amadouba19@gmail.com (avatar)

amadouba19@gmail.com

Le bien-vivre ensemble Littérature et Politique

Abonné·e de Mediapart

1142 Billets

0 Édition

Billet de blog 20 septembre 2025

amadouba19@gmail.com (avatar)

amadouba19@gmail.com

Le bien-vivre ensemble Littérature et Politique

Abonné·e de Mediapart

"Olga TOKARSCZUK femme de Lettres polonaise" Amadou Bal BA

amadouba19@gmail.com (avatar)

amadouba19@gmail.com

Le bien-vivre ensemble Littérature et Politique

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Illustration 1
Illustration 2
Illustration 3

«Olga TOKARCZUK, femme de Lettres polonaise, du mystère, du réalisme magique, du mythe, de l’irrationnel et du voyage. Prix Nobel de littérature 2018» par Amadou Bal BA

Romancière et essayiste polonaise, Olga TOKARCZUK, est née le 29 janvier 1962 à Sulechow, près de Zielona Gora, à l’ouest de la Pologne dans une famille progressiste d’enseignants d’ascendance polonaise et ukrainienne. Son père travaillait aussi dans une bibliothèque d’école, d’où les lectures précoces de la jeune Olga. Après des études de psychologie à l'Université de Varsovie, sur Carl Gustav JUNG (1875-1961), médecin psychiatre suisse, et quelques années de pratique en qualité de psychothérapeute, Olga TOKARCZUK était initialement attirée par la poésie, avec un recueil publié en 1979, sous le pseudonyme de Natasza BORODIN. Après Varsovie, Wroclaw, Walbrzych, où elle a travaillé comme thérapeute, depuis 1998, elle s’installe dans le petit village de Krajnow, près de Nowa Ruda. En 1993, son roman, «Voyage des gens du Livre» relatant une expédition fantastique à la recherche d’un livre mystérieux dans la France du XVIIe siècle, est basé sur une intrigue étrange, avec une galerie de personnages extravagants, à la forme un peu naïve, avec des thèmes majeurs traversant sa contribution littéraire, savoir le mystère, le mythe, l’irrationnel, le voyage. Cette femme de Lettres polonaise a introduit des romans ironiques, étranges et complexes, dans la tradition littéraire d’Europe centrale. «Le monde est représenté par une réalité mouvante, où la limite entre le réel et l’imaginaire ne se dessine pas aussi nettement qu’il y paraît», dit-elle au journal Le Monde du 28 novembre 2019. Interrogeant le passé, pour mieux situer le temps présent, Olga TOKARCZUK est de partout et de nulle part. «Le monde est vivant, vibrant. Il n’existe pour lui aucun point zéro susceptible d’être mémorisé et compris. Il n’y a pas de plus grande illusion qu’un paysage, puisque la fixité n’existe pas», écrit-elle dans «Maison de jour, maison de nuit».

 L’autrice est Prix polonais, «Niké», la plus prestigieuse distinction prix littéraire Polonaise, à deux reprises, en 2008, pour «Les Pelgrins», des thèmes de mobilité, de voyage et d’évasion et 2015, pour «Les livres de Jakob», Jacob Frank étant le fondateur d’une secte hérétique au sein du judaïsme, c’est l’histoire d’une Pologne des confins orientaux au XVIIIe siècle où coexistaient le christianisme, le judaïsme et l’islam. Olga TOKARCZUK obtient, en 2018, «The Man Booker International Prize». En 2018, c‘est le Graal, le prix Nobel de littéraire Olga TOKARCZUK incarne «une imagination narrative qui, avec une passion encyclopédique, symbolise le dépassement des frontières comme forme de vie».  Avant elle, quatre auteurs polonais avaient déjà obtenu le prix Nobel de littérature : en 1905, Henry SIENKIEWICZ, en 1924, Wladyslaw REYMONT, en 1980, Czeslaw MILOSZ et en 1996, Wislawa SZYMBORSKA.

Quelle donc la fonction de la littérature, du narrateur ? «La littérature est l’un des rares domaines qui tentent de nous retenir dans le concret du monde, parce que, par nature, elle est toujours «psychologique». Elle se concentre sur les raisons propres et les motivations des personnages, dévoile leur vécu qui n’est accessible à autrui d’aucune autre manière, ou pousse tout simplement le lecteur à une interprétation psychologique de leur conduite. La littérature est seule en mesure de nous laisser entrer dans le cœur d’un autre être pour comprendre ses motifs, partager ses sentiments et vivre son destin», dit Olga TOKARCZUK, dans «Le tendre narrateur, discours du Nobel». Pour l’autrice, «la littérature est un domaine dans lequel se combinent les connaissances, les intuitions, les émotions et le besoin d’ordonner le monde» dit-elle.

Disciple de William BLAKE (1757-1827), un poète britannique qui voyait les Anges, Olga TOKARCZUK a livré une œuvre mystique, ancrée dans le réel. Ses romans enjambent les frontières et les siècles pour recréer un univers fluide où tout est relié, les règnes animal, végétal et humain, le surnaturel et le naturel, la science et le surnaturel. «Il m’arrive souvent de dépasser les frontières du roman réaliste, car je crois qu’il est impossible de représenter le monde uniquement avec des outils réalistes. Nous voyons le monde subjectivement et émotionnellement ; nous sommes sensibles aux illusions. En plus, nous sommes influencés par les mythes, les contes de fées, et par des représentations contemporaines issues notamment du cinéma. Nous vivons également des situations que nous n’aurions jamais cru possibles, jusqu’à ce qu’elles se produisent» dit-elle.

Par conséquent, la contribution littéraire d’Olga TOKARCZUK est marquée par le réalisme magique ; la réalité avec le mythe, ces deux mondes s’interpénètrent et la frontière entre eux s’estompe. En effet, l’écrivaine explore cette frontière presque invisible entre le réel et le mythique dans «Dieu, le temps, les hommes et les anges», en 1996, son premier grand succès littéraire, mais aussi, en 1998, que dans le recueil de récits dans «Maison de jour, maison de nuit». Le mystère du psychisme humain est abordé en 1995, E.E., où une jeune fille manifeste des dons de médium dans la Wroclaw de l’entre-deux-guerres. Dans E. E, en 1908, à Breslau, Erna Eltzner, fille cadette d’une famille bourgeoise germano-polonaise, mène une existence effacée. Tout change lorsqu’elle s’évanouit à table, après son quinzième anniversaire. Non seulement elle a entendu des voix, mais un fantôme lui est apparu. A-t-elle reçu le don merveilleux de communiquer avec les morts ? Est-elle possédée ? S’agit-il de cette fameuse maladie nouvelle, l’hystérie ? La mère d’Erna, qui rêvait d’être actrice, se montre enthousiaste à l’excès. Le père, propriétaire d’une filature, ne veut rien savoir de toutes ces fariboles. Occultistes, médecins de jadis ou découvreurs prudents de la psychiatrie moderne, chacun fait entendre son analyse et parfois son jugement. Bientôt, Mme Eltzner ne résiste pas à la tentation de réunir quelques amis pour des séances de spiritisme, la table va danser, des objets traverser la pièce.

Jusqu'ici les barrières de la langue ont été, pour une large part, un grand obstacle à la découverte des merveilleuses littératures d'autres pays. Or, Olga TOKARCZUK a été très largement traduite en français et elle a même, en mars 2025, été invitée à la Sorbonne. Autrice d’une vingtaine de livres, traduits en 25 langues, notamment en langue française à partir de 1998, et massivement à partir de 2021, Olga TOKARCZUK, vivant dans une Pologne ultraconservatrice, et où l’Église occupe une place importante dans le jeu politique, est aussi une femme engagée, contre patriarcat, le populisme et l’interdiction de l’avortement dans son pays. Drôle, d’une grande finesse. «La littérature est puissante, mais elle a une force délicate, la force de la subtilité» dit-elle.  Féministe, écologiste, végétarienne, elle s’implique dans la défense des droits des femmes, des animaux, des minorités sexuelles et ethniques. Pour elle, la littérature peut aussi être un rempart contre la guerre. «Elle développe la tendresse et l’empathie. Le roman, en particulier, nous permet de nous identifier aux autres. Celui qui lit est moins susceptible de voir en l’autre un ennemi. Mais j’ai de plus en plus l’impression que la guerre est une guerre de systèmes, pas d’individus» dit-elle, à propos du «Banquet des empouses».

Références bibliographiques

TOKARCZUK (Olga), Dieu, le temps, les hommes et les anges, traduction de Christophe Glogowski, Paris, Robert Laffont, 1998, 340 pages ;

TOKARCZUK (Olga), E. E., Paris, Les éditions Noir sur Blanc, 2025, 192 pages ;

TOKARCZUK (Olga), Histoires bizarroïdes, traduction de Maryla Laurent, Paris, les éditions Noir sur Blanc, 2020, 181 pages ;

TOKARCZUK (Olga), Jeux sur tambours et tambourins, Paris, LGF, Le Livre de Poche, 2025, 480 pages ;

TOKARCZUK (Olga), Le banquet des empouses, traduction de Maryla Laurent, Paris, Les éditions Noir sur Blanc, 2024, 204 pages ;

TOKARCZUK (Olga), Le tendre narrateur, discours du Nobel et autres textes, traduction de Maryla Laurent, Paris, Les éditions Noir sur Blanc, 2020, 69 pages ;

TOKARCZUK (Olga), Les enfants verts, traduction de Margot Carlier, Paris, Les éditions éditions La Contre allée, 2016, 96 pages ;

TOKARCZUK (Olga), Les livres de Jakob, traduction de Maryla Laurent, Paris, Libraire générale française, 2021, 1216 pages ;

TOKARCZUK (Olga), Les Pelgrins, traduction d’Erhard Grazyna, Paris, Librairie générale française, 2021, 539 pages ;

TOKARCZUK (Olga), Maison de jour, Maison de nuit, traduction de Maryla Laurent, Paris, les éditions Noir sur Blanc, 2021, 293 pages, 1ère édition, en 2001, chez Robert Laffont ;

TOKARCZUK (Olga), Monsieur Remarquable, traduction de Margot Carlier, illustration de Joanna Concejo, Wroclaw, éditions Format, 2023, 46 pages ;

TOKARCZUK (Olga), Récits ultimes, traduction d’Erhard Grazyna, Paris, Le Livre de poche, 2021, 351 pages ;

TOKARCZUK (Olga), Sur les ossements de morts, traduction de Margot Carlier, Paris, Libreto, 2020, 281 pages ;

TOKARCZUK (Olga), Une âme égarée, traduction de Margot Carlier, illustration de Joanna Concejo, Wroclaw, éditions Format, 2018, 40 pages ;

TOKARCZUK (Olga), Voyage des gens du livre, traduction d’Erhard Grazyna, Paris, Le Livre de poche, 2021, 351 pages.

Paris, le 20 septembre 2025, par Amadou Bal BA

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.