amadouba19@gmail.com (avatar)

amadouba19@gmail.com

Le bien-vivre ensemble Littérature et Politique

Abonné·e de Mediapart

1173 Billets

0 Édition

Billet de blog 28 mars 2025

amadouba19@gmail.com (avatar)

amadouba19@gmail.com

Le bien-vivre ensemble Littérature et Politique

Abonné·e de Mediapart

"Wole SOYINKA, Par-delà l'esthétique, chez Présence africaine" Amadou Bal BA

Wole SOYINKA, prix Nobel de littérature, son nouveau livre, «Par-delà l'esthétique», chez Présence africaine, une dénonciation de la dévalorisation de l'identité et de la culture africaines, par les gouvernants, à travers leur choix artistique extraverti. Les religions étrangères participent également à cette tendance d'assimilation.

amadouba19@gmail.com (avatar)

amadouba19@gmail.com

Le bien-vivre ensemble Littérature et Politique

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Illustration 1
Illustration 2
Illustration 3

«Wole SOYINKA, prix Nobel de littérature et son livre, «Par-delà l'esthétique», paru chez Présence africaine» Amadou Bal BA

Mme Suzanne DIOP, Directrice générale des éditions Présence africaine fondée Alioune DIOP a eu la grande amabilité de me faire parvenir ce nouveau livre de Wole SOYINKA, prix Nobel, «Par-delà l'esthétique». De son vrai nom, Akinwande Oluwole Babatunde SOYINKA, de l’ethnie Yoruba, prix Nobel de littérature en 1986, est né le 13 juillet 1934 à Abeokuta au Nigéria, d’une mère Eniola, commerçante, fortement engagée en faveur des droits des femmes et d’un père, Samuel Ayodele, prêtre anglican et directeur d’école. Il est le cousin de Fela KUTI (1938-1997, voir mon article Médiapart, 29 mars 2023), le chanteur et activiste nigérian. Il a fréquenté l’école primaire Saint Peter d’Abeokuta, de 1940 à 1946, l’école secondaire, le collège d’Ibadan, de 946 à 1951, l’université d’Ibadan, de 1952 à 1954, et l’université, Leeds, au Royaume uni, de 1954 à 1957. Il commence à écrire, et retourne au Nigéria, en 1960, et commence, en 1962, à enseigner la littérature anglaise, à l’université d’Ifé, à Ibadan, tout en continuant à écrire. Wole SOYINKA, particulièrement discret sur sa vie privée, a été marié trois fois, en 1958, à l'écrivaine britannique Barbara DIXON, en 1963, à Olaide IDOWU, une bibliothécaire nigériane, et depuis 1989, à Folake DOHERTY.

D'emblée ce livre, «Par-delà l’esthétique», de Wole SOYINKA, m'inspire quelques remarques préalables.

Tout d'abord Wole SOYINKA, dans sa polémique célèbre contre les tenants de la négritude, avait dit que «un tigre ne proclame pas sa tigritude ; il bondit sur sa proie et la dévore» avait-il dit, en 1962, lors d’une conférence d’écrivains à Kampala, en Ouganda. Après avoir participé à la Colonie, dans le 10e arrondissement chez notre ami, Kader ATTIA, aux 70 ans de Présence africaine (Voir mon article, Médiapart, 25 octobre 2019), Wole SOYINKA en publiant son livre, «Par-delà l’esthétique, usage, abus et dissonance dans les traditions africaines», chez Présence africaine, a définitivement fumé le calumet de la paix. «Dans la demeure du collectionneur, Wole Soyinka, rôdent des présences qui, depuis des temps immémoriaux, guident le regard des artistes et font parler entre elles leurs créations. C’est à leur rencontre que le dramaturge, poète, essayiste, romancier et lauréat du prix Nobel de littérature, nous entraîne», écrit Présence africaine, à propos de ce nouveau livre de Wole SOYINKA.

Ensuite, Wole SOYINKA, à 91 ans, en dépit du temps qui passe, reste prolifique avec une boulimie créatrice. Le prix Nobel de littérature ne s'est pas contenté de vivre des rentes de sa gloire littéraire mondiale, comme le font certains, entre deux avions courant d'une conférence à l'autre avec du «réchauffé». On a même vu même de brillants esprits vite épuisés après un ou deux romans. Or, Wole SOYINKA, qui n'a plus rien à prouver, continue de nous étonner et nous enrichir intellectuellement.

Enfin, écrivain du symbolisme, dramaturge, essayiste, romancier, universitaire et poète, toujours au sommet de son art, ce nouveau livre paru chez Présence africaine, «Par-delà l'esthétique», atteste de la diversité et de la richesse des thèmes que brasse Wole SOYINKA. Sa contribution littéraire reflète parfaitement les contradictions et le chaos du Nigéria, tiraillé entre un passé aux traditions bouleversées par le colonialisme et un présent marqué par la corruption et l’incurie d’élites prédatrices.

En particulier, l’ouvrage, en langue anglaise, paru chez Yale University Press, inspiré de diverses conférences, est désormais accessible en langue française grâce à Présence africaine, avec une traduction de Laurent VANNINI. En effet, ce nouveau livre «Par-delà l’esthétique», avec une part autobiographique, reflétant la grande passion de Wole SOYINKA pour la collection d’art, est inspiré de deux voyages au Sénégal, en 2010, et de diverses conférences. «Mêlant récit intime et amusé de son obsession pour les «artiquités», Wole Soyinka nous embarque dans un voyage temporel, géographique et politique dans les Afriques réelles», écrit l’éditeur, Présence africaine. Dans ce livre, «Par-là l’esthétique», Wole SOYINKA, fortement inspiré des religions, des traditions africaines, de son spiritualisme et de son animisme, et de l’art africain, dans sa plume acérée, se fait un ardent défenseur de la culture et de l’identité africaines, contre les religions étrangères, mais aussi l’attitude irresponsable des gouvernements africains, source de prédation et de déshumanisation.

D’une part, Wole SOYINKA, loin de ranger ses gants, toujours en lutte, mais refusant tout mandat politique, s’insurge, en homme d’art, contre l’attitude des gouvernements africains, source de dévalorisation de l’identité et de la culture africaines. Wole SOYINKA relate l’inauguration par le président sénégalais Abdoulaye WADE (Voir mon article, Médiapart, 18 janvier 2024) du «Monument de la Renaissance à Dakar», édifié sur les Mamelles de Dakar, à Ouakam, entre 2008 et 2010 par «Mansudae Overseas Project», une compagnie nord-coréenne à la base du monument «Tiglachin» à Addis-Abeba. «Il s’agit bien d’une statue colossale, le nec plus ultra du monumentalisme. Il est également remarquable qu’aucun aspect de sa figuration sculpturale ne présente la moindre ressemblance avec quoi que ce soit d’africain ni en termes de concept, de style, de forme, ni même de geste. Les réponses esthétiques sont certes essentiellement subjectives, mais toute subjectivité implique un héritage de rencontres antérieures ou d’immersion dans la tradition qui induit une comparaison instantanée», dit Wole SOYINKA. Le prix Nobel de littérature raconte sa rencontre, le 22 décembre 2018, avec le sculpteur et académicien sénégalais, Ousmane SOW (Voir mon article, Médiapart, 12 novembre 2022), pressenti, initialement, à l’origine pour édifier le projet de «Monument de la Renaissance», mais Me Abdoulaye WADE a préféré les Coréens. À l’atelier-galerie d’art d’Ousmane SOW, «un artiste dont l’alter ego européen, le plus proche serait, je l’affirme avec une certaine assurance, Auguste Rodin. Alors que j’étais guidé dans l’atelier, mes yeux s’arrêtèrent sur un ensemble de trois statues, une ébauche manifestement, qui paraissait minuscules à côté des œuvres aux dimensions gigantesques plus coutumières d’Ousmane Sow. Involontairement, je laissai sortir une «obscénité censurée», écrit Wole SOYINKA. «Je m’interroge : que signifie le rejet d’une tradition africaine de la monumentalité ? En commandant une œuvre à un atelier nord-coréen, quelles étaient les aspirations politiques des dirigeants africains ?» écrit Wole SOYINKA.

D’autre part, dans «Par-delà l’esthétique», Wole SOYINKA estime que le Christianisme et l’Islam ont été les agents d’un lent processus d’acculturation et d’assimilation lente des Africains, dans un contexte où l’art des déconnecté de nos valeurs ancestrales. Ainsi, le musée de l’indépendance à Windhoek sur l’histoire de la Namibie, ainsi que le «Heroes’ Acre», s’inspirant du cimetière des martyrs révolutionnaires coréens, au sommet de ce monument, la statue de Sam NUJOMA, comme les autres sensées être identifiables, et, sont donc délibérément méconnaissables. Personne ne «ressemble» à une personne africaine, écrit Wole SOYINKA. En Éthiopie, sous le DERG, gouvernement provisoire socialiste de 1974 à 1987, d’obédience communiste, l’art, s’efforçant de se détacher de l’histoire impériale, curieusement pastichait une esthétique pseudo-marxiste de la Russie.

C’est ici, l’occasion d’adresser mes déférents hommages à Mesdames Christiane Yandé DIOP, Suzanne DIOP, Marie-Aida DIOP et Marie KATTIE de Présence africaine, mes chaleureuses salutations à mon ami et frère, Adrien DIOP et à Romuald FONKUA, professeur la Sorbonne et président du Comité scientifique de Présence africaine.

Librairie et maison d’édition, Présence africaine, 25 bis, rue des écoles, 75005 Paris, métro, Luxembourg ou Saint-Michel.

Références bibliographiques

I - Le livre de Wole SOYINKA paru chez Présence africaine

SOYINKA (Wole), Par-delà l’esthétique. Usage, abus et dissonance dans les traditions artistiques africaines, traduction de Laurent Vannini, Paris, Présence africaine, 2025, 169 pages ;

SOYINKA (Wole), Beyond Aesthetics : Use, Abuse, and Dissonance in African Art Traditions Yale University Press, 2020, 160 pages.

II – Les autres contributions de Wolé SOYKINKA

SOYINKA (Wole), Aké, les années d’enfance, Paris, Belfond, 1986, traduction et préface d’Etienne Galle, 312 pages ;

SOYINKA (Wole), Art, Dialogue and Outrage : Essays on Literature and Culture, Ibadan : New Horn Press, 1988, 344 pages ;

SOYINKA (Wole), Baabou, Roi, Paris, Actes Sud Papiers, 2000, 108 pages ;

SOYINKA (Wole), Cet homme est mort, Paris, Belfond, 1986, 281 pages ;

SOYINKA (Wole), Climat de peur, Paris, Actes Sud, 2005, 147 pages ;

SOYINKA (Wole), Cycles Sombres, Paris, Silex, 1987, 194 pages ;

SOYINKA (Wole), Du rouge de cam sur les feuilles, Paris, éditions Nouvelles du Sud, 1992, 61 pages ;

SOYINKA (Wole), Fous et spécialistes, Paris, éditions Nouvelles du Sud, 1992, traduction Eliane Saint-André et Claire Forestier-Perguier, 83 pages ;

SOYINKA (Wole), Ibadan, les années pagailles : mémoires 1946-1965, Paris, Actes Sud, 1997, 499 pages ;

SOYINKA (Wole), Idanre and Other Poems, London, Muthuen, 1967, 88 pages ;

SOYINKA (Wole), Il te faut partir à l’aube, Paris, Actes Sud, 2007, traduction Etienne Galle 649 pages ;

SOYINKA (Wole), Isara : périple autour de mon père, Paris, Belfond, 1993, traduction Etienne Galle, 369 pages ;

SOYINKA (Wole), La danse de la forêt, Paris, l’Harmattan, 2000, 150 pages ;

SOYINKA (Wole), La mort de l’écuyer du Roi, Paris, Hâtier, Collection Monde Noir, 2002, 111 pages ;

SOYINKA (Wole), La récolte de Kongi, Paris, Silex, 1988, traduction Eliane Saint-André et Claire Forestier-Perguier, 86 pages ;

SOYINKA (Wole), La route, Paris, Hâtier, 1988, 159 pages ;

SOYINKA (Wole), Le lion et la perle, Paris, éditions Clé, 1996, 93 pages ;

SOYINKA (Wole), Les Bacchantes d’Euripide, Paris, Silex, 1989, traduction Etienne Galle, 96 pages ;

SOYINKA (Wole), Les gens des marais, suivi de un sang fort et les tribulations de frère Jéro, traduction Elisabeth Janvier, Paris, l’Harmattan, 1986, 150 pages ;

SOYINKA (Wole), Les interprètes, Paris, Présence Africaine, 1991, 413 pages ;

SOYINKA (Wole), Myth, Literature and the African World, Cambridge, Cambridge University Press, 1990, 168 pages ;

SOYINKA (Wole), Ogun Abibiman, London, Rex Collings, 1976, 24 pages ;

SOYINKA (Wole), Que ce passé parle à son présent discours à Stockholm, Paris, Belfond, traduction par Etienne Galle, 1987, 54 pages ;

SOYINKA (Wole), Requiem pour un futurologue, Paris, éditions Nouvelles du Sud, 1992, 79 pages ;

SOYINKA (Wole), Tania Léon, Le maléfice des jacinthes, Genève, Zoé, traduction Gérard Rendal, collection littérature d’Afrique, 123 pages ;

SOYINKA (Wole), The Burden of Memory, the Muse of Forgiveness, London, Oxford University Press, 1998, 224 pages ;

SOYINKA (Wole), Une saison d’anomie, traduction d’Etienne Galle, Paris, LGF, 1993, 382 pages.

Paris, le 27 mars 2025 par Amadou Bal BA

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.