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Billet de blog 7 août 2025

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"Ousmane SONKO libérer, régulariser les Sénégalais de Turquie" Amadou Bal BA

Interpellation du premier ministre du Sénégal, M. Ousmane SONKO, en voyage officiel, à Ankara en Turquie ; quel sort des sans-papiers africains dans les prisons turques depuis plus de 4 ans ? Libération immédiate et régularisation par le travail

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«Interpellation du premier ministre du Sénégal, M. Ousmane SONKO, en voyage officiel, à Ankara en Turquie ; quel sort des sans-papiers africains dans les prisons turques depuis plus de 4 ans ? Libération immédiate et régularisation par le travail» par Amadou Bal BA

Le président Macky SALL lors d'une visite en Turquie avait négocié avec ERDOGAN, une régularisation exceptionnelle des Sénégalais. Mais sitôt qu'il est reparti les titres de séjour ont été retirés. Les prisons sont pleines pour une rétention illimitée.

Entre le Sénégal et la Turquie les relations sont anciennes. Les Sénégalais s'habillent en Bazin, une mode à la turque. Il y a donc jusqu'à présent de nombreux commerçants, souvent des Ouolofs qui viennent acheter des habits en Turquie pour les revendre en Turquie. Comme les Turcs parlent peu l'anglais ils sont accompagnés par des immigrants sénégalais résidant dans ce pays. Les Africains habitent essentiellement dans un quartier à Istanbul dénommé Kumkapi. Certains sont en situation irrégulière et espèrent rejoindre l'Europe. Cependant la Turquie comme la Tunisie ont conclu des accords avec l'Union Européenne, avec d'importantes subventions pour refouler les immigrants illégaux. Naturellement ces personnes en situation irrégulière pour ne pas être renvoyées dans leur pays d'origine refusent de décliner leur nationalité. En Turquie aussi longtemps qu'un étranger ne dévoile pas sa nationalité doit rester en prison.

Par conséquent de nombreux sénégalais croupissent dans les prisons turques depuis plus de quatre ans. J'avais dans un article publié dans Mediapart, le 7 novembre 2023, sous Macky SALL, alerté nos autorités publiques qui s'en foutent carrément du sort de ces misérables. Un ministre m'avait même dit "pourquoi ils ne restent pas vivre au Sénégal ?".

Je reviens donc interpeler, mais fort respectueusement, le Premier ministre du Sénégal Ousmane SONKO qui à travers ses tournées internationales, éclipsant la Ministre des affaires étrangères et le président de la République, est le vrai chef de l'État du Sénégal. Ces nombreux voyages à l’étranger, très coûteux, dans un contexte de contrainte budgétaire et de reddition des comptes, devraient être utiles, pour tous les Sénégalais, notamment les plus modestes.

Macky SALL avait négligé, pendant le Covid, de faire rapatrier les corps des Sénégalais morts en France, dont ses deux griots ; cela a coûté cher à l’APR, puisque la diaspora peule en France, a rejoint massivement le PASTEF. Ici, ce qui se passe à l’étranger est d’une gravité exceptionnelle et nos autorités publiques se désintéressent de leur diasporas, notamment la question de la dématérialisation des titres de séjour en France, où des Africains, en situation régulière basculent dans la clandestinité, les préfectures refusant de donner des rdv pour le renouvellement de leurs titres de séjour. Des Français d’origine sénégalaise, ont toutes les peines du monde de faire de venir en France, leur épouse sénégalaise, mais les mariages célébrés au Sénégal, comme les enfants nés au pays, prennent du temps pour être transcrit. La nouvelle doctrine de Bruno RETAILLEAU est de considéré, qu’un Africain, même régularisé, ne plus acquérir la nationalité française, s’il a été auparavant, un laps de temps en situation irrégulière. Je reviendrai sur ces nombreuses circulaires rétablissent un vrai Code de l’indigénat pour les racisés, un système d’Apartheid, que seul le gouvernement algérien, a le courage de dénoncer.

J’appelle particulièrement l’attention des pays africains, en particulier le gouvernement du Sénégal, sur le sort dramatiques des candidats africains à l’immigration, sans papiers, en Turquie. L'immigration africaine, à destination maintenant de l'Amérique ou de l'Union européenne, passant jadis par l'Italie ou la Grèce, a désormais, en raison de la fermeture des frontières, jeté son dévolu sur la Turquie, comme territoire de passage. Un provisoire qui a tendance à durer parfois des décennies. Par conséquent, et en raison des vagues successives d'immigrants, une partie de Kumkapi est occupée par des ressortissants africains.

J'ai été intrigué d'avoir rencontré peu d'Africains dans les rues de Kumkapi et au restaurant Adji SARR, jadis bondé de monde, maintenant presque désert. Aussi, j'ai cherché à savoir où était passée cette importante communauté africaine à Istanbul, estimée à plus de 80 000 migrants en Turquie.

La communauté sénégalaise vivant en Turquie ce sont essentiellement des intermédiaires entre les grossistes turcs et les commerçants sénégalais de passage pour leur business. Un autre problème en Turquie : en dépit de son tourisme dynamique et son commerce ouvert au monde, les Turcs ne parlent presque exclusivement que le turc ; l'anglais comme le français sont très peu usités ici, y compris chez les taximen ou dans certains hôtels. Google traduction, outre que ce n'est pas commode, avec de nombreux contresens, ne permet pas d'avoir un échange pointu et approfondi.

Une partie de la communauté sénégalaise, ce sont des vendeurs de rue à la sauvette, comme à Paris aux alentours du Sacré-cœur ou de la Tour Eiffel. Certains sénégalais sont majoritairement des employés chez des Syriens qui tiennent une bonne partie de l'industrie du bâtiment ou de la confection. Il faut dire que le commerce est très dynamique en Turquie qui n'est pas seulement qu'un pays du Kebab. Parfois même les commerces de bouche, de garages de réparation de voitures, ont éclipsé les magasins généralistes, comme Monoprix ou Carrefour en France où l'on trouve de tout. En effet, longtemps j'ai recherché un cahier pour mes prises de notes et une bonne boîte de nescafé.

La vie en Turquie est nettement moins chère qu'en France, mais les salaires sont également très faibles. En France, si le SMIC mensuel est, depuis septembre 2023, de 1383 euros, pour 35 heures hebdomadaires ; en revanche les immigrants sénégalais me disent travailler, debout, avec interdiction de s'asseoir, en moyenne 12 heures par jour, une heure de pause, ne comprenant pas la prière, pour un salaire moyen entre 500 et 600 euros mensuels. Pendant ce temps de travail, anormalement long, il est interdit de consulter ses messages ou de passer des coups de fil. Cependant, les pauses cigarette semblent être tolérées ; les Turcs apprécient le thé et le café qu'ils ont inventé, et surtout la cigarette ; ils fument même dans les taxis ; ce sont des accrocs à la nicotine.

Les salariés n'ont pas de congés, ni de cotisations pour la sécurité sociale ou la retraite. Ils n'ont pas non plus de contrat de travail et peuvent être remerciés du jour au lendemain, sans préavis ni motifs légitimes. Celui qui ne vient pas travailler, même pour cause de maladie, n'a aucun revenu de remplacement. J'ai vu à mon hôtel des personnes d'origine turque, relativement âgées continuer à travailler, comme aux États-Unis, en raison de cette défaillance grave du système des retraites. Il est bien évident qu'il n'y a pas en Turquie d'aide médicale de l'Etat pour les étrangers sans papiers comme en France ; et que Moussa DARMANIN veut abolir. En effet, le 20ème projet de loi sur l'immigration en France en 40 ans, traduit le fait, qu'une partie de la classe politique française, est à décoloniser. Pour eux, l'immigration africaine n'est conçue qu'en termes d'identité nationale, de délinquance ; leur grande obsession est donc d'accélérer l'expulsion de ces indésirables du tiers-monde. En France, il est question de régulariser les sans-papiers travaillant dans les secteurs sous-tensions, sous réserve d'une maîtrise très élevée de la langue française. Pendant la pandémie du Covid 19, la perspective des Jeux Olympiques de 2024, comme le manque de maîtres auxiliaires à l'éducation nationale ou d'autres secteurs (bâtiments hôtellerie, restauration), tout cela montre que la France devrait avoir une politique d'immigration réaliste, pragmatique en fonction de ses intérêts. A mon sens, un étranger sans papiers qui travaille et n'a pas commis d'actes délictueux, ou disposant de qualifications importantes, devrait être régularisé. De nombreuses entreprises françaises sont en Chine et peuvent être relocalisées dans la perspective de cette régularisation et en vue de renflouer les caisses de retraites et de sécurité sociale. Et ce sera moins de dépenses en termes d'aide médicale de l'Etat. Tout le monde est gagnant.

Où sont donc passés une bonne partie de ces immigrants africains à Kumkapi ?

Il résulte de plusieurs témoignages concordants, que j'ai recueillis, un nombre particulièrement élevé d'illégaux, de nombreux sans papiers africains, croupissent, depuis au moins la fin de l'année 2021, dans les prisons turques. Les chiffres des témoignages cependant variables ou flottants. Cependant, certains parlent de 60 000 prisonniers, d'autres entre 20 000 et 30 000 Africains en rétention et en attente d'une expulsion. Contrairement aux pays occidentaux , dès que l'un des leurs est emprisonné à l'étranger, la presse donne de la voix, pour sa libération immédiate. En revanche, les Africains peuvent mourir par milliers dans le désert ou les océans, aucun pays africain ne proteste. En particulier, les pays africains sont pourvus en nombreuses missions diplomatiques, fort coûteuses en frais de déplacement et de représentation, sauf pour s'occuper du sort de leurs ressortissants emprisonnés à l'étranger. Le Sénégal dispose naturellement d'un Ministère des affaires et de 15 députés de la diaspora, dont la mission essentielle est presque exclusivement de gérer leurs indemnités. Si j'en avais les moyens, je les aurais traduit, ces députés de la diaspora, devant la Haute cour de justice, pour forfaiture et détournements de deniers publics.

En Turquie, le sort des sans-papiers africains est peu enviable. En effet, Kumkapi est une prison à ciel ouvert. De nombreux Africains sans papiers n'osent plus sortir de leur terrier ; ils se se cachent, afin d'échapper aux contrôles ou descentes de police, moins fréquents ces temps-ci, mais toujours possibles.

Le président Macky SALL, par deux fois lors de ses visites à Istanbul, avait négocié la régularisation des Sénégalais sans papiers, 1444 personnes en octobre 2017 et 1500 Sénégalais en janvier 2020. Le volume des échanges commerciaux entre la Turquie et le Sénégal est estimé, par an, à 540 millions de dollars. Cependant, il semble que bon nombre ces Sénégalais, ne détenant qu'un titre de séjour d'une année, n'ont pas vu leurs papiers renouvelés. Pire, dès le début de l'année 2022, de vastes opérations de contrôles d'identité ont été menées dans le quartier de Kumkapi, et même des titres de séjour réguliers ont été carrément déchirés ou retirés de façon arbitraire, selon certains témoignages.

Vu de France, dans le domaine du traitement des étrangers, on a parfois l'impression que mon ministre de l'intérieur, M. Moussa DARMANIN, candidat et concurrent d'Edouard PHILIPPE aux présidentielles de 2027, serait subitement devenu un "humaniste", dans ses réformes, successives et obsessionnelles, de la loi sur les étrangers, dignes d'un Code de l'indigénat. En effet, en Turquie, de nos jours, toute attestation de domicile est interdite à délivrer, dans certaines rues occupées par les Africains. Par conséquent, et sans justificatif de domicile, il est impossible de se faire régulariser. Les Africains sollicitant un visa pour la Turquie doivent désormais se soumettre à un relevé des empreintes digitales.

Le titre de séjour en Turquie, délivré aux Africains, n'est valable seulement pour un an. Il n'y a pas de carte de 10 ans, introduite en 1984, par François MITTERRAND. J'ai rencontré de nombreux sénégalais résidant dans le pays entre 10 ans et 15 ans, sans aucun moyen d'avoir une carte de séjour sur une durée plus longue. Par ailleurs, à chaque renouvellement, c'est un parcours du combattant ; et il faut s'acquitter d'une taxe de 500 euros, soit l'équivalent d'un salaire mensuel, comme je l'ai indiqué.

"Accueillez bien les étrangers, mais ne leur donnez pas votre fille en mariage" avait dit Moustapha KEMAL, le fondateur de l'Etat moderne de la Turquie, dont on célèbre, en grandes pompes, le centenaire depuis le 29 octobre 2023 (Voir mon article sur l'héritage de Mustafa KEMAL, Médiapart 29 octobre 2023). Comment font donc les immigrants, s'ils ne peuvent pas se marier aux femmes turques ? Curieusement, dans ce pays musulman, oscillant entre tradition et modernité, la prostitution est légale. Cependant, le président Recep Tayyip ERDOGAN a fermé les maisons closes à côté de la Tour Galata, jetant de nombreuses lucioles à la rue, sans un minimum de contrôle médical. Par conséquent, les immigrants, fréquentant les prostituées, peuvent être exposés à de nombreuses maladies sexuellement transmissibles.

En tout cas, sans mariage possible avec une femme turque, les Sénégalais honnêtes, travailleurs et paisibles, séjournant dans le pays de longue date, ont, pour l'instant, peu de chance de s'intégrer durablement dans la société turque.

En définitive, la Turquie est un pays qui a accueilli, très massivement des étrangers, là où les Occidentaux et l'OTAN ont levé la troupe, décrété l'Etat d'urgence, pour quelques réfugiés sous la neige, à la frontière polonaise, tout en donnant des titres de séjour à 5 millions de réfugiés Ukrainiens. Cependant, la Turquie, avec des emprisonnements à  durée illimitée de clandestins, trouble gravement notre conscience. Il est donc urgent de réclamer la libération de ces sans papiers, dont certains sont détention depuis plus de 2 ans. Contrairement à la France où la durée de la rétention ne pouvant pas dépasser 90 jours, en Turquie le clandestin n'a qu'une alternative devant lui : décliner sa vraie identité et son pays d'origine, pour être expulsé immédiatement ou rester indéfiniment en prison ; ce qui est contraire à la convention européenne des droits de l’homme que la Turquie a signée.

En définitive, j’interpelle donc les gouvernements africains et les invitent à faire respecter les droits de leurs diasporas, en Europe, notamment en France, mais aussi en Turquie. Un vrai système d’Apartheid est entrain de se mettre en place, que j’appelle un rétablissement du Code de l’indigénat que maître Lamine GUEYE avait aboli en 1946.

En particulier, il est grand temps de faire sortir de prison cette grande masse d’Africains en situation irrégulière enfermée depuis 4 ans en Turquie, dont de nombreux Sénégalais et de régulariser ceux qui travaillent, en leur offrant de meilleures conditions de vie et des cartes de séjour pluriannuelles.

Références bibliographiques

BA (Amadou, Bal), «Africains illégaux, emprisonnés indéfiniment à Istanbul, à Kumkapi», Médiapart, 7 novembre 2023 ;

BA (Amadou, Bal), «Abroger le Code de l’indigénat», Médiapart, 7 mai 2022 ;

BA (Amadou, Bal), «Bruno RETAILLEAU, Ministre de l’Intérieur, patron des Républicains, pour un Code de l’indigénat», Médiapart, 18 mai 2025 ;

BA (Amadou, Bal), «Face à la montée du fascisme en Occident, les forces du Chaos ambitionnant d’abroger l’Etat de droit : No Passaran !», Médiapart, 2 mars 2025 ;

BA (Amadou, Bal), «France, Immigration, plus de répression», Médiapart, 24 septembre 2022 ;

BA (Amadou, Bal), «Le Conseil constitutionnel censure la loi sur les étrangers», Médiapart, 25 janvier 2024 ;

BA (Amadou, Bal), «Le président Emmanuel MACRON et son Code de l’indigénat», Médiapart, 5 février 2021.

Paris, le 7  août 2025, par Amadou Bal BA

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