Le 3 décembre, journée internationale du handicap : voici 4 solutions pour qu’advienne enfin une société inclusive !
J’ai fondé Droit Pluriel, association mobilisée pour l’égalité des droits de toutes et tous. Engagée depuis vingt ans sur ces questions, je constate comme chacun que les choses avancent très peu.
Les changements arriveront lorsqu’il sera compris que le handicap est un sujet social dont tout le monde doit s’emparer au même titre que la lutte contre le racisme ou l’égalité femmes/hommes.
Voici donc quelques pratiques nouvelles à adopter au quotidien.
- Penser le « nous » inclusif.
Formatrice, je démarre toutes mes interventions par : « Avez-vous des besoins en termes d’accessibilité ? »
Quand on sait que 12 millions de personnes en France, une sur six, sont en situation de handicap, on ne peut présupposer que tout le monde entend, s’exprime, voit, se déplace sans difficulté… La surdité, la malvoyance, les troubles psychiques ou du spectre autistique ne se devinent pas : 80% des situations de handicap sont invisibles. Mais l’image du handicap est si dévalorisante que la personne concernée choisira souvent de se taire et de dissimuler ses difficultés.
En mention sur les formulaires de contact, les sites internet ou affichée dans les salles d’attente, cette simple phrase : « Merci d’indiquer vos besoins en termes d’accessibilité » autorise l’autre à demander ces petits gestes, cette attention supplémentaire ou cet aménagement sans crainte de se voir opposer un refus.
Pour affirmer votre prise en compte effective du handicap et votre volonté inclusive, il suffit de poser comme normale l’accessibilité
- Parler d’accessibilité et non de handicap.
Dans les dictionnaires, en 2021, le handicap a encore pour synonyme l’infériorité. Tous les mots du handicap sont dégradants : je suis « déficiente », « invalide » comme un ticket qu’on jette à la poubelle, j’ai un taux de 80 % d’incapacité... Ce lexique ne fait que me condamner, car il n’apporte à mon interlocuteur aucun élément concernant les moyens de s’adapter à cette situation. Sourde, aveugle, en fauteuil roulant : oui, mais handicapée, à quoi bon ?
Par ailleurs, ce qui importe n’est pas mon dossier médical, mais seulement les solutions d’accessibilité qui permettront de ne pas être entravés dans la relation. Ce qui compte n’est pas de savoir si je suis aveugle ou malvoyante, mais le moyen de me communiquer une information : par écrit, oral, par voie numérique… Interrogez votre interlocuteur sur ce que vous pouvez faire plutôt que sur ce qu’il ne peut pas faire.
- Remplacer la bienveillance par le droit.
Le handicap est la première cause de saisine du Défenseur des droits. Les personnes en situation de handicap, confrontées à un environnement conçu comme si elles n’existaient pas, se heurtent quotidiennement à la discrimination.
Dans cet espace qui leur rappelle sans cesse qu’elles sont des anomalies humaines, elles ont développé la pratique de la débrouille. Elles espèrent toujours se trouver face à la personne sympathique qui ne leur refermera pas la porte au nez.
À cette dépendance quotidienne s’ajoute le fait que, depuis toujours, les personnes en situation de handicap sont prises en charge : c’est-à-dire que d’autres agissent pour elles. Elles sont tellement dépossédées de leur autonomie que se défendre, se révolter devant l’inaccessibilité, l’inégalité ou même la violence n’a rien de naturel. 4 femmes sur 5 en situation de handicap sont victimes de violences. Mais comment porter plainte ? Au commissariat, on leur dira de revenir lorsqu’il y aura un interprète en langue des signes...
Pour que l’égalité soit effective, il est urgent de mettre le droit au cœur de la vie de tous : ouvrons des ateliers d’initiation au droit et des permanences juridiques dans les écoles, les institutions fermées, les établissements médico-sociaux…
- Se former : maitriser des réponses pratiques.
Les campagnes autour du thème « Changeons de regard sur le handicap ! » ont fait leur temps.
Comment renverser ses préjugés sans les informations qui permettent d’envisager autrement une situation ? Pour comprendre qu’il est possible d’être paralysé, porteur de trisomie 21 ou aveugle et en même temps, autonome, parent et électeur, il faut connaître ces situations, leur compensation individuelle et les solutions d’accessibilité.
Ces pistes sont des clés pratiques et simples que chacun doit s’approprier afin que l’an prochain, lors de la 30e année internationale du handicap, on puisse se dire enfin que les choses commencent à changer.