Victoria

Ça fait un bail que je me suis pas engouffrée dans le RER de ce côté-là. Je devrais la croiser la môme.
Après avoir vérifié le contenu de mon porte-monnaie, j’en sors, rassurée, une pièce de deux euros que je garde en main.
J’hésite, elle se tient un peu plus loin qu’il y a quelque temps… Longtemps. Elle semble douter elle aussi à mon approche mais me reconnaît assez vite. Quand elle s’avance pour me faire la bise, j’esquive. J’ai une crève carabinée, c’est pas le moment de lui refiler.
Son vocabulaire s’est étoffé depuis le temps. Elle comprend mes questions et y répond.
Comment va sa petite que je l’ai vue porter ? Quel âge a-t-elle maintenant ? Comment s’appelle-t-elle déjà ?
Elle a quatre ans. Elle va bien. Son nom, c’est Victoria.
Elle, elle en a marre de quémander dans le froid, de ne pas avoir ses papelards. Elle voudrait que ses mômes aillent à l’école…
Ses mômes ?
Oui, elle a un fiston aussi, de 12 ans. Comme le mien.
Je n’ai pas retenu son prénom à lui, faudra que je lui redemande.
Enfin, ils sont au chaud les p’tiots et ils vont bien.
Je lui frictionne l’épaule et lui dis courage, en lui refilant ma pièce.
J’ai oublié de lui demander son nom à elle.
Faudra que je repasse.