"Bachir Tamsir NIANE, son roman, Little Jamaïca" Amadou Bal BA

«Bachir Tamsir NIANE et son roman «Little Jamaïca». Un puissant hymne à la liberté, contre la domination et la prédation des puissants. Appel à l’Egalité, à la Fraternité et au Bien-vivre ensemble en Afrique contre les démons de l’ethnicité.» par Amadou Bal BA

Bachir Tamsir NIANE n'est pas seulement que le fils de l'illustre historien guinéen, Djibril Tamsir NIANE que j'avais rencontré à la Colonie à Paris 10e, aux 70 ans de Présence africaine (Voir mon article Médiapart). Très souvent, les enfants de hautes personnalités sont écrasés, voire castrés par une étouffante image de leur père, et n’arrive pas à exister par eux-mêmes. Bachir Tamsir NIANE est une exception notable à cette inhibition ; il a survécu, par son génie littéraire  et vaincu cette paralysante «odeur du père» comme le dirait Valentin-Yves MUDIMBE. En effet, Bachir Tamsir NIANE existe par lui-même. En effet, il est aussi et surtout un enseignant, un universitaire, un riche et  talentueux écrivain.

Bachir Tamsir NIANE a publié un roman, «Little Jamaïca». Un bidonville de fortune : c'est là que vivent les habitants de «Little Jamaïca», un peuple de jeunes rasta utopistes évoluant dans un univers de vieilles tôles et de cartons. Les rapports sont tendus entre les autorités et les habitants de cette zone périphérique urbaine oubliée par les pouvoirs de la Ville. Aussi, lorsqu'un homme d'affaires américain meurt dans une explosion, on soupçonne un groupuscule du quartier, les Douze Tribus, d'être à l'origine de l'attentat. Incrédules devant cette thèse, trois journalistes se lancent dans une enquête effrénée afin de savoir ce qui s'est réellement passé. À la faveur des paysages qui défilent comme autant d'invitations au voyage, l'auteur nous entraine dans une recherche mystérieuse et envoutante du paradis perdu. Plus qu'un roman d'aventures, «Little Jamaïca» est un hymne à la liberté.

L’auteur dénonce certaines valeurs méprisant les personnes dominées par les puissances de l’argent dans la prédation et la soumission des faibles. «Je suis l'auteur de ce roman qui a été finaliste du prix du premier roman en ligne 2011 organisé par les éditions le Manuscrit. Je tente dans cette histoire de montrer le côté réducteur et uniformisant des sociétés dans lesquelles nous vivons actuellement. La communauté de marginaux dont il est question dans ce roman apparait comme la victime d'une société légère, fondée sur la vitesse, l'argent, et les honneurs terrestres. Il n' y a pas de place pour ceux qui sortent du lot et marchent en dehors du chemin tracé pour tous. Je recommande ce roman à tous les lecteurs intéressés par les ouvrages traitant de la collusion du monde politique avec les secteurs», dit l’auteur, Bachir Tamsir NIANE.

Ce roman est aussi un puissant clin d’œil aux indépendances africaines «négociées», après l’euphorie et la joie, les désirs légitimes des Africains, de sortir de la longue nuit coloniale, pour la liberté et la dignité, ont été trahis ; c’est la grande désillusion. «Comme une nuée de sauterelles, les indépendances tombèrent sur l’Afrique», avait prédit Ahmadou KOUROUMA (Voir mon article, Médiapart), dans son «Soleil des indépendances». En fait, l’indépendance, c’est «le bel immonde», en référence au titre d’un ouvrage de Valentin-Yves MUDIMBE (Voir mon article, Médiapart).

Dans sa contribution littéraire, Bachir Tamsir NIANE, un universitaire, professeur de littérature africaine contemporaine à l’université Gaston Berger, et dont les ancêtres viennent de Séno-Palel, au Fouta-Toro, à côté de Kanel (Voir mon article, sur le griot Thioukel SAM, Médiapart, 2 juin 2020), a enseigné cette discipline entre 2013 et 2022 dans la seconde université publique de Guinée. Aussi, l’auteur témoigne d’une grande ouverture d’esprit, à travers son livre, sur «le réalisme magique», en 2023, de l’héritage culturel africain, en raison du phénomène de l’esclavage, concernant ses relations avec États de l’Amérique du Sud et ceux de l’Afrique noire. En dépit de l’éloignement géographique de ces deux espaces politiques et historiques, une histoire tumultueuse et une communauté de destin relient l’Afrique à ses diasporas. Gabriel GARCIA MARQUEZ et son livre, «Cent ans de solitude» a rétabli un pont entre l’Afrique et les Amériques.

Dans son livre, en 2016, son roman, «l’enfant de Gondar», relate le cheminement spirituel du jeune Iskander, abandonnant les monastères éthiopiens pour la vie extérieure. À travers son expérience, le pays nous est présenté dans sa diversité et sa richesse, et une belle leçon d'humanité nous est ainsi offerte.

 A côté du thème de la liberté qui traverse toute sa contribution littéraire, Bachir Tamsir DIAGNE, avec Mariam KANTé, essayiste, est également fortement mobilisé contre les démons de l’ethnicité en Afrique, et donc pour l’égalité réelle, la fraternité et le bien-vivre ensemble «Aujourd’hui, un peu partout sur le continent, plus particulièrement en Afrique de l’Ouest, commence à émerger un sentiment de nationalisme exacerbé. Un discours raciste et xénophobe, est ainsi en train de naître sous nos yeux, véhiculé sur ces réseaux sociaux qui offrent l’avantage de l’anonymat aux allumeurs de feu. Ce phénomène rampant menace l’équilibre social des composantes de chaque nation, et expose les populations étrangères vivant dans les différents pays d’accueil», écrivent Bachir Tamsir NIANE et Mariam KANTé, dans un manifeste, «Appel international à textes pour un ouvrage collectif». Jadis, le président Sékou TOURé avait parlé de «complot peul» qui habitent dans 27 pays africains. Le Sénégal, en dépit du concept nauséabond de «Neddo Ko Bandoum», largement préservé de l’ethnicité, est un Grand petit pays de la tolérance. Dans d’autres pays, l’ethnicité est devenu un obstacle majeur à l’alternance politique. En effet, certains groupes politiques s’allient pour confisquer, indéfiniment, le pouvoir politique. Aussi, contre le racisme et la xénophobie, Bachir Tamsir DIAGNE et Mariam KANTé militent pour la tolérance, pour des valeurs positives d’hospitalité africaine, à travers les concepts «d’Akwaba», en Côte-d’Ivoire et au Ghana, de «Téranga» et de «Teddungaal» au Sénégal et «d’Ubuntu» en Afrique centrale.

Aussi, entre le 17 mai 2025 et le 30 juin 2025, les signataires de ce manifeste lancent un appel à projet pour 50 contributeurs, avec Annie COLY, présidente du Comité scientifique, sur les thèmes suivants :

• Histoire des brassages ethniques et culturels au Sénégal ;
• Les valeurs traditionnelles du vivre ensemble : Téranga, Teddungaal, cousinage à plaisanterie ;

• Analyse des causes sociopolitiques de la montée de l’aversion envers les étrangers ;

• Le rôle des réseaux sociaux dans la diffusion des discours xénophobes ;
• Témoignages de parcours de vie, d’intégration et de solidarité intercommunautaire ;

• Conséquences des replis identitaires pour le Sénégal et la sous-région
• Initiatives citoyennes, religieuses ou politiques pour promouvoir la paix sociale ;

• Propositions concrètes pour renforcer l’unité nationale et prévenir les dérives xénophobes.

Références

A – Contributions de Bachir Tamsir NIANE

NIANE (Bachir, Tamsir), Little Jamaïca, Le Manuscrit, 2011, 244 pages ;

NIANE (Bachir, Tamsir), Désillusions postcoloniales africaines à travers «Pétales de sange» et «Les soleils des indépendances», préface de Djibril Diallo FALEME, Dakar, Harmattan, 2023, 141 pages ;

NIANE (Bachir, Tamsir), Étude du roman africain des indépendances, Paris, éditions universitaires européennes, 2020, 64 pages ;

NIANE (Bachir, Tamsir), L’enfant de Gondar, Paris, Edilivre, 2016, 158 pages ;

NIANE (Bachir, Tamsir), Le réalisme magique en Afrique ? Essai sur une esthétique de l’indicible et du chaos, Paris, Connaissances et Savoirs, 2023, 86 pages.

B – Autres références

BA (Amadou, Bal), «Djibril Tamsir NIANE (1932-2021), historien guinéen et son Soundiata», Médiapart, 11 mars 2021 ;

BA (Amadou, Bal), «Ahmadou KOUROUMA (1927-2003), écrivain ivoirien, un Voltaire africain», Médiapart, 18 janvier 2024 ;

BA (Amadou, Bal), «Gabriel GARCIA MARQUEZ (1927-2014) et son roman, «Cent ans de solitude»», Médiapart, 24 décembre 2024 ;

BA (Amadou, Bal), «Valentin-Yves MUDIMBE (1941-2025) philosophe africain. In Memoriam», Médiapart, 22 avril 2025.

Paris, le 23 mai 2025, par Amadou Bal BA