L'ÉCOLE FACE Á LA VIOLENCE DES ENFANTS ET DES JEUNES
Alejandro Teitelbaum
Le niveau élevé de violence chez les enfants et les jeunes est dû à diverses causes. D'une manière générale, on peut parler d'un climat exacerbé de violence sociale, en particulier celle pratiquée par l'État dans les domaines de l'économie, du travail, de la politique et de la culture. Celle-ci est diffusée par les monopoles médiatiques, justifiant les politiques de l'État, donnant une large place à l'extrême droite, aux discours racistes et à ceux qui prônent la préparation à la guerre. La politique gouvernementale face aux énormes problèmes de l'éducation révèle le rôle subalterne joué par la pédagogie, l'approfondissement de l'idéologie élitiste et discriminatoire, la prédominance de la réponse répressive et policière et la soumission des écoles publiques à l'ajustement budgétaire.
L'éducation en France a connu des hauts et des bas prononcés de 1789 à nos jours, en relation avec les structures économiques et les forces politiques et idéologiques dominantes de chaque époque.
On parle tout le temps de "l'école de la République". On peut se demander si elle existe vraiment. Parce qu'une école de la République doit disposer d'enseignants bien rémunérés, motivés, ayant une bonne formation pédagogique et de solides connaissances dans leurs matières respectives, capables d'intéresser les élèves à l'apprentissage de l'histoire, de la logique, des mathématiques, des sciences sociales et naturelles. Afin qu'ils acquièrent savoirs et un esprit critique, notamment face aux croyances et fanatismes raciaux et religieux, et qu'ils apprennent, entre autres, que tous les êtres humains sont égaux, sans distinction de sexe, de couleur, de race ou de religion.
Le démantèlement de l'enseignement, délibérément programmé par les classes dominantes et leurs valets politiques, compromet profondément l'éducation des jeunes générations. Les jeunes doivent se former avant tout comme êtres humains, avertis, avec de l‘esprit critique et pas discriminés comme main d’œuvre qualifié et non qualifié.
Le bilan actuel est globalement négatif comme résultat d'un processus qui a commencé à s'accélérer il y a près d'un demi-siècle avec l'occupation progressive de l'espace idéologique culturel par des courants qui ont adulteré l'histoire et enterré la pensée logique, rationnelle, humaniste et révolutionnaire.
La formation pédagogique est minimale ou considérée comme superflue. Plusieurs nouveaux enseignants contractuels se retrouvent en poste, en charge d’une classe, devant des élèves, sans avoir été formés au métier d’enseignant. Ce système est appelé « job dating». En anglais, bien sûr.
« Nous sommes passés des instituteurs formés dans les écoles normales au début du 19ème siècle aux "job dating" contemporains ».
Pour soustraire l'école à l'hégémonie des croyances, l'idée de l'école laïque, c'est-à-dire la séparation de l'Église et de l'État, a été lancée dès 1789 et définitivement consacrée par la loi du 9 décembre 1905 et inscrite dans le préambule et l'article 1er de la Constitution de 1946, puis confirmée par la Constitution de 1958. Afin de permettre à l'école de remplir ses fonctions essentielles qui consistent, entre autres, en transmettre des connaissances scientifiques, combattre l’irrationalisme et stimuler la réflexion et l'esprit critique. L'école est devenu laïque, autrement dit non confessionnelle. Pas les élèves, qui doivent conserver leur liberté de conscience et d'expression, en un climat de tolérance y respect.
Mais l'État, qui a gravement endommagé le rôle de l'éducation, a remplacé le contenu réel de "l'école laïque" par la répression implacable des élèves portant des "signes ostentatoires" d'une religion.
Il existe des pistes proposées par d'éminents pédagogues, totalement ignorées par les bureaucrates de l'État, pour pallier cet état de fait.
Il y a l'approche de l'éducation à l'environnement (educación ambiental), qui fait l'objet de nombreuses études et réunions internationales depuis plus d'un demi-siècle.
Lors de l'atelier sous-régional sur l'éducation à l'environnement pour l'enseignement secondaire, qui s'est tenu à Chosica, au Pérou, en mars 1976, il a été dit : « Ainsi, a apparu la nécessité d'une éducation environnementale à caractère intégral qui favorise la connaissance des problèmes de l'environnement naturel et social dans son ensemble, et les relie solidement avec leurs causes ». Dans le document Estrategias para la aplicación de un proyecto de educación ambiental para educación secundaria (Stratégies pour l'application d'un projet d'éducation à l'environnement pour l'enseignement secondaire), du même Atelier, il est précisé : "Cela implique que l'éducation doit partir de la réalité concrète et quotidienne, s'adresser à celle-ci, et viser à la comprendre d'une manière scientifique et objective, ce qui comprend également les facteurs affectifs qui lient la personne éduquée à cette réalité. Il est donc nécessaire de sortir l'école de son isolement et de faciliter, par tous les moyens, son lien avec cette réalité dont elle fait aussi partie[1]. L'école doit aborder les problèmes de la vie quotidienne de la communauté et et l'impliquer dans la résolution de ces problèmes. Cela nécessite une interaction permanente entre la théorie et la pratique, combinant la distance nécessaire à la critique et la participation active à la vie de la communauté ».
BIBLIOGRAFIA
-Araceli de Tezanos, Didactique-pédagogie-sciences de l’éducation : la relation qui confirme « l’exception » française. https://revistas.udea.edu.co/index.php/revistaeyp/article/view/6884
-Alicia Sianes-Bautista, Développement de la pédagogie en tant que discipline et son impact sur l'enseignement supérieur en France. Desarrollo%20de%20la%20Pedagogía%20como%20disciplina%20y%20su%20impacto%20en%20la%20Educación%20Superior%20en%20Francia.html
-Mirta Teitelbaum et Johannes Goudswaard, Les lieux d’étude pour l’éducation à l’environnement, in Sélection d’écrits sociopolítiques et littéraires. Edit. CETIM, 2022. p.83 et ss. Edit Kindle, Amazon. Ámbitos de estudio para la educación ambiental, Johannes Goudswaard, Mirta de Teitelbaum.Tendencias de la educación ambiental, 1979, ISBN 92-3-341401-9, págs. 55-70. Español: Editorial Dunken 2021.
-Mirta Teitelbaum, Éducation et environnement en Amérique Latine. Aperçu des tendances et de activités actuelles. in Sélection d’écrits sociopolítiques et littéraires. Edit. CETIM,2022, p.119 et ss. Edit Kindle, Amazon.Español: Editorial Dunken 2021.
-Christian Baudelot , Roger Establet, L'école primaire divise. Edit. Maspero 1975
-Alejandro Teitelbaum, El papel de la educación ambiental en América Latina. UNESCO. 1978.
- Alejandro Teitelbaum, Les rôles des institutions de l'Etat et de la société face à la délinquance juvénile
https://blogs.mediapart.fr/aleteitelbaum/blog/281123/les-roles-des-institutions-de-letat-et-de-la-societe-face-la-delinquance-juvenile
[1] Il ne s'agit pas de préparer les programmes scolaires dans les bureaux des fonctionnaires. Ils doivent émerger de l'expérience vivante des communautés locales, qui intègre ses problèmes et adopte des attitudes constructives pour les résoudre. Le programme d'études doit être adapté aux conditions locales où il sera appliqué. La réalité à laquelle l'école doit s'intégrer comprend les familles des élèves de toutes les classes sociales, de toutes les cultures et croyances, avec lesquelles il doit y avoir un échange permanent, enrichissant de l'action éducative.