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Billet de blog 9 août 2024

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BILAN IDEOLÓGIQUE ET CULTUREL-SECONDE PARTIE

L'ÉDUCATION EN FRANCE A CONNU DES HAUTS ET DES BAS PRONONCÉS DE 1789 À NOS JOURS, EN RELATION AVEC LES STRUCTURES ÉCONOMIQUES ET LES FORCES POLITIQUES ET IDÉOLOGIQUES DOMINANTES DE  CHAQUE ÉPOQUE.

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15. BILAN IDEOLÓGIQUE ET CULTUREL

(Chapitre d'un livre à paraître: Maison Terre, état de lieux)

 Alejandro Teitelbaum

 SECONDE PARTIE

 L'ÉDUCATION EN FRANCE A CONNU DES HAUTS ET DES BAS PRONONCÉS DE 1789 À NOS JOURS, EN RELATION AVEC LES STRUCTURES ÉCONOMIQUES ET LES FORCES POLITIQUES ET IDÉOLOGIQUES DOMINANTES DE  CHAQUE ÉPOQUE.

On pourrait la résumer comme un processus marqué par l'antagonisme entre les croyances et les savoirs.

Pour soustraire l'école à l'hégémonie des croyances, l'idée de l'école laïque, c'est-à-dire la séparation de l'Église et de l'État, a été lancée dès 1789, afin de permettre à l'école de remplir ses fonctions essentielles qui consistent en transmettre des connaissances et stimuler la réflexion et l'esprit critique.

 Celle-ci a été définitivement consacrée par la loi du 9 décembre 1905 et inscrite dans le préambule et l'article 1er de la Constitution de 1946, puis confirmée par la Constitution de 1958, actuellement en vigueur.

L'école devient laïque, autrement dit non confessionnelle. Pas les élèves, qui conservent leur liberté de conscience et d'expression.

On parle tout le temps de "l'école de la République". On peut se demander si elle existe vraiment. Parce qu'une école de la République doit disposer d'enseignants bien rémunérés, motivés, ayant une bonne formation pédagogique et de solides connaissances dans leurs matières respectives, capables d'intéresser les élèves à l'apprentissage de l'histoire, de la logique, des mathématiques, des sciences sociales et naturelles. Afin qu'ils acquièrent savoirs et un esprit critique, notamment face aux croyances et fanatismes raciaux et religieux, et qu'ils apprennent, entre autres, que tous les êtres humains sont égaux, sans distinction de sexe, de couleur, de race ou de religion. Rien de mieux pour l'éducation des enfants et des jeunes que d'apprendre la convivialité avec leurs camarades, quelle que soit leur religion ou leur apparence. Et puissent contribuer à renverser le déclin de la Nation.

Et qu'ils apprennent à  répondre aux dogmes religieux comme Laplace a répondu à Napoléon quand celui-ci lui demanda pourquoi son traité de cosmologie ne mentionnait pas Dieu :  « Sire, je n'ai pas eu besoin de cette hypothèse ». Il expliqua plus tard que Dieu étant une hypothèse qui explique tout mais ne prédit rien, il n'est pas utilisable dans le cadre de la science.

Le démantèlement de l'enseignement, délibérément programmé par les classes dominantes et leurs valets politiques,[1] compromet profondément l'éducation des jeunes générations  et en fait des instruments soumis et malléables de la dictature du grand capital. Les jeunes doivent se former avant tout comme êtres humains, avertis, avec de l‘esprit critique et pas seulement comme main d’oeuvre qualifié ou non qualifié [2].

Le bilan actuel   est globalement négatif [3]comme  résultat d'un processus qui a commencé à s'accélérer il y a près d'un demi-siècle avec la désintégration de la gauche et l'occupation progressive de l'espace idéologique culturel par des courants qui ont adulteré  l'histoire et enterré la pensée logique, rationnelle, humaniste et révolutionnaire.

LA FORMATION PÉDAGOGIQUE EST MINIMALE OU CONSIDÉRÉE COMME SUPERFLUE.

 Plusieurs  nouveaux enseignants contractuels se retrouvent  en poste, en charge d’une classe, devant des élèves, sans avoir été formés au métier d’enseignant. Ce système est appelé « job dating». En anglais, bien sûr[4].

 Nous sommes passés des instituteurs formés dans les écoles normales au début du 19ème siècle aux "job dating" contemporains.

D'une France qui tentait de construire son propre destin économique, social et culturel à une sorte de no man's land où les prévisions formulées en 1983 par un groupe d'économistes français se réalisent:

: "L'aboutissement de la réglementation des monopoles privés à l'échelle mondiale conduira à une restructuration drastique et sans doute irréversible des États-nations. Ils deviendront des territoires amorphes dont les fonctions économiques seront déterminées de l'extérieur par des oligopoles internationaux. Ces territoires seront à la fois de grands espaces ouverts et des espaces fragmentés. Une structure dualiste sera imposée, composée d'un secteur "moderne" et d'un secteur "traditionnel". Dans la première, qui sera largement internationalisée, seront concentrés les sièges des grands groupes, les industries de haute technologie, les grandes institutions d'enseignement, les cadres et ingénieurs les mieux formés, eux-mêmes très mobiles et parlant la même langue, les laboratoires et tout le complexe des médias internationaux. Le secteur "traditionnel" rassemblera la masse de la population, faiblement rémunérée et peu qualifiée, engagée dans les tâches sous-traitées par le secteur moderne dans lequel, peut-être, un temps de travail plus court sera compensé par la réduction de la couverture des besoins sociaux, ce qui sera préféré au chômage dont le taux sera élevé" [5].

 Le démantèlement de l'enseignement, délibérément programmé par les classes dominantes et leurs valets politiques, compromet profondément l'éducation des jeunes générations et en fait des instruments soumis et malléables de la dictature du grand capital.

 Comme le souligne Alain Accardo (Notre servitude involontaire, Edit. Agone, France, 2001, pag. 50 y ss.) l’hégémonie idéologique-culturelle des classes dominantes est également maintenue et consolidée de manière plus subtile et moins visible à travers toutes les activités humaines, sociales, culturelles, idéologiques et même scientifiques, en formatant la conscience de la grande majorité des gens. 

 Une contribution non négligeable à cet état  de choses est celle des  néo-marxismes, post-marxismes, etc., qui formulent des théories et proposent des interprétations purement spéculatives, indémontrables et invérifiables des faits, diluent la réalité de l'antagonisme de classes dans une notion nébuleuse de peuple en prétendant avoir dépassé la méthodologie matérialiste, historique et dialectique formulée par Marx pour l'étude de l'être humain, de la société et de sa interrelation avec la nature. Parmi d’autres :  Holloway ( Changing the world without taking power); les « populistes de gauche » Chantal Mouffe, Ernesto Laclau et  Nicos Poulantzas. Ce dernier voit l'état capitaliste comme un "rapport social", non pas comme l'appareil de domination du grand capital exercé aux niveaux économique, politique, social, juridique, culturel, idéologique et répressif, comme il l'est dans la réalité[6].

Tout cela a contribué à faire perdre du terrain à la pensée logique et rationnelle. La conséquence a été la progression de l'irrationalisme, l'abandon de la réflexion et la perte de l'esprit critique.

Ce climat idéologique et culturel délétère a créé les conditions d'une détérioration politique d'une énorme ampleur dans laquelle plus d'un tiers des citoyens préfèrent s'abstenir dans les élections et sur les presque deux tiers restants, une majorité semble être pour le maintien du système dominant de plus en plus antisocial, postulé par  l'ensemble des partis de droite et d’extrême droite.

 A quoi contribuent efficacement la surconsommation de téléphones portables et autres appareils électroniques et la twitterisation du langage.

Le neurologue Michel Desmurget fournit des statistiques sur les effets extrêmement néfastes de la télévision, de  la surconsommation et l'usage du langage twitter sur les enfants et adolescents français[7]. Le temps d'écran récréatif retarde la maturation anatomique et fonctionnelle du cerveau. Plusieurs études ont montré que lorsque l'utilisation de la télévision ou des jeux vidéo augmente, le QI et le développement cognitif diminuent. Les principaux fondements de notre intelligence sont affectés : le langage, la concentration, la mémoire, la capacité pour comprendre un texte écrit, la culture (définie comme un ensemble de connaissances qui nous aident à organiser et à comprendre le monde).

 Ainsi la boucle est bouclée, et tout ce qui appauvrit les majorités, matériellement, spirituellement, moralement, enrichit matériellement de façon exponentielle une infime minorité. Qu'il s'agisse de l'exploitation du travail humain, de la spéculation financière, du trafic d'armes, d'êtres humains et de drogues, du désastre environnemental, des medias monopolisés par des milliardaires, etc., tous ont un socle commun qui en profite: le grand capital[8].

Cela est ainsi parce qu'à chaque époque les idées dominantes sont les idées des classes dominantes, qui ont à leur disposition les mécanismes appropriés pour le faire.

 En effet, dans les médias culturels, idéologiques, politiques, scientifiques et «communicationnels», il y a une sorte de sélection ou de hiérarchisation - entre spontanée et provoquée - du prestige ou de la renommée de certaines personnes, où elles occupent presque toujours les premières positions - et bénéficient  d’une «discrimination positive» en termes de couverture médiatique, d’emplois, de subventions et de récompenses – ceux  qui ont en commun de ne pas remettre en cause le système capitaliste actuel et de le considérer comme immuable et inhérent à la société humaine: il n'y a pas d'alternative  (le thatchérien TINA). Et d'évaluer comme le meilleur le système politique élitiste faussement appelé «démocratie » qui est maintenant dans un état de décomposition avancée[9]. En France, les porteurs de ces idées ont profité de leur position dominante pour écarter du milieu dans lequel ils agissent (universitaires et autres) la méthode d'investigation des phénomènes sociaux, qui consiste en l'étude sans préjugés des  structures socio-économiques, génératrices de classes antagonistes d'exploiteurs et exploités et d'imposer le quasi monopole de leurs idéologies irrationnelles et conservatrices. 

Il y a donc une interaction entre les relations de production existant à une époque donnée et les cultures et idéologies dominantes. C'est ainsi que l'introduction de nouvelles technologies à demandé   une autre forme de participation des travailleurs à la production, qui ne pouvait plus être réduite à celle de simples automates.

Le système d'exploitation a dû être modifié et affiné, car les nouvelles techniques, y compris l'informatique, la robotique, etc. nécessitaient différents niveaux de formation et de connaissances, ce qui a entraîné un effacement des frontières entre le travail manuel et intellectuel[10].

C'est ainsi qu'est né le "management" dans ses différentes variantes, qui visent toutes essentiellement à faire sentir aux salariés qu'ils participent - avec leurs employeurs - à un effort commun pour le bien-être de tous. Cela n'implique pas la disparition du fordisme, qui reste en vigueur pour les tâches non qualifiées et subsiste essentiellement dans la nouvelle conception de l'entreprise: le contrôle du personnel - une des pierres angulaires de l'exploitation capitaliste - qui a lieu physiquement dans la chaîne de production fordiste, se poursuit - accentué - dans l'ère post-fordiste par d'autres moyens.

“Grâce à l'informatique -écrit Lars Svendsen- "la direction peut contrôler ce que font ses employés au cours de la journée et leurs performances. Le nouveau "management" vise la psychologie du personnel. Les responsables du personnel (ou les directeurs des ressources humaines) parlent de "créativité" et d'"esprit d'équipe", d'"épanouissement personnel par le travail", que le travail peut - et doit - être amusant, ("work is fun") etc. et des manuels sont publiés sur les mêmes sujets. Des "funsultants" ou des "funcilitators" sont même engagés pour introduire dans l'esprit des travailleurs l'idée que le travail est amusant, qu'il ressemble à un jeu ("gamification" du travail). Si vous demandez aux employés s'ils sont satisfaits de leur travail, beaucoup vous répondront que oui, que s'ils ne travaillaient pas, leur vie n'aurait aucun sens. Et cela est vrai même pour ceux qui effectuent les tâches les plus simples. Dans la chaîne fordiste, l'entreprise s'empare du corps du travailleur, avec la nouvelle gestion, elle s'empare de l'esprit du travailleur. Svendsen écrit : "Les motivations et les objectifs de l'employé et de l'organisation sont supposés être en parfaite harmonie : le nouveau management pénètre l'âme de chaque employé. Au lieu d'imposer une discipline de l'extérieur, elle motive de l'intérieur"[11].

Hans Magnus Enzensberger, poète et essayiste allemand, écrivait dans les années 1960 : "L'exploitation matérielle doit se cacher derrière l'exploitation non matérielle et obtenir le consensus des individus par de nouveaux moyens. L'accumulation de pouvoir politique sert de paravent à l'accumulation de richesse. Elle s'empare non seulement de la capacité à travailler, mais aussi de la capacité à juger et à s'exprimer. Ce n'est pas l'exploitation qui est abolie, mais la prise de conscience de celle-ci"[12].

Mais les êtres humains sont aliénés non seulement comme producteurs mais aussi comme consommateurs (incitation au consumérisme par la "technologie persuasive" et le neuromarketing) et sont également aliénés par les idéologies dominantes, qui les conduisent à accepter l'ordre capitaliste existant comme un fait naturel et immuable[13].

 Il est indispensable l’analyse rigoureuse des faits qui consiste à étudier soigneusement la structure économique et les conditions politiques, sociales et culturelles d'une société donnée, ainsi que sa dynamique et ses tendances, y compris le rapport de forces des classes sociales présentes.

C'est la méthode préconisée par Marx au point 3 (La méthode de l'économie politique) de son Introduction à la critique de l'économie politique :

« Quand nous considérons un pays donné au point de vue de l'économie politique, nous commençons par étudier sa population, la division de celle-ci en classes, sa répartition dans les villes, à la campagne, au bord de la mer, les différentes branches de production, l'exportation et l'importation, la production et la consommation annuelles, les prix des marchandises, etc.

Il semble que ce soit la bonne méthode de commencer par le réel et le concret, qui constituent la condition préalable effective, donc en économie politique, par exemple, la population qui est la base et le sujet de l'acte social de production tout entier. Cependant, à y regarder de plus près, on s'aperçoit que c'est là une erreur. La population est une abstraction si l'on néglige par exemple les classes dont elle se compose. Ces classes sont à leur tour un mot creux si l'on ignore les éléments sur lesquels elles reposent, par exemple le travail salarié, le capital etc. Ceux-ci supposent l'échange, la division du travail, les prix, etc. Le capital, par exemple, n'est rien sans le travail salarié, sans la valeur, l'argent, le prix, etc. Si donc on commençait ainsi par la population, on aurait une représentation chaotique du tout et, par une détermination plus précise, par l'analyse, on aboutirait à des concepts de plus en plus simples; du concret figuré ou passerait à des abstractions de plus en plus minces, jusqu'à ce que l'on soit arrivé aux déterminations les plus simples. Partant de là, il faudrait refaire le chemin à rebours jusqu'à ce qu'enfin on arrive de nouveau à la population, mais celle-ci ne serait pas, cette fois, la représentation chaotique d'un tout, mais une riche totalité de déterminations et de rapports nombreux. La première voie est celle qu'a prise très historiquement l'économie politique à sa naissance. Les économistes du XVII° siècle, par exemple, commencent toujours par une totalité vivante : population, nation, État, plusieurs États; mais ils finissent toujours par dégager par l'analyse quelques rapports généraux abstraits déterminants tels que la division du travail, l'argent, la valeur, etc. Dès que ces facteurs isolés ont été plus ou moins fixés et abstraits, les systèmes économiques ont commencé, qui partent des notions simples telles que travail, division du travail, besoin, valeur d'échange, pour s'élever jusqu'à l'État, les échanges entre nations et le marché mondial. Cette dernière méthode est manifestement la méthode scientifique correcte”.

Marx, à la première page du Préface  (ajouté par Marx lui-même en 1859 à l'Introduction générale de la critique de l'économie politique de 1857) écrit :

« Le résultat général auquel j'arrivai et qui, une fois acquis, servit de fil conducteur à mes études, peut brièvement se formuler ainsi: dans la production sociale de leur existence, les hommes entrent en des rapports déterminés, nécessaires, indépendants de leur volonté, rapports de production qui correspondent à un degré de développement déterminé de leurs forces productives matérielles. L'ensemble de ces rapports de production constitue la structure économique de la société, la base concrète sur laquelle s'élève une superstructure juridique et politique et à laquelle correspondent des formes de conscience sociales déterminées. Le mode de production de la vie matérielle conditionne le processus de vie social, politique et intellectuel en général. Ce n'est pas la conscience des hommes qui détermine leur être ; c'est inversement leur être social qui détermine leur conscience »…(https://www.marxists.org/francais/marx/works/1859/01/critique.pdf- page 14).

 Cette explication ne peut être interprétée dans le sens étroit selon lequel la conscience d'un individu reflète automatiquement son statut d'ouvrier ou de bourgeois. Car l'"être social" auquel Marx fait référence comprend, entre autres, le rôle joué par l'idéologie et la culture du système capitaliste dans la conscience des êtres humains, dans leur conception du monde et de la société. Les faits ne sont pas perçus avec un esprit vierge, sans idées préconçues. La perception de la réalité est conditionnée chez tous les êtres humains par des concepts antérieurs, par des catégories inscrites dans l'esprit par l'éducation reçue, par l'environnement idéologique et socioculturel dominant dans lequel on vit, etc. Un travailleur manuel ou intellectuel, juste parce qu'il est un travailleur, n'est pas toujours conscient qu'il est exploité et que son engagement devrait être de lutter collectivement pour abolir l'exploitation. Et inversement, cet automatisme ne fonctionne pas non plus lorsqu'un individu ou un groupe, quelle que soit sa classe sociale, parvient à dépasser la conscience spontanée qui lui est imposée par l'idéologie et la culture capitaliste hégémonique et prend conscience des contradictions inhérentes au système capitaliste et à son essence d'exploitation, non seulement des êtres humains mais aussi de leur habitat naturel. Et dans tous les domaines de l'activité humaine (travail, culture, éducation, philosophie, politique, science, etc.), cette perception de la réalité est médiatisée par l'idéologie et la culture hégémoniques inhérentes au système capitaliste : la conscience spontanée de la grande majorité des gens - leur vision du monde - est façonnée par l'idéologie et la culture dominantes.

 Le biologiste français Henri Laborit écrit qu'il trouve indispensable de prendre conscience du déterminisme biologique, car les choses sont : elles ne sont ni vraies ni fausses, ni justes ni injustes... au-delà du conditionnement du système nerveux humain qui leur attribue ces qualités. Laborit poursuit en disant que selon l'expérience que nous avons, qui varie en fonction de notre classe sociale, de notre patrimoine génétique, de notre mémoire sémantique et personnelle, nous les hiérarchisons sur une échelle de valeurs qui est l'expression de nos innombrables déterminismes. "Nos déterminismes sociaux sont dominants, car les sociétés, comme toute structure vivante, ont tendance à maintenir l'état dans lequel elles se trouvent pour préserver leur existence, soumettant l'individu à leurs préjugés, leurs préceptes, leurs  valeurs ". Un tel sujet est - dit-on - en équilibre avec son environnement, un état idéal car il ne sera à l'origine d'aucune révolte. Il n'aura même pas besoin de penser..."[14].

Laborit soutient qu'un tel comportement, qui évite de recourir aux constructions imaginatives de notre cerveau structurant, a été très utile à certaines étapes de l'humanité, lorsque les êtres humains devaient se défendre rapidement et efficacement contre les agressions de l'environnement extérieur. Mais, aujourd'hui, alors que l'homme peut dominer l'environnement, ce comportement a perdu son objectif initial. Cependant - pour résumer l'exposé de Laborit - la maîtrise de l'environnement a entrainé l'apparition de l'accumulation et du capital, et "il est difficile d'imaginer un capital qui ne soit pas constitué pour augmenter". Le résultat est la persistance d'un comportement (chez la grande majorité des êtres humains, ajoutons-nous) déterminé par le système dominant et le blocage de l'émergence de "l'homme imaginatif", capable de penser une société différente. En ce sens, on peut lire dans le livre de Laborit, La nouvelle grille, cette excellente synthèse de la question : "En bref, où situer la classe des "travailleurs" et ses intérêts de classe ? Il est probable qu'un cadre supérieur ou un ouvrier spécialisé ait ou non conscience d'appartenir au prolétariat, à la classe des "travailleurs", en fonction des satisfactions - ou insatisfactions - de la domination hiérarchique qu'il ressent. Dans la classe ouvrière, il y a de parfaits bourgeois et heureux de l'être, même s'ils sont exploités et privés de leur plus-value, de même qu'il y a dans la bourgeoisie de véritables prolétaires et fiers de l'être, même si par ailleurs ils profitent pleinement de leur pouvoir économique et politique qu'ils considèrent comme équitable parce qu'ils ne contestent pas l'existence d'un pouvoir hiérarchique, mais son mode de répartition"[15].

 Marx a écrit dans l'Idéologie allemande: Les idées de la classe dominante sont les idées dominantes à chaque époque ; ou, en d'autres termes, la classe qui exerce le pouvoir matériel dominant dans la société est en même temps son pouvoir spirituel dominant. La classe qui dispose des moyens de production matérielle dispose en même temps des moyens de production spirituelle, ce qui signifie que les idées de ceux qui n'ont pas les moyens de production spirituelle sont en même temps, en moyenne, soumises à cette classe. Les idées dominantes ne sont rien d'autre que l'expression idéale des rapports matériels dominants, ces mêmes rapports matériels dominants conçus comme des idées ; d'où les rapports qui font d'une classe donnée la classe dominante, c'est-à-dire les idées de sa domination. Les individus qui forment la classe dominante sont aussi, entre autres, conscients de cela et pensent en conséquence ; par conséquent, dans la mesure où ils dominent en tant que classe, et dans la mesure où ils déterminent toute la sphère d'une époque historique, il est compréhensible qu'ils le fassent dans sa totalité, et donc, entre autres, aussi en tant que penseurs, en tant que producteurs d'idées, qui règlent la production et la distribution des idées de leur temps ; et que leurs idées soient, par conséquent, les idées dominantes de l'époque. Par exemple,à une époque et dans un pays où le pouvoir est disputé entre la couronne, l'aristocratie et la bourgeoisie, et où la domination est ainsi divisée, la doctrine de la division des pouvoirs, aujourd'hui proclamée "loi éternelle", s'impose comme l'idée dominante[16]. L'idéologie et la culture dominantes forgent une nouvelle idéologie et une nouvelle culture.

L'idéologie et la culture dominantes forgent et maintiennent leur hégémonie à travers ce que Gramsci, à la suite de Hegel [17] et de Marx, appelle la "société civile" : le grand capital, les médias qu'il contrôle, l'intelligentsia et les diverses organisations sociales au service du système, fonctionnant aux côtés de l'État mais en dehors de lui comme des appareils de domination économique, d'hégémonie idéologique et de contrôle social.

Les techniques de maintien de l'hégémonie de l'idéologie capitaliste ont acquis une hiérarchie scientifique. Les mécanismes de manipulation mentale font l'objet de travaux académiques et de séminaires internationaux (i.e. le Stanford University Persuasive Technology Laboratory), que nous avons déjà mentionnés au point 1 du chapitre sur Habermas. Nous avons également cité Alain Accardo (Notre servitude involontaire, Agone, France, 2001), Lars Svendsen (Lars Svendsen, Le travail. Gagner sa vie, à quel prix ? Editions Autrement, Paris, septembre 2013), Armand Mattelart (Histoire des théories de la communication", "L'invention de la communication et "Communication et lutte des classes : pour une analyse de classe de la communication. Introduction à Communication et lutte des classes, vol. 1 (Cooperativa Gráfica El Río Suena, Buenos Aires 2010), Enrique Pichon-Rivière et Ana Pampliega de Quiroga (Psychologie de la vie quotidienne) et Hans Magnus Enzensberger (Culture ou mise en condition ? Collection 10/18, Paris 1973).

UN MOYEN TRÈS IMPORTANT DE DOMINATION IDÉOLOGIQUE ET CULTURELLE EST LE LANGAGE.

Il a toujours existé une série d'expressions au contenu idéologique précis qui confortent l'ordre établi. Les hommes politiques, les économistes, les journalistes, etc. créent et popularisent d'autres expressions ou changent le sens habituel de certaines d'entre elles en fonction de la nécessité du système dominant de masquer la réalité et de préserver le consensus des majorités.

Victor Klemperer, écrivain et philologue allemand persécuté par le nazisme en raison de ses origines juives, a écrit un livre dans lequel il montre, à travers des anecdotes, des passages et des lectures, les mots les plus fréquemment mentionnés par les autorités du Troisième Reich (et par les personnes qui, sans réfléchir, les répètent) tels que "héroïsme", "fanatisme", "éternité", parmi tant d'autres, ainsi que diverses idées qui ont ensuite façonné la théorie (et la pratique) du nazisme.

Selon Klemperer, "le nazisme a été introduit dans la chair et le sang des masses par des mots isolés, des expressions, des formes syntaxiques qu'il a imposées en les répétant des millions de fois et qui ont été adoptées mécaniquement et inconsciemment"[18][3].

Eric Hazan, dans son livre LQR, (Lingua Quintae Repúblicae) La propagande au quotidien, Editions Raisons d'Agir, Paris, 2006, s'appuie sur les travaux de Klemperer pour analyser la "novlangue" actuelle en France. On a dit à juste titre que chaque langue ou groupe de langues contient sa propre structure de pensée. Il ne fait aucun doute que l'anglais est aujourd'hui la langue véhiculaire du monde, propulsée ces dernières décennies par les communications et les jeux électroniques, et utilisée de manière prépondérante dans tous les médias : artistiques, politiques, culturels, scientifiques, etc. Cette situation a un double effet : d'une part, le contenu idéologique de nombreuses expressions couramment utilisées en anglais et les structures mentales propres à cette langue sont imposés, et d'autre part, la diversité idéologique et structurelle des autres langues est perdue en raison de leur non-utilisation. En outre, compte tenu de l'interrelation dialectique entre la langue et la pensée, la prédominance de l'anglais en tant que "lingua franca" conduit à une sorte de pensée unique mondiale, comme l'affirme le linguiste français Claude Hagège[19].

Il faut ajouter que la "twitterisation" de la langue, c'est-à-dire son appauvrissement extrême, conduit inévitablement à l'appauvrissement de la pensée[20]. Les réseaux de communication électronique tels que Facebook ont souvent des conséquences négatives sur l'exercice de la conscience réflexive ou de l'introspection [21], l'un des éléments fondamentaux (l'autre étant la communication externe) du développement de la conscience et de la formation de la personnalité. En effet, le moment indispensable de l'introspection (qui suis-je ? que fais-je ? que vais-je faire ?) est supplanté par la communication irréfléchie à des tiers (parfois à un nombre indéterminé d'inconnus) de ces questions existentielles.

"Un demi-siècle après la parution du livre 1984 de George Orwell, nombre de ses visions d'une société future pourraient être prises en compte dans la réalisation du fonctionnement du monde. Notre objectif n'est pas de nous concentrer sur l'aspect politique de cette œuvre de science-fiction mais sur le néo-langage, puisque, dans ce livre, Orwell offre une explication profonde de l'utilisation d'une nouvelle langue.

En effet, dans ce livre, Orwell explique en profondeur l'utilisation d'un nouveau langage pour contrôler la pensée humaine et montre à quel point les médias sont rentables dans la diffusion du néo-langage et, par conséquent, de la doctrine de Big Brother. Finalement, ce qui n'est au départ qu'une partie de l'imagination d'Orwell finit par être l'exemple parfait du fonctionnement des médias, car, qu'on le veuille ou non, les nouvelles sont écrites en néo-langage. Orwell découvre ainsi qu'à travers le langage se développent des concepts idéologiques qui sont nécessairement liés à une charge subjective et qui sont parfois radicalement opposés au sens originel du mot ou de la phrase en question". (Toledano Buendía, S. La neolengua de Orwell en la prensa actual. La littérature prophétise la manipulation médiatique du langage. Revista Latina de Comunicación Social. Janvier 2006).

C'est ainsi qu'on appelle :

Communauté internationale, une poignée de grandes puissances qui prennent des décisions et mènent des actions qui affectent l'ensemble de l'humanité et qui, en même temps, s'affrontent entr’elles.

Les dommages collatéraux sont des attaques contre des populations civiles en temps de guerre, résultant d'un manquement à l'obligation de distinguer les combattants des non-combattants et/ou dans le but délibéré de répandre la terreur.

Économie de marché, au capitalisme.

Mondialisation, à l'impérialisme.

Flexibilisation laboral, au droit illimité des employeurs de licencier des travailleurs.

Abandon scolaire, la descolarisation des enfants pauvres.

Les sans domicile fixe, les gens qui vivent dans la rue

La démocratie désigne un système de gouvernement qui pratique différents niveaux d'autoritarisme.

Le développement durable est une manière de justifier la réalisation de l'impératif du système capitaliste de produire des biens superflus, et/ou de dépasser les besoins réels en biens nécessaires, afin de continuer à accumuler du capital et à faire des profits, quels que soient les coûts écologiques et sociaux.

Maria Candea y Laèlia Veron [22] écrivent: La langue fait partie des éléments qui contribuent à maintenir un système social ou à le changer. Il n’est donc pas surprenant que se soit un domaine traversé par des clivages politiques. (p.11).

Ainsi, la grammaire, l'orthographe et les règles dictées par l'Académie sont traversées par ces clivages.

Plus loin,(p.49) les autrices citent Balzac dans la Comédie Humaine-Splendeurs et misères des courtisans : “Le grand monde a son argot, mais cet argot s’appelle le style”.

Et dans la page 83,  Candea et Veron parlent de la violence symbolique , exercé par les dominants sur les dominés à l'aide du langage, qui engendre chez ces derniers la « timidité sociale » (Monique et Michel Pinçon), et qui les empêche d'explorer et de remettre en question le monde social.

Evgueni Morozov[23],  a réagi à un article publié dans El Pais Semanal (Espagne) le 21/12/2015(http://elpais.com/elpais/2015/12/17/eps/1450358550_362012.html ).

L’article  commence comme suit : "C'était au milieu des années 2000, à l'époque où Morozov voyait les blogs et les textos stimuler la "révolution orange" en Ukraine et le crowdfunding alimenter la campagne du candidat démocrate américain Howard Dean. Il ne lui a pas fallu longtemps pour réaliser que les nouveaux outils technologiques pouvaient également être utilisés par les gouvernements pour surveiller, générer de la propagande et manipuler la conversation en ligne. Le résultat de ces réflexions est El desengaño de Internet (Editorial Destino, 2012), un livre dans lequel il se montre sceptique quant à la capacité des réseaux à être un instrument de changement politique. Un scepticisme qu'il développe dans son livre, Pour tout résoudre cliquez ici: L'aberration du solutionnisme technologique. 2015.

Voici quelques-uns des commentaires de Morozov dans le rapport susmentionné :

"La Silicon Valley a conclu une sorte d'alliance dans les années 1970 avec les intellectuels. Il y auratoujours des gens, que j'appellerai des idiots utiles, qui essaieront de capter l'air du temps . Il y aura des livres, des conférences et des exposés pour que ces intellectuels puissent se faire les porte-parole de la cause. La Silicon Valley promeut des mini-récits. Elle nous parle du web 2.0 et, quand il s'épuise, elle parle de l'internet des objets, de l'économie collaborative... Ils identifient de petits fragments, occupent le débat pendant deux ans et ressortent ensuite avec une nouvelle histoire. Il n'y a pas beaucoup de contenu dans ces récits. J'ai travaillé suffisamment longtemps sur ce sujet pour dire que c'est absurde. Après l'économie collaborative viendra l'économie du partage, l'économie des soins. Ce que ces entreprises nous disent est faux. Quand je dis que pour comprendre la Silicon Valley, il faut s'intéresser à Wall Street, au Pentagone, à la finance, à la géopolitique ou à l'impérialisme, ils sont mal à l'aise pour m'écouter parce qu'ils préfèrent parler de fonds de capital-risque, d'entrepreneurs, du garage de Steve Jobs, de LSD....

"Ces soi-disant appareils intelligents que nous utilisons peuvent-ils nous rendre plus stupides ? Il faut remettre en question le mot "intelligent". J'aime appliquer une perspective historique. De nombreux appareils intelligents qui nous entourent reflètent les intérêts et les engagements des personnes qui les fabriquent ou les configurent. Si les gens continuent à consulter Facebook ou Twitter sur leur téléphone, c'est parce que les systèmes sont conçus pour créer ces dépendances. Le modèle économique de ce type de services est le suivant. Plus j'obtiens de clics, plus j'ai de valeur ; c'est presque comme le conditionnement de Pavlov. Plus ils obtiennent de clics de ma part, plus ils gagnent de l'argent, et ils conçoivent donc les services de manière à maximiser ces clics. J'ai un point de vue cynique, banal et rationnel sur le fait que l'argent gouverne le monde. Ce système nous distrait et nous empêche de nous concentrer, bien sûr. Est-ce un problème lié aux appareils intelligents ? Non. C'est un problème de modèle économique. Je refuse de croire qu'il n'y a pas d'autre moyen de générer de la communication entre les gens sans générer de distraction. Ce serait la défaite finale de l'imagination.

Jacques Rancière, philosophe français bien connu et professeur émérite à l'université de Paris VIII, théorise l'exploitation capitaliste en affirmant qu'il n'est pas nécessaire d'expliquer aux travailleurs ce que sont la plus-value et l'exploitation, il suffit qu'ils pensent eux-mêmes qu'ils sont capables de vivre dans un monde sans exploitation :

"...Depuis que j'ai commencé à travailler sur l'histoire de la pensée ouvrière, il m'est apparu évident qu'il n'a jamais été nécessaire d'expliquer à un ouvrier ce qu'est la plus-value ou l'exploitation. Le problème pour lui n'est pas de "prendre conscience" de l'exploitation, mais au contraire de pouvoir l'"ignorer", c'est-à-dire de pouvoir se débarrasser de l'identité que cette situation lui confère et de se penser comme capable de vivre dans un monde sans exploitation. C'est ce que signifie le mot émancipation".

(Entretien avec J. Rancière : http://www.philomag.com/article.entretien.jacques-ranciere-il-n-y-a-jamais-eu-besoin-d-expliquer-aun-travailleur-ce-qu-est-l-exploitation.375.php ).

En d'autres termes : face à l'exploitation capitaliste, la solution pour les travailleurs est de l'ignorer et de "se penser comme capables de vivre dans un monde sans exploitation" et d'attendre des temps meilleurs. Rancière, qui est un autre "maître à penser" de pas mal de gens qui se pensent de gauche, fait de l'idée d'exploitation et non de l'exploitation elle-même le sujet du problème. Il suffit donc d'ignorer l'exploitation pour résoudre le problème.

Dans la Critique de la philosophie de l'Etat de Hegel (1843), Marx s'employait déjà à démolir cette vision idéaliste (au sens de non matérialiste) des faits, telle que la propose Rancière. Marx écrit : "L'important est que Hegel fait constamment de l'Idée le sujet et du sujet réel et authentique - par exemple la conviction politique - le prédicat, alors qu'en réalité le développement correspond toujours au prédicat". Et plus loin : "L'intérêt de Hegel se limite à reconnaître dans chaque élément "l'Idée" en tant que telle, "l'Idée logique", qu'il s'agisse de l'Etat ou de la nature. Les sujets réels - comme ici la "Constitution" - deviennent de simples noms de l'Idée et la connaissance réelle est remplacée par leur simple apparence, au lieu d'être compris dans leur être spécifique, comme les réalités concrètes qu'ils sont, ils restent impénétrables"[24].

Ces courants considèrent que la notion de "loi" propre aux sciences naturelles est inapplicable aux sciences humaines dont l'objet est l'être humain. Ils soutiennent que les méthodes scientifiques dans l'étude des sciences humaines dénaturent les sciences humaines car elles impliquent d'ignorer le fait que leur protagoniste, l'être humain, est doté de conscience, de volonté et de libre arbitre, et n'est donc pas soumis à des lois objectives.

Le libre arbitre est généralement défini comme la capacité, propre à l'être humain, de prendre des décisions libres et autonomes. Mais cette capacité n'est pas absolue, elle est soumise à certaines conditions imposées par les lois naturelles et sociales.

Engels a écrit que la liberté est la conscience de la nécessité. C'est-à-dire que la liberté consiste à connaître (être conscient) les lois de la nature et de la société et à prendre des décisions en connaissant les limites imposées par les déterminations naturelles et sociales, ces dernières étant historiquement relatives.

Le capitalisme n'est pas une loi naturelle. C'est une étape - transitoire - de l'histoire humaine. Ainsi, si les êtres humains parviennent à connaître son fonctionnement réel, ses limites et ses contradictions, ils peuvent décider de l'abolir. Ce serait un acte transcendantal de l'exercice collectif du libre arbitre. S'ils ont la conscience et la volonté.

 BIBLIOGRAPHIE

Accardo, Alain, Notre servitude involontaire, Edit. Agone, France, 2001.

Amselle,  Jean-Loup et autres,  Critiquer Foucault: Les années 1980 et la tentation néolibérale.

Baudelot, Christian et Establet, Roger, L'école primaire divise, Éditions Maspero, Paris,  1975.

Bouveresse , Jacques,  Prodiges y vertiges de l’analogie. 1999. Edition actualisé: Liber, Raisons d’Agir 2022.

Bricmont, Jean et Sokal, Alain, Impostures intelectuelles. Odile Jacob. 1997.

Changeux, Jean Pierre L'homme neuronal , trente ans après . Editions Rue d'Ulm, Presses de l'Ecole Normal Supérieur, 2016.

Desmurget, Michel, TV Lobotomie, la vérité scientifique sur les effets de la télévision, Edit J'Ai Lu, Paris, réédition septembre 2013 et La fabrique du crétin digital. 2019.

Enzensberger, Hans Magnus, Culture ou mise en condition? Collection 10/18, Paris 1973.

Foucault, Michel, Les mots et les choses. Une archéologie des sciences humaines.Gallimard, 2012.

Laborit, Henri, L’homme imaginant, essai de biologie politique, Union Générale d’Editions, 1970; La nouvelle grille, Edit. Robert Laffont, France, 1987.

Marx, Karl, Introduction générale de la critique de l'économie politique de 1857. Préface  (ajouté par Marx lui-même en 1859  et point 3 (La méthode de l'économie politique);

Manuscrits de 1844

Monville, Aymeric, Misère du nietzschéisme de gauche, de  Georges Bataille  à Michel OnfrayLes Editions Aden, Brussels 2007;

Svendsen, Lars, Le travail. Gagner sa vie, à quel prix ? Editions Autrement, Paris, septembre 2013.

Teitelbaum, Alejandro, El papel desempeñado por las ideas y culturas dominantes en la preservación del orden vigente.Editorial Dunken. Buenos Aires. 2016.   Edition colombienne: El colapso del progresismo y el desvarío de las izquierdas.  Edition digital: https://www.surysur.net/teitelbaum-el-colapso-del-progresismo-y-el-desvario-de-las-izquierdas/

https://view.officeapps.live.com/op/view.aspx?src=https%3A%2F%2Fwww.surysur.net%2Fsite%2Fuploads%2F2018%2F01%2FTeitelbaum-EL-COLAPSO-DEL-PROGRESISMO.doc&wdOrigin=BROWSELINK

Socialter. En finir avec la marchandisation de l’attention.  En finir avec la marchandisation de https://www.socialter.fr/article/attention-ecrans-marchandisation-capitalisme?utm_source=Socialter+MASTER&utm_campaign=f2d301a65f-HEBDO_AVRIL_2_COPY_01&utm_medium=email&utm_term=0_5910e179f8-f2d301a65fl'attention

NOTES

[1] Il s'agit pas seulement d'un manque de ressources humaines et matérielles, mais aussi d'un déficit qui se creuse depuis des années dans les méthodes d'enseignement et de recherche, en raison des tendances obscurantistes qui dominent dans les sciences sociales et même dans certaines des sciences dites "dures". Voir: Philippe Meirieu : « N’attendons pas le prochain assassinat pour dire l’importance du métier d’enseignant ».https://www.alternatives-economiques.fr/philippe-meirieu-nattendons-prochain-assassinat-dire-limpor/00108352?utm_source=emailing&utm_medium=email&utm_content

[2] « Non, il ne faut pas aller à l’école pour ingurgiter le programme, s’enterrer sous les devoirs et les leçons, entasser les diplômes ! Apprendre, c’est d’abord s’interroger. Formuler ses questions. Chercher les réponses. Critiquer ses propres raisonnements. Suivre son chemin. Apprendre, c’est développer en soi l’irrévérence, l’initiative, la liberté de l’esprit. C’est construire son intelligence ».

Albert Jacquard (1925-2013), L'équation du nénuphar.Les plaisirs de la science. Livre de Poche. Jacquard  rejoint Richard Stallman pour dénoncer en décembre 2010 l'escroquerie sémantique du concept de propriété intellectuelle, puis, en juin 2011, pour soutenir la préservation des biens communs cognitifs.

[3]Jean-Paul Brighelli revient au chevet de l'École et la trouve plus mal en point que jamais. L'École de la transmission des savoirs et de la formation des citoyens est à l'agonie. Elle accomplit aujourd'hui ce pour quoi on l'a programmée voici un demi-siècle : adaptée aux nécessités du marché, elle fabrique à la chaîne une masse de consommateurs semi-illettrés et satisfaits d'eux-mêmes. Soucieuse d'élaborer enfin l'égalité promise par la République en nivelant par le bas, elle a réussi à détruire ce que la France avait mis deux cents ans à élaborer.(https://www.youtube.com/watch?v=ybJ43OZwvZE ).

[4] Rentrée scolaire : pour Sophie Vénétitay (SNES-FSU), les contractuels sont jetés "dans le grand bain avec une bouée percée".La secrétaire générale du SNES-FSU estime qu'il est "illusoire" de penser que la formation de "quelques jours" destinés aux contractuels recrutés pour pallier aux postes de professeurs non pourvus suffira pour faire face à une classe… https://www.francetvinfo.fr/france/rentree/rentree-scolaire-pour-sophie-venetitay-snes-fsu-les-contractuels-sont-jetes-dans-le-grand-bain-avec-une-bouee-percee_5320345.html

[5] Michalet, C.A., Delapierre, Madeuf y Ominami, Nationalisations et Internationalisation….Ed. La Découverte/Maspero, París, 1983.

 [6] Jean Quetier, Qué penser du populisme de gauche ? https://www.causecommune-larevue.fr/que_penser_du_populisme_de_gauche. Antoine Artous, A_propos_du_livre_de_Nicos_Poulantzas  https://www.academia.edu/11229051/; A. TeitelbaumSur un document d'Álvaro García Linera [vice-président d'Evo Morales et adhérent aux idées de Poulantzas] sur "l'État, la démocratie et le socialisme "htpps://www.alainet.org/es/articulo/168506#main-content : (en espagnol).

[7] DesmurgetTV Lobotomie, la vérité scientifique sur les effets de la télévisionEdit J'Ai Lu, Paris, réédition septembre 2013; Michel Desmurget, La fabrique du crétin digital. 2019 ; Faites les lire ! Pour en finir avec le crétin digital (Éditions du Seuil, 2022).

[8]  Les esprits formatés attribuent toujours des opinions unilatérales à ceux qui perçoivent les doubles et multiples aspects des choses de la vie et de l'histoire humaines - Edgar Morin

[9] Voir dans ce livre: Le mythe de la démocratie répresentative.

[10] "Tout au long de l'histoire du capitalisme, de la grande révolution industrielle de la fin du XVIIIe siècle à nos jours, le système économique s'est développé par des mouvements successifs d'investissement et d'innovation technologique. Ces mouvements semblent principalement liés aux difficultés inhérentes au processus d'accumulation du capital : à un moment donné, le capital se bloque et tout est remis en question : réglementation, salaires et productivité. L'innovation technologique est un moyen de sortir de la crise, mais elle ne vient pas seule : elle affecte directement, parfois le niveau d'emploi, toujours l'organisation du travail et le contrôle exercé par les travailleurs sur leur métier et leurs outils de travail et par leurs organisations sur le niveau des salaires, sur la discipline du travail et la sécurité de l'emploi...". Alfred Dubuc, Quelle nouvelle révolution industrielle ? in : Le plein emploi à l'aube de la nouvelle révolution industrielle. Publication de l'École de relations industrielles de l'Université de Montréal, 1982.

[11] Lars Svendsen, Le travail. Gagner sa vie, à quel prix ? Editions Autrement, Paris, septembre 2013, p. 140.

[12] Hans Magnus Enzensberger, Culture ou mise en condition ? Collection 10/18, Paris 1973, pp. 18-19.

[13] Marx fait référence au consumérisme au troisième Manuscrit, point 4, de ses Manuscrits de 1844 :

La propriété privée nous a rendus si sots et si bornés qu'un objet n'est nôtre que lorsque nous l'avons, qu' [il] existe donc pour nous comme capital ou qu'il est immédiatement possédé, mangé, bu, porté sur notre corps, habité par nous, etc., bref qu'il est utilisé par nous, bien que la propriété privée ne saisisse à son tour toutes ces réalisations directes de la possession elle-même que comme des moyens de subsistance, et la vie, à laquelle elles servent de moyens, est la vie de la propriété privée, le travail et la capitalisation. A la place de tous les sens physiques et intellectuels est donc apparue la simple aliénation de tous ces sens, le sens de l'avoir. L'être humain devait être réduit à cette pauvreté absolue, afin d'engendrer sa richesse intérieure en partant de lui-même.

[14] Laborit, Henri, L’homme imaginant, essai de biologie politique, Union Générale d’Editions, 1970, págs. 16-17.

[15] Laborit, Henri, La nouvelle grille, Edic. Robert Laffont, France, 1987, págs. 184-185.

[16] Marx, L'idéologie allemande, Ch.I.A. 2, Sur la production de la conscience.

[17] Hegel l'appelait tantôt société civile, tantôt, plus clairement, société bourgeoise (bürgerliche Gessellschaft).

[18] Victor Klemperer, Lingua Tertii Imperii ; La langue du Troisième Reich. Reflexiones de un filólogo. Editorial Minúscula, Barcelone, 2001; La langue du III Reich, Ed. Espaces Libres; Vandevelde-Rougale Agnès, « Victor Klemperer, LTI, la langue du IIIe Reich. Carnets d’un philologue », dans revue ¿ Interrogations ? , N°13. Le retour aux enquêtés, décembre 2011 [en ligne],

http://www.revue-interrogations.org/Victor-Klemperer-LTI-la-langue-du 0

  [19] Claude Hagège, Contre la pensée unique, Odile Jacob, janvier 2012

[20] Il existe une interdépendance ou une relation dialectique entre l'expression orale et écrite et la formation de la pensée logique, de la capacité d'abstraction et de conceptualisation et de la capacité à différencier le réel du virtuel. Lev Vigotsky écrit : Toutes les fonctions psychiques élémentaires habituellement liées au processus de formation des concepts y participent effectivement, mais d'une manière complètement différente. Elles ne se développent pas comme des processus indépendants selon la logique interne de leurs propres lois, mais comme des processus médiatisés par le signe ou le mot, comme des processus visant à résoudre une tâche donnée, faisant partie d'une nouvelle combinaison, d'une nouvelle synthèse dans laquelle chacun des processus participants acquiert sa véritable valeur fonctionnelle. Par rapport au problème du développement des concepts, cela signifie qu'aucun de ces processus, ni l'accumulation d'associations, ni le développement de la capacité et de la stabilité de l'attention, ni la combinaison d'idées, ni les tendances déterminantes, aussi développées soient-elles, ne peut conduire séparément à la formation des concepts, et donc qu'aucun de ces processus ne peut être considéré comme le facteur évolutif déterminant, essentiel et décisif dans le développement des concepts. Le concept est impossible sans les mots, la pensée en concepts est impossible sans la pensée basée sur le langage. L'aspect nouveau, essentiel et central de tout ce processus, qui peut à juste titre être considéré comme la cause de la maturation des concepts, est l'utilisation spécifique du mot, l'utilisation fonctionnelle du signe comme moyen de formation des concepts. (Vigotsky, Thought and Language, page 72 de l'édition électronique http://www.ateneodelainfancia.org.ar/uploads/Vygotsky_Obras_escogidas_TOMO_2.pdf ) Jean Piaget, avec une approche différente de celle de Vigotsky, a également souligné la relation intime entre la pensée et le langage (Piaget, J. et Inhelder, B. (1968). Psychologie de l'enfant; Piaget, J. (1968/1976). Langage et pensée chez l'enfant. Etude sur la logique de l'enfant (I), etc. Michel Desmurget fournit des statistiques sur les effets extrêmement néfastes de la surconsommation de télévision et de l'utilisation du langage twitter sur les enfants et adolescents français (Desmurget, TV Lobotomie, la vérité scientifique sur les effets de la télévision, Edit J'Ai Lu, Paris, réimpression septembre 2013).

 [21] L'introspection ou perception interne repose sur la capacité réflexive que possède l'esprit de se référer ou d'être immédiatement conscient de ses propres états. Lorsque cette capacité réflexive s'exerce sous la forme d'un souvenir d'états mentaux passés, on parle d'"introspection rétrospective" ; mais l'introspection peut être une connaissance d'expériences passées aussi bien que présentes, de celles qui se produisent ensemble et dans le présent de l'acte introspectif lui-même.

 [22] Maria Candea, Laèlia Veron, Le français est à nous. Petit manuel d’émancipation linguistique. Ed. La Découverte. Poche.  2021

[23] Morozov, dans Le Monde Diplomatique, d´août 2024, Une autre intelligence artificielle est possible.  

 [24] Karl Marx, Critique de la philosophie de l'État de Hegel

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