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Billet de blog 16 août 2014

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Esprit d'enfance

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Billet original : Esprit d'enfance

Alors on lui présente des petits enfants pour qu'il leur impose les mains et prie. Les disciples les rabrouent.  Mais Jésus dit : « Laissez les petits enfants, et ne les empêchez pas de venir à moi ! Car c'est à leurs pareils qu'est le royaume des cieux. » Il leur impose les mains, et s'en va de là.

Matthieu 19, 13-15

Chez Marc, comme chez Matthieu ici, cette péricope sur l'accueil des enfants suit celle que nous avions hier sur le mariage (ou plutôt contre le divorce). On peut y voir un enchaînement logique qui prône le modèle traditionnel de la famille chrétienne, indissolubilité du mariage destiné à engendrer des enfants. Mais nous avions vu hier que cette perspective n'était certainement pas celle de Jésus, ni des premiers chrétiens, qui vivaient, eux, dans la certitude que le Royaume était imminent, Royaume où on ne se marie pas ni ne fait des enfants... Et, ce qui relie plus certainement ces deux épisodes, c'est qu'ils concernent les deux catégories de personnes qui étaient les plus méprisées à l'époque, et dans la société, de Jésus : les femmes et les enfants. Plus encore que de savoir comment Jésus comprenait exactement et spirituellement ce qu'est le mariage, ce fait, lui, est certain à 100 % : il manifestait à l'égard des unes et des autres une attention et un respect plus que surprenants, proprement incompréhensible. On pourrait dire qu'il les considérait comme des personnes à part entière !

Je suis ironique, mais c'est exactement ce dont il s'agit. Ni les femmes, ni les enfants, n'étaient considérés, par les hommes évidemment, comme étant de dignité égale à eux. Ils étaient des êtres inférieurs. Les femmes, parce qu'elles n'avaient pas la capacité d'engendrer ! si, si... ceci peut nous surprendre, mais c'était ainsi. Ils pensaient que c'était l'homme qui produisait la graine d'homme, la femme ne servant qu'à nourrir et protéger la croissance de cette graine. Ainsi, seul l'homme était vraiment à l'image et ressemblance du Dieu créateur. La femme lui était bien sûr une aide dans cette tâche, mais donc seulement complémentaire, subordonnée, subsidiaire presque, et en aucun cas co-créatrice. Dans ces conditions, il est effectivement très surprenant que Jésus ait manifesté un tel accueil aux femmes, les traitant avec exactement autant d'égards que les hommes ! Ce fait milite d'ailleurs pour soutenir que Jésus était bien célibataire, et par choix. Il faut qu'il se soit abstrait de toutes considérations liées à la procréation, pour qu'il ait pu accéder à ce point de vue où il envisageait les unes et les autres sous le seul angle de leur humanité commune. Pourquoi, comment, est-il sorti de ces déterminismes si prégnants étant une autre question.

Mais cette autre attitude surprenante qu'il avait aussi, cette fois à l'égard des enfants, s'explique certainement par les mêmes raisons. N'étant pas déterminé par les considérations qui ne voient en eux que de futurs géniteurs qui prendront un jour le relai de leurs parents pour, à leur tour, etc..., il pouvait s'intéresser à eux pour eux-mêmes, en tant que personnes humaines à part entière, eux aussi. À part entière, et peut-être même plus humaine que les adultes ? On pourrait le penser, à priori, à partir d'une phrase comme "c'est à leurs pareils qu'est le royaume des cieux", ou "si vous ne redevenez comme de petits enfants", et d'autres encore. Mais que voulait-il dire par là ? Ne serait-ce pas simplement que, justement, les enfants, eux, ne sont pas encore pris dans ce processus qui place la procréation au centre des pensées et comportements de tout un chacun, y ordonnant toute leur vie et leurs actions ? En somme, Jésus nous inviterait par là à le rejoindre dans un ailleurs, qui était le sien, mais dont nous aurions tort de le voir comme un univers à la Peter Pan. Jésus ne dit nulle part que les enfants seraient dans le Royaume du simple fait qu'ils sont des enfants ! Ce n'est pas à une régression qu'il nous appelle. La seconde naissance est ici une image bien plus réaliste, qui implique la nécessité de passer par une certaine mort, pour atteindre cet état.

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