Le jeûne est reconnu en médecine conventionnelle comme adjuvant aux traitements par chimiothérapie pour accroître leur efficacité mais également pour alléger leurs effets indésirables, tels que troubles digestifs, perte de cheveux, etc. Cependant, il manque d’études en plus grand nombre pour répondre à la question de savoir si le jeûne affaiblit les cellules cancéreuses, grâce ou malgré, la chimiothérapie. Citons l’exemple anecdotique d’une étude publiée en 2015 sur le cas d’une personne atteinte de lymphome folliculaire (en stade assez avancé) soumise au jeûne hydrique avec suivi médical étroit. Au cours du jeûne, on a pu constater une diminution palpable des glandes lymphatiques, confirmée par imagerie. Trois ans plus tard (en 2018), des contrôles en imagerie ont pu confirmer que les glandes lymphatiques étaient redevenues de taille normale (1).
Pour les scientifiques sceptiques, il est important de fournir, autant que possible, des explications mécanistiques. Heureusement, il existe de plus en plus d’études favorisant l’hypothèse métabolique du cancer, ce qui ne correspond pas au paradigme en vigueur en médecine conventionnelle de l’origine génétique pour la plupart des cancers. Que peut faire le patient si la majorité de nos cancers sont dus à notre héritage génétique ou tout simplement à la malchance ? Et si ce postulat était trompeur pour la plupart des cancers ? Le tabagisme, comme l’obésité, augmentent de façon très significative le risque de développer un cancer. Dans ce cas, s’agit-il de malchance ou de manque de bonne hygiène de vie ? Pour certains cancers (environ 5% de tous les cancers), il existe des facteurs génétiques prédisposants (2). Cependant, et suite à la découverte de l’épigénétique, la science nous informe que nous ne sommes pas aussi soumis à nos gènes que nous pourrions le penser, puisqu’il est possible de modifier le rôle de nos « mauvais » gènes par le biais d’une meilleure prise en charge de notre santé en favorisant la prévention. Pour faire simple, disons que si la génétique est le programme de nos cellules, le métabolisme est la façon dont elles utilisent les nutriments à leur disposition.
L’hypothèse métabolique du cancer a été proposée dans les années 1930 par le chercheur allemand Otto H. Warburg. Il remarqua une concentration anormalement élevée d’acide lactique dans les cellules cancéreuses. Or, cet acide est typiquement le résultat d’une fermentation du glucose. Otto Warburg a aussi formulé l’hypothèse selon laquelle les cellules cancéreuses n’ont pas besoin d’un milieu riche en oxygène pour se développer. Il établit donc un postulat sur la formation, en deux phases, des cellules cancéreuses à partir de cellules normales : d'abord, il se produit un dysfonctionnement de la respiration cellulaire dans les "organes" cellulaires appelés mitochondries ; ensuite, la perte d'énergie qui en résulte s'avère être fatale pour certaines cellules tandis que d'autres s'adaptent en modifiant leur métabolisme mais perdent une partie de leurs caractéristiques (se "dédifférencient") et se multiplient de façon anarchique, devenant ainsi cancéreuses (3).
L’hypothèse métabolique du cancer de Warburg a été reprise à l'orée de ce siècle par plusieurs chercheurs, notamment le Dr Thomas Seyfried aux États-Unis et le Dr Laurent Schwartz en France (4). Si cette hypothèse est juste, des approches métaboliques, c'est-à-dire reposant notamment sur des modifications alimentaires, devraient pouvoir aider à combattre le cancer. Le Dr Seyfried a travaillé sur l’influence du jeûne dans le cadre de l’épilepsie des enfants. C’est dans son service qu’a été étudié aussi le régime cétogène (pauvre en glucides et riche en graisses) de façon concrète et scientifique dans le cadre du cancer (5). Le Dr Seyfried explique que le régime cétogène seul ne suffit pas pour supprimer le cancer. Il faut aussi supprimer la cause de celui-ci : l’inflammation, rétablir le fonctionnement des mitochondries et cibler les voies d’alimentation des cellules cancéreuses et le suivi du traitement métabolique (6).
Dans l’idéal, la recherche médicale s’appuie sur des études dites « essais randomisés contrôlés » pour évaluer de façon rigoureuse les effets bénéfiques et néfastes d’approches thérapeutiques (7). Dans le cas du cancer, il est possible d’appliquer ce principe pour faire une comparaison entre deux traitements conventionnels impliquant la chimiothérapie. Cependant, il est plus difficile d’appliquer ce principe aux traitements métaboliques, notamment vu le manque d’investissement de la part de l’industrie pharmaceutique. Pour l’instant, les preuves de l’efficacité des traitements métaboliques (en combinaison avec des traitements conventionnels ou tout seuls) restent empiriques, basés sur l’expérience et l’observation des patients.
Les preuves empiriques s’accumulent de plus en plus et devront atteindre une « masse critique » pour faire basculer le paradigme du cancer comme maladie génétique vers un nouveau paradigme, celui d’une maladie métabolique. Le fait que les patients souhaitant suivre un traitement métabolique sont souvent des cas considérés comme étant « désespérés » par la médecine conventionnelle, puisque inopérables ou réfractaires aux traitements classiques (chirurgie, chimiothérapie, radiothérapie) et qui ensuite racontent leur parcours plusieurs années plus tard, fait partie du poids des preuves qui devrait nous inciter à essayer de mieux comprendre les traitements métaboliques.
Avertissement : cette tribune est proposée uniquement en tant qu’information et en aucun cas ne remplace l’avis d’un professionnel de santé.
Références bibliographiques
- Follow-up of water-only fasting and an exclusively plant food diet in the management of stage IIIa, low-grade follicular lymphoma - PMC (nih.gov)
- André Ménache écrit à l'association de recherche sur le cancer CRUK (antidote-europe.eu)
- L’effet Warburg - De la théorie du cancer aux applications thérapeutiques en cancérologie | médecine/sciences (medecinesciences.org)
- Tout comprendre sur le traitement métabolique du Dr Laurent Schwartz – Blooness
- Cancer as a metabolic disease | Nutrition & Metabolism (springer.com)
- Effect of fasting on cancer: A narrative review of scientific evidence - PMC (nih.gov)
- Essai randomisé contrôlé — Wikipédia (wikipedia.org)