En opposition sensible avec celle avec son prédécesseur, l’image de François Hollande était restée jusqu’à présent relativement lisse. Limitée à quelques tentatives peu vigoureuses, la caricature ne semblait pas réussir à accrocher un personnage insaisissable.
La photo du portrait officiel a fait entrer François Hollande dans la satire par la grande porte. Comme pour la réception de l’affiche “La France forte”, on ne peut qu’être frappé de la vivacité de l’accueil public, qui a jugé sans concession la proposition de Depardon.

Choisi pour sa renommée plutôt que pour sa maîtrise du genre du portrait, le photographe est un auteur inégal. Comme le montrent les images du making-of, celui-ci a tenté d’animer la pesante convention de l’effigie officielle, en essayant d’y inscrire la dynamique d’une marche en avant.
L’idée était audacieuse, mais force est de constater que l’effet est raté. Hollande n’est pas un top-model habitué à défiler sous les sunlights, son allure est empruntée, sa posture peu naturelle. Au lieu d’un mouvement, on perçoit un étrange arrêt sur image.
De plus, le photographe a voulu imprimer sa marque de documentariste par un subtil jeu d’ombre “naturelle”. Malheureusement, appliquée à une image destinée au grand public, cette habilité pour galerie d’art la fait ressembler à une photo amateur ratée.
Il y a des portraits qui appellent irrésistiblement le coup de crayon, la moustache vengeresse. A trop vouloir signer l’image, Depardon est passé à côté de l’exercice. La réception du web est sans appel. Soulignée par des soucoupes volantes ou des éléphants, sa bizarrerie excite la verve des commentateurs.
Comme pour la France forte, la satire, dûment recyclée par plusieurs sites de presse, pollue en temps réel l’annonce officielle. La plupart des détournements sont postés sur Twitter et Facebook avant même la présentation, prévue pour 16h, forçant leMonde.fr à avancer la publication de son billet.
Après la pluie de l’investiture, Hollande a eu son baptême du mème. De quoi réjouir un président plus que jamais ordinaire – pour ne pas dire weirdo.
(Billet initialement publié sur l'Atelier des icônes.)