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«Marine LE PEN, coupable de détournements deniers publics, condamnée à 4 ans de prison avec 2 aménageables en bracelet électronique, 5 ans d’inéligibilité assortis d’une exécution provisoire, donc elle est potentiellement éliminée pour la présidentielle de 2027.Délinquante, les mains sales, la tête basse ! Quelles incidences sur la survie du gouvernement BAYROU ne tenant qu'à la bienveillance du RN ?» Amadou Bal BA
Marine LE PEN a été condamnée par le Tribunal correctionnel de Paris, le 31 mars 2025, reconnue coupable de détournements deniers publics, 4 ans d’emprisonnement, dont deux pouvant être aménagés en bracelet électronique, avec une inéligibilité pendant 5 ans, mais assortie d’une exécution provisoire ; à ce stade, elle ne pourra donc pas participer à la présidentielle de 2027. Si l’exécution provisoire a été prononcée, c'est que Marine LE PEN a été constamment dans le déni, de son infraction ; il y a donc un risque de réitération des faits ou une récidive. Sa défense ayant merdouillé, en première instance, l’appel, s’il est formé valablement, dans un délai de 10 jours, ce recours étant dévolutif. En effet, à la Cour d’appel de Paris, tout est repris à zéro, du moins pour les chefs de jugement critiqués. En effet, en appel, le juge dispose de larges pouvoirs, très complets : de confirmer ou d’infirmer le jugement de première instance, notamment de relaxer, sans condamnation, de prononcer ou non une condamnation plus douce, assortie ou non d’inéligibilité, ou même aggraver la peine ; ce qui est de l’ordre du possible. Dans cette affaire, c’est plus de 4 millions d’euros qui ont été détournés, en emplois fictifs concernant, dans cette entreprise familiale, sa sœur, sa belle-sœur, son compagnon, un chauffeur ou un major d’homme. Le salaire, à mi-temps, est de 5 000 euros, et à temps plein, de 10 000 €. Pour les autres, Marine LE PEN avait toujours, jusqu’ici, réclamé l’inéligibilité à vie. Cherchez l’erreur !
En raison de cette première instance, Marine LE PEN, maintenant une délinquante, se retranche derrière la théorie du complot ou du gouvernement des juges. En effet, Marine LE PEN, contrairement à une tradition républicaine, s’est en prise directement à la Présidente du Tribunal correctionnel, de façon victimaire, vindicative et déplacée. «J’ai parfaitement compris ce que la Présidente expliquait : m’empêcher de me présenter et d’être élue à l’élection présidentielle. Ce qu’elle fait là, ce qu’elle dit : «Je vais vous rendre inéligible, tout de suite, et je le fais pour vous empêcher d’être présidente de la République», dit-elle, le 31 mars 2025, sur TF1. Dans les réseaux sociaux, il y a eu même des menaces de mort à l’encontre de certains magistrats, une fascisation, une trumpisation de la vie politique française. «Depuis hier (le 31 mars 2025), des responsables politiques se succèdent pour commenter, voire pour condamner cette décision. Certaines autorités de l’État évoquent même «un trouble». Mettre en cause une décision de justice, c’est manquer aux principes élémentaires de la séparation des pouvoirs et de l’État de droit. Mettre en cause individuellement des magistrats, c’est exercer sur eux une pression inacceptable, qui appelle les condamnations les plus fermes. Non, ces femmes et ces hommes ne sont pas des agents d’un «système», mais des juges impartiaux, dont notre République a besoin», dit Boris VALLAUD, du Parti socialiste, dans son interpellation du Premier ministre, François BAYROU, à l’Assemblée nationale.
Un premier sondage donne raison, à 57%, aux Juges, qui n’ont fait qu’appliquer la loi. Devant un problème flagrant de délinquance, de financière, d’éthique et de responsabilité, à la suite d’une loi (article 131-26 du CP) édictée après l’affaire Jérôme CAHUZAC (Condamné, le 8 décembre 2016, en première instance à trois ans de prison ferme et cinq ans d'inéligibilité), une nouvelle réglementation, validée par le Conseil constitutionnel. En effet, les assistants parlementaires RN ne travaillaient pas pour les euros députés, mais pour le parti Rassemblement national (R.N). Ce sont des contrats fictifs, et non des emplois fictifs, sans enrichissement. Par conséquent, c’est un système de détournements de deniers publics, de magouilles incitant le juge à ordonner l'exécution provisoire et donc l'inéligibilité de Marine LE PEN aux présidentielles de 2027. La théorie du complot avait été largement développée en son temps par François FILLON, dans l'affaire de ses costumes et de l'emploi fictif de son épouse à la revue des Deux-mondes. Marine LE PEN, qui est avocate, le sait «Nemo auditur propiam turpitudinem allegans», disent les juristes ou «Nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude». La loi est dure, mais c'est la loi, ou «Dura Lex, Sed Lex».
Tous les partis, de gauche ou de droite, ont été confrontés à la justice, lorsque des faits délictueux ont été commis. Le RN n’est pas victime, mais un coupable. Jadis, le RN réclamait, sans cesse, même une inéligibilité à vie. En effet, Marine LE PEN a toujours exigé des peines sévères à l’égard des politiques ayant tapé dans la caisse. L’indépendance de la justice et l’État de droit, se fondent des juges dont l’indépendance est garantie par le Conseil supérieur de la magistrature. Après les précédents de l'affaire Urba de 1989, de financement par des marchés occultes du parti socialiste, Bygmalion et les différentes casseroles de Paul BISMUTH, une partie de classe politique considère que cette caste serait au-dessus des lois. Cependant, ce sont des fonds publics, notre argent à nous tous. On ne cesse pas, à coups d'article 49-3, de nous bassiner sur la contrainte budgétaire. Raison de plus, pour la classe politique, d’être exigeante et vertueuse dans le maniement des fonds publics. En effet, en cas de déficit, ce sont les autres citoyens qui vont payer pour ces délinquants en col blanc, notamment à travers une fiscalité indirecte, touchant même les plus modestes.
Le R.N. fustige, sans arrêt, la délinquance à la fois des racisés et de la classe politique, et surtout un prétendu laxisme de la justice, n’a cessé de réclamer des peines exemplaires, plus sévères, des peines planchers ou exécutoires, même pour les mineurs. En particulier, dans la posture d’antisystème, revendiquant, exclusivement, au sein de la classe politique l’honnêteté, la droiture et l’intégrité, la «tête haute et les mains propres» disait Jean-Marie LE PEN (Voir mon article, Médiapart, 7 janvier 2025), Marine LE PEN, devenue maintenant une délinquante, a les «mains sales, la tête basse», en référence du titre de la une du journal l’Humanité. En effet, Marine LE PEN se vantait, jusqu’ici, d’être la cheffe du «seul parti honnête» et de porter une «veste immaculée ; ce qui n'est pas le cas des autres» qui n’a jamais été éclaboussée par les affaires, avait-elle dit le 3 avril 2013, à Charleville-Mézières, dans les Ardennes. Or, dans ce procès des assistants parlementaires, l’image du R.N est sérieusement écornée. En effet, la petite entreprise avait vendu l'image de la haute probité et dans ses calomnies relayées par la presse des forces du Chaos, notamment de Vincent BOLLORÉ, que les racisés seraient tous, sans distinction, des délinquants potentiels et des fraudeurs aux avantages sociaux.
Dans ce poids deux mesures, un étranger à la moindre démarche administrative, à l'hôpital public, ou en allant chercher une baguette de pain, sans sa pièce d'identité, est susceptible d'être humilié ou arrêté. Moussa DARMANIN et Bruno RETAILLEAU exigeaient une criminalisation du séjour irrégulier et veulent mettre en prison les mineurs à partir de 15 ans, et allonger les délais de rétention.
Cependant, et depuis les affaires François FILLON, qui parlait de «cabinet noir», ou Claude GUÉANT, qui touchait des primes en liquide, on se rend compte que nos gouvernants, trop exigeants à l'égard des racisés, veulent se placer au-dessus des lois républicaines, par un talisman d’immunité. Les Français, dans des injonctions contradictoires, pensent que les hommes politiques seraient immunisés, mais s’ils sont condamnés, ce serait un scandale démocratique. «Les hommes politiques proclament leur attachement à la Justice, sauf quand cela les touche de trop près», dit François MOLINS, un magistrat, un Procureur de la République. Je me réjouis et félicite la justice française qui s'est montrée indépendante et a sifflé la fin de la récréation. Prendre indûment l'argent public c'est du vol et donc c'est grave. Le RN parle de coup d’État électoral, des manifestations populaires et pacifiques. François BAYROU, Premier ministre, gardien de la loi, avocat de la «submersion migratoire», se dit «troublé» par cette décision de justice. Devant les réactions outrancières en interne ou à l’international, le Conseil supérieur de la magistrature, un fait sans précédent, a exprimé, dans un communiqué, son «inquiétude face aux réactions virulentes de nature à remettre en cause gravement l’indépendance de l’autorité judiciaire. Les menaces visant personnellement les magistrats en charge du dossier, tout comme les prises de parole de responsables politiques sur le bien-fondé des poursuites ou de la condamnation, en particulier au cours du délibéré, ne peuvent être acceptées dans une société démocratique», écrit le CSM.
En 2016, le RN avait échappé, selon Laurent FARGUES, dans «le procès interdit de Marine Le Pen», à diverses enquêtes du Parquet financier, par son usage massif du cash, et à une société-écran, mais cependant, ce nouveau procès des assistants parlementaires, est un caillou dans la chaussure de Marine LE PEN, dans sa course, presque sans faute, «aux portes de l’Élysée» suivant le titre d’un ouvrage d’Aquilino MORELLE.
Marine LE PEN avait réussi la dédiabolisation de son parti, et n’avait cessé de grimper dans les sondages, jusqu’à devenir le premier parti de France après la dissolution à la Chirac de juin 2024. Depuis, le RN est devenu le garant et la caution du gouvernement de François BAYROU, dont la survie ne tient qu’à la bienveillance du RN. Cette condamnation assortie d’une inéligibilité, aux présidentielles de 2027, aura-t-il des incidences sur ce jeu politique ayant abouti à un coup d’État à la Bonaparte, une vraie forfaiture digne de MAC-MAHON ? Ce n’est pas encore la Tabaski, mais le RN se laissera-t-il égorger comme un mouton ?
Quelles incidences sur le jeu politique ?
Après avoir volé la victoire du Front populaire, le président MACRON doit bien soupirer par rapport à sa fin de mandat chaotique, après sa dissolution et la censure du gouvernement de Michel BARNIER. Même s’il n’est pas l’instigateur de cette décision de justice, je dois dire que le président MACRON, qui doit avoir un bon marabout de Barbès, est le grand gagnant provisoire de ce séisme politique. Mais jusqu’à quand ?
Dans cette trumpisation de la vie politique, le RN s’attaque frontalement à l’État de droit. «Ils auront peut-être notre peau, mais nous la vendrons chère», menace déjà Marine LE PEN. En effet, le débat judiciaire s’est transporté devant l’Assemblée nationale. Les partisans du RN estiment que la France ne serait plus une démocratie. «Ce n’est pas la justice, mais de la politique, une peine de mort politique. C’est un procès politique. Une dictature des juges. Il y a des tyrannies qui enferment leurs opposants, il y a désormais des juges tyrans qui exécutent l’État de droit en place publique». Eric CIOTTI, dès lors que l’exécution s’applique aux politiques, il faudrait supprimer cette disposition, en matière d’inéligibilité. François BAYROU, le théoricien de la «submersion migratoire» dont le gouvernement ne tient qu’à la bienveillance du RN, se déclarant «troublé» par ce jugement, se dit, non pas en qualité de Premier ministre, comme un citoyen, un grand écart, a déclaré à l’Assemblée nationale : «Il est vrai qu’il y a des interrogations. En principe de droit, toute décision lourde et grave en matière pénale devrait être susceptible d’appel. Il se trouve que le seul point de l’exécution provisoire fait que des décisions lourdes et graves ne sont pas susceptibles de recours». Moussa DARMANIN, Garde des Sceaux, ministre de la justice, a déjà fait une concession au RN, en appelant audiencement rapide devant la Cour d’appel «Je souhaite personnellement que si Mme Le Pen interjette recours, ce délai de jugement nouveau à la Cour d’appel de Paris puisse être organisé dans un délai le plus raisonnable possible», dit-il. Cependant, le Garde des Sceaux, Moussa DARMANIN a également défendu, de façon vigoureuse, l’indépendance de la Justice, socle de l’État de droit «En démocratie, il est inacceptable que des personnes puissent menacer physiquement des magistrats ; il me semble que quand on réclame l’État de droit, ça vaut pour tous les magistrats libres et indépendants de ce pays», dit-il.
En définitive, dans un écart, frisant la déchirure, le gouvernement ménage le chou et la chèvre, afin d’éviter la censure du RN. Ce tremblement de terre politique pourrait provoquer une dissolution, ou la promotion de Bruno RETAILLEAU, une pâle photocopie du R.N, aux prochaines présidentielles. En tout cas, dans ce contexte de séisme politique, les municipales de 2026, placées justes avant les présidentielles de 2027, et je le dis souvent, seront un grand moment de Vérité, pour l’avenir du bien-vivre ensemble, de la République, de l’État de droit et de la démocratie en France.
Marine LE PEN joue avec le feu en appelant à des manifestations, qui se veulent «pacifistes», contre une décision de justice. Dans un contexte de lynchage et de menaces contre les juges, les dérapages sont toujours possibles et le RN, qui entre dans la sédition, devra en assumer toutes les conséquences.
Sur le plan international, les forces du chaos complotistes, aussi bien en Amérique qu’en Europe, ont pris fait et cause pour Marine LE PEN «La droite réactionnaire, en essayant de créer une internationale illibérale, a offert un plan de bataille tout trouvé aux défenseurs de la démocratie», écrit The Guardian. Cette stratégie, dans un but de jeter l’opprobre, sur la justice, pour une dirigeante prise la main dans le sac n’est pas du goût des forces du progrès «Lorsqu’une formation politique s’emploie à jeter le discrédit sur les institutions judiciaires d’un pays démocratique, afin d’échapper à ses responsabilités pénales, au mépris de la vérité et du bien commun, le mal est fait et s’avère souvent irréparable», écrit El Pais. En effet, «calomnie, calomnie, il en restera toujours quelque chose», disait BEAUMARCHAIS.
Références bibliographiques
ALDUY (Cécile) WAHNICH (Stéphane), Marine Le Pen prise au mot, Paris, Seuil, 2015, 320 pages ;
BA (Amadou, Bal), «Jean-Marie Le Pen (1928-2025), le diable est mort», Médiapart, 7 janvier 2025 ;
Conseil constitutionnel, saisis par la chambre criminelle de la Cour de cassation, décision n°2016-546 QPC, du 24 juin 2016, Jérôme CAHUZAC, à propos de l’article 131-26 du Code prévoyant désormais, et notamment la déchéance des droits civiques pour les infractions financières ;
FARGUES (Laurent), Le procès interdit de Marine Le Pen. Enquête sur la «machine à cash» du RN, Paris, First éditions, 2017, 224 pages ;
MORELLE (Aquilino), La parabole des aveugles : Marine Le Pen aux portes de l’Élysée, Paris, Grasset, 2023, 288 pages.
Paris, le 31 mars 2025 par Amadou Bal BA