LOI 1905
Alejandro Teitelbaum
LA SEPARATION DE L'ÉGLISE ET DE L'ÉTAT EN FRANCE A CONNU DES HAUTS ET DES BAS PRONONCÉS DE 1789 À NOS JOURS, EN RELATION AVEC LES STRUCTURES ÉCONOMIQUES ET LES FORCES POLITIQUES ET IDÉOLOGIQUES DOMINANTES DE CHAQUE ÉPOQUE.
On pourrait la résumer comme un processus marqué par l'antagonisme entre les croyances et les savoirs.
La séparation de l'Église et de l'État, a été lancée dès 1789, afin de permettre de stimuler la rigueur analytique et l'esprit critique.
Celle-ci a été consacrée par la loi du 9 décembre 1905 et inscrite dans le préambule et l'article Premier de la Constitution de 1946, puis confirmée par la Constitution de 1958, actuellement en vigueur, et la jurisprudence du Conseil Constitutionnel.
La République est laïque, autrement dit non confessionnelle. Pas les personnes, qui conservent leur liberté de conscience et d'expression.
La loi de 1905, ses dispositions complémentaires et son application pratique, à l'instar de tout phénomène social, ne sont pas immuables: elles changent au fil du temps, d'une manière ou d'une autre, en fonction de facteurs politiques, culturels et économiques prédominants.
En l'espèce, les normes juridiques relatives à la loi de 1905, celle-ci fruit d'un compromis[1], et leur application pratique sont devenues discriminatoires, au détriment de l'islam et au profit de l'Église catholique[2].
La laïcité n’est pas une abstraction sans contenu. Elle doit contenir les éléments idéologiques fondateurs de la République, synthétisés dans l’expression « Lumières » et explicités dans l’Encyclopédie[3], opposés aux dogmatismes religieux et à l’irrationalisme.
On parle tout le temps de "l'école de la République". On peut se demander si elle existe vraiment. Parce qu'une école de la République doit disposer d'enseignants bien rémunérés, motivés, ayant une bonne formation pédagogique et de solides connaissances dans leurs matières respectives, capables d'intéresser les élèves à l'apprentissage de l'histoire, de la logique, des mathématiques, des sciences sociales et naturelles. Afin qu'ils acquièrent savoirs, rigueur analytique et un esprit critique, notamment face aux croyances et fanatismes raciaux et religieux, et qu'ils apprennent, entre autres, que tous les êtres humains sont égaux, sans distinction de sexe, de couleur, de race ou de religion. Rien de mieux pour l'éducation des enfants et des jeunes que d'apprendre la convivialité avec leurs camarades, quelle que soit leur religion ou leur apparence. Et puissent ainsi contribuer à renverser le déclin de la Nation.
Le démantèlement de l'enseignement, délibérément programmé par les classes dominantes et leurs valets politiques, compromet profondément l'éducation des jeunes générations et en fait des instruments soumis et malléables de la dictature du grand capital. Les jeunes doivent se former avant tout comme êtres humains, avertis, et pas seulement comme main d’œuvre qualifié ou non qualifié[4].
Et qu'ils apprennent à répondre aux dogmes religieux comme Laplace a répondu à Napoléon quand celui-ci lui demanda pourquoi son traité de cosmologie ne mentionnait pas Dieu : « Sire, je n'ai pas eu besoin de cette hypothèse ». Il expliqua plus tard que Dieu étant une hypothèse qui explique tout mais ne prédit rien, il n'est pas utilisable dans le cadre de la science.
C’est ainsi que l’on surmonte véritablement la guerre contre telle ou telle religion : en opposant la culture laïque de la République, efficacement enseignée et diffusée dans et hors des écoles, aux dogmatismes et aux fanatismes religieux. --------------------------------------
NOTES
[1] Compromis dénoncé par le député Maurice Allard. Siégeant en 1905 à l'extrême gauche de l'hémicycle, il incarna une laïcité radicale, prônant une séparation qui amènera une « diminution de la malfaisance de l'Église et des religions ».
[2] Voir, Interdiction Des Signes Religieux : La Fin Justifie-T-Elle Les Moyens? Julie Arroyo, Maîtresse de conférences en droit public, Faculté de droit de Grenoble, Université Grenoble Alpes (CRJ EA 1965) https://revuedlf.com/droit-administratif/interdiction-des-signes-religieux-la-fin-justifie-t-elle-lesmoyens/#:~:text=Les%20signes%20par%20lesquels%20les,en%20principe%20autoris%C3%A9s%5B146%5D.
[3] L’Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, éditée de 1751 à 1772 sous la direction de Denis Diderot et, partiellement, de Jean Le Rond d'Alembert et Louis de Jaucourt.
[4] Voir : Bilan idéologique et culturel, Chapitre 15 du livre Maison Terre, État de Lieux. Edition Dunken. 2024. Aussi en https://blogs.mediapart.fr/aleteitelbaum/blog/160425/france-bilan-ideologique-et-culturelle-deuxieme-partie.