes) et la personne G prennent un même vol de Christchurch vers Auckland (85 min de vol, masques obligatoires, 50%) d'occupation. G est assis devant D/E. A est loin. G retrouve les personnes H et I chez lui. D et E retrouvent F chez eux.
G testé positif à J21 suite à des symptômes depuis J19. H et I sont testés positifs à J21.
D, E et F sont tous les 3 testés positifs le 21 septembre (J25) suite au traçage pour comprendre la contamination de G.
Conclusion :
- Un traçage sérieux est efficace pour remonter une chaîne mais cela n'est pas possible lorsqu'il y a 25000 nouveaux cas/jour ou alors il faut des moyens humains, matériels et donc financier quoi qu'il en coûte. L'importance du séquençage dans ce processus.
- L'importance du moment du test PCR. Il faut un certain temps après la contamination pour que la charge virale soit suffisante pour ne pas obtenir un faux négatif.
- La nullité des tests de moins de 72 heures. Entre le test et le vol, il peut s'en passer des choses.
- L'importance de la quarantaine (on parle de 14 jours dans des lieux dédiés, pas sur la base de la parole donnée et non contrôlé) pour éviter une propagation forte.
- L'importance de l'aération/ventilation et le problème des lieux clos (circulation d'air).
- Un faible taux d'occupation du vol (ici, 35%) ne sert à rien à partir du moment où on partage le même air dans un endroit fermé (pensez aux salles de restaurants/sport).
- Le port du masque (chirurgical) ne procure pas du 100% de protection.
Avec tout cela en tête, ayez une pensée pour ceux qui sont partis en avion/train passer les fêtes de Noël/nouvel an en famille/amis (en Outre-Mer, Dubaï...) et qui s'étonnent d'être tombés malades.