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Billet de blog 6 juin 2025

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Toi ! suis-moi !

Quand tu étais plus jeune, tu te ceignais toi-même, et tu te rendais où tu désirais ; mais quand tu sera âgé, tu étendras les mains et un autre te ceindra, et il t'emmènera où tu ne désires pas...

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

On considère généralement que ce questionnement de Pierre par Jésus à trois reprises successives est à mettre en rapport avec le triple reniement, quand à trois reprises aussi Pierre nia connaître Jésus. La coïncidence entre ces deux événements rend effectivement fort probable qu'ils soient liés, mais on remarquera quand même que Jésus, ici, ne formule d'aucune manière le moindre reproche à Pierre, et, à mon avis, ceux qui veulent en voir un qui serait implicite ou sous-entendu feraient mieux d'examiner leur propre conscience, plutôt que d'utiliser ainsi Pierre comme un bouc émissaire chargé de les dédouaner, eux, à bon compte.

Je ne crois pas, en effet, que déjà quand Jésus avait prédit à Pierre qu'il le renierait à trois reprises, il n'y ait eu là le moindre reproche, sinon celui de se faire des illusions sur lui-même en annonçant que jamais il ne l'abandonnerait ; c'étaient ces paroles fanfaronnes sur lesquelles il voulait attirer son attention, mais comment aurait-il pu lui reprocher de n'avoir pu les tenir ? Les autres n'avaient rien dit à ce moment-là, et ils avaient bien fait, puisque eux, c'est dès l'arrestation de Jésus qu'ils l'ont abandonné, qu'ils ont déguerpi et se sont terrés, cachés, avec comme seul projet de fuir dès qu'ils le pourraient Jérusalem et la Judée.

Si donc Pierre s'est retrouvé dans cette situation où, par trois fois, il a été amené à se parjurer en affirmant ne pas connaître Jésus, c'est que lui, au moins, n'a pas fait comme les autres, lui a essayé de suivre son maître au plus près, et c'est ce que Jésus le lui reconnaît par sa question : m'aimes-tu "plus que ceux-ci" ? Oui, Pierre a prouvé dans les faits qu'il aimait Jésus plus que les autres, ou en tout cas plus que les autres Galiléens, car il est vrai qu'il y a aussi le cas du "disciple bien-aimé", celui qui a fait entrer Pierre dans la cour de Hanne, mais pour ce dernier c'était en fait facile, il ne risquait rien, proche de Hanne et même possiblement lui étant apparenté, Judéen, il ne risquait pas ou peu d'être soupçonné de connivence avec Jésus.

En somme, loin de reprocher quoi que ce soit à Pierre, Jésus au contraire le récompense ici d'être effectivement celui qui l'a le plus aimé dans cette situation de danger extrême, celui qui a pris le plus de risques, mais il était normal qu'il ne soit pas encore à ce moment-là capable de sacrifier sa vie, il ne doit donc pas s'en sentir coupable, c'est cela en réalité le but de ce triple questionnement : non, Pierre, je ne te reproche rien parce que tu n'as effectivement rien à te reprocher, et au contraire tu es celui qui m'a été le plus fidèle en ce moment-là crucial, c'est toi qui m'aimes le plus, c'est donc à toi que je confie plus spécialement le souci de prendre soin de tes frères.

Puis vient alors l'invitation à le suivre, et cette fois-ci jusqu'au bout, jusqu'à donner sa vie lui aussi, car maintenant il en sera capable. Ceci ne signifie pas nécessairement que cette fin serait tragique elle aussi ! Devenir dépendant des autres est plus ou moins notre destin à tous, et ne plus vraiment choisir dans quel cadre on vivra de même si justement on se donne aux autres. Le genre de mort par laquelle on finit alors sa vie, c'est la mort d'une vie entièrement donnée, tout simplement, et bien sûr donnée avec bonheur, pas à contre-cœur. Voilà vers quoi et en quoi Jésus invite Pierre, et moi aussi, à le suivre.

Illustration 1

    puis quand ils eurent mangé Jésus dit à Simon-Pierre
« Simon fils de Jean ! m'aimes-tu plus que ceux-ci ? »
    il lui dit
« oui seigneur ! tu sais mon affection pour toi »
    il lui dit
« fais paître mon troupeau ! »

    il lui redit une deuxième fois
« Simon fils de Jean ! m'aimes-tu ? »
    il lui dit
« oui seigneur ! tu sais mon affection pour toi »
    il lui dit
« fais paître mon troupeau ! »

     il lui dit la troisième fois
« Simon fils de Jean ! as-tu de l'affection pour moi ? »
    Pierre fut affligé parce qu'il lui avait dit la troisième fois
« as-tu de l'affection pour moi ? »
    et il lui a dit
« seigneur ! toi tu sais toute chose
tu connais que j'ai de l'affection pour toi »
    Jésus lui dit
« fais paître mon troupeau !
    amen ! amen ! je te dis
quand tu étais plus jeune
    tu te ceignais toi-même
    et tu te rendais où tu désirais
mais quand tu sera âgé
    tu étendras les mains et un autre te ceindra
    et t'emmènera où tu ne désires pas »
et ceci il l'a dit pour signifier
par quelle mort il glorifierait Dieu
    et ayant dit ceci il lui dit
« suis-moi ! »

(Jean 21, 15-19)

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