Mais c'est qui, ce Jésus ?
Pour Hérode, le roitelet de Galilée de l'époque, qui n'a pas la conscience tranquille d'avoir fait exécuter Jean Baptiste, c'est le fantôme de ce dernier qui est venu s'associer avec Jésus, c'est comme ça qu'il peut faire tous ces miracles.
Pour les fans de Jésus (ceux qu'on appelle ses "disciples"), quelle que soit la source de ces mêmes miracles, ils signifient en tout cas que Jésus est ce Messie que tous espèrent, celui qui va en premier chasser les romains de leur pays, avant de restaurer la royauté légitime des descendants de David.
Quand Jésus meurt, et en plus de la mort la plus honteuse qui pouvait s'imaginer, c'est la cata ! Tout s'écroule. Seul celui qui va devenir l'évangéliste Jean remarque quelque chose dans le tombeau qui, curieusement, a été trouvé vide : il remarque que le linceul qui entourait le corps repose parfaitement à plat à sa place ; tout semble indiquer que le corps s'est comme volatilisé de lui-même, de l'intérieur des linges. Et il précise dans son évangile que, c'est alors que "il vit, et il crut".
Il s'est passé quelque chose de tout-à-fait singulier, dont témoigne d'ailleurs notamment le linceul de Turin. Et cela change beaucoup de choses pour ces très proches de Jésus, qui commencent alors à relever la tête. Certes, l'idée qu'ils s'étaient faite de ce que devait être un Messie a changé, mais cet évènement signifie forcément que Jésus a bénéficié d'un traitement de faveur exceptionnel de la part de Dieu, et on peut donc dire qu'il est quand même le Messie, même si ce mot n'a plus le même sens qu'avant.
Leurs premières prédications, telles qu'on peut les lire dans les Actes des Apôtres, ne disent d'ailleurs rien d'autre : ce Jésus que vous avez crucifié, Dieu l'a ressuscité, c'est donc bien lui le Messie. À ce moment-là, il n'est pas question d'en dire plus sur lui, et certainement pas qu'il serait Dieu lui-même. Pour cela, il faudra attendre déjà la venue de Paul, ce mystique qui n'a pas connu Jésus "en chair et en os", mais s'inspirera de ses visions pour lui bâtir toute une théologie, dont apparemment le principal intéressé n'avait pas vraiment idée de son vivant.
Si on se fie, en effet, aux évangiles, Jésus ne semble pas avoir jamais affirmé lui-même qu'il serait Dieu en personne. Au contraire, on le voit sans cesse renvoyer ses interlocuteurs vers Dieu, mais vers un Dieu dont il veut changer l'image, un Dieu qui serait tellement proche de nous, et même présent en nous, que le nom qui lui conviendrait le mieux serait peut-être celui de "papa" ! Voilà sans doute toute l'originalité de Jésus par rapport à ses coreligionnaires : il témoigne d'un Dieu dont il éprouve la présence en lui, et dont il est convaincu qu'il en va de même pour tout un chacun.
Ce qui ne veut pas dire que la théologie chrétienne qui s'est développée par la suite soit forcément erronée, évidemment...:)

Le roi Hérode entend
que le nom de Jésus est devenu fameux.
Ils disaient :
« Jean, celui qui baptise,
est réveillé d'entre les morts :
aussi les puissances opèrent en lui. »
D'autres disaient :
« Il est Élie ! »
D'autres disaient :
« Un prophète, comme l'un des prophètes. »
Hérode entendait, il disait :
« Celui que moi, j'ai décapité,
Jean,
c'est lui qui a été réveillé ! »
Car c'était lui, Hérode,
qui avait envoyé saisir Jean,
il l'avait lié, en prison,
à cause d'Hérodiade, la femme de Philippe, son frère :
il s'était marié avec elle.
Car Jean disait à Hérode :
« Il ne t'est pas permis
d'avoir la femme de ton frère ! »
Hérodiade en avait contre lui : elle voulait le tuer,
et ne le pouvait.
Car Hérode craignait Jean :
le sachant homme juste et saint, il le protégeait.
Quand il l'entendait, il était fort perplexe,
et volontiers il l'entendait.
Arrive un jour une occasion :
Hérode, à son anniversaire,
fait un dîner pour ses grands,
les officiers et les premiers de Galilée.
Elle entre, la fille de cette Hérodiade, et danse,
elle charme Hérode et les commensaux.
Le roi dit à la jeune fille :
« Demande-moi ce que tu veux, et je te donnerai. »
Et il lui jure :
« Quoi que tu me demandes, je te donnerai,
jusqu'à la moitié de mon royaume. »
Elle sort, dit à sa mère :
« Qu'est-ce que je demande ? »
Elle dit :
« La tête de Jean, celui qui baptise ! »
Elle entre aussitôt, en hâte, auprès du roi,
et demande. Elle dit :
« Je veux que, tout de suite,
tu me donnes, sur un plateau,
la tête de Jean, le baptiseur. »
Le roi devient triste...
À cause des serments et des convives,
il ne veut pas la repousser.
Aussitôt le roi envoie un argousin
et lui commande d'apporter sa tête.
Il s'en va, le décapite dans la prison.
Il apporte sa tête sur un plateau,
et la donne à la jeune fille,
et la jeune fille la donne à sa mère.
Ses disciples l'entendent.
Ils viennent, prennent son cadavre
et le mettent dans un sépulcre.
(Marc 6, 14-29)