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Billet de blog 22 avril 2025

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Qui cherches-tu ?

Il est exceptionnel dans les évangiles que Jésus appelle ses disciples du nom de "frères" ; c'est pourtant ce à quoi il les invite maintenant : à eux de jouer à leur tour, que "son" Père devienne aussi "leur" Père, exactement comme pour lui.

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Cette scène est sans doute trop connue, au point de nous avoir donné l'expression "pleurer comme une Madeleine", qui n'est peut-être pas très gentille, en ce sens qu'elle estime qu'il y aurait des limites à ne pas dépasser, sinon dans l'affliction en elle-même, du moins dans la manifestation de son affliction. C'est vrai que Madeleine nous est décrite comme en proie à un chagrin inconsolable. De là à en conclure que la manifestation dont Jésus la gratifie ne serait qu'un produit de cette entité mirlifique, véritable deus ex machina de tout psychologue en mal d'explication, et que Freud nous a léguée pour notre plus grand malheur : l'Inconscient ?

On notera pourtant que cela semble un trait récurent dans ces différentes apparitions qui nous sont rapportées, que le "ressuscité" ne soit pas immédiatement reconnu et identifié. Que ce soit avec les deux disciples déçus, repartant chez eux en Galilée, et qui n'ouvrent les yeux que quand il leur partage le pain, ou avec ceux déjà revenus en Galilée et qui avaient repris leur métier de pêcheurs, et bien sûr ici avec Madeleine qui l'a quasiment sous son nez et le prend pour le jardinier... Pour cette dernière, il faut que ce soit son nom prononcé par lui, du même ton aimant qu'il devait être le seul à employer pour elle, le seul à lui avoir manifesté un tel amour qu'elle se soit trouvée libérée des démons qui l'entravaient ; c'est cette façon-là, propre à lui, de prononcer son doux nom, Mariam, qui l'a fait le reconnaître soudainement.

Des apparitions de personnes décédées, Jésus n'en a aucunement l'exclusivité. De tous temps, dans toutes les cultures, de tels phénomènes sont attestés, de nos jours encore bien évidemment. Il arrive même que ce soient des personnes qui ne connaissaient aucunement la ou le décédé.e, ne soupçonnant d'ailleurs pas avoir eu affaire à une ou un défunt.e, et qui découvrant ensuite son portrait réalisent à ce moment-là seulement la singularité de leur rencontre... Ceci signifie simplement qu'il y a bien quelque chose qui survit de nous, sans plus de lien avec ce qui fut notre corps physique, mais par contre encore capable d'en donner au moins l'apparence et au moins pour un certain temps (les témoignages se situent majoritairement dans un délai de quelques jours, même s'il peut y en avoir qui aillent largement au-delà...)

Ainsi peut alors s'expliquer cette défense que Jésus fait ici à Madeleine de le "toucher", ainsi qu'est traduit le plus souvent ce texte — "ne me touche pas !" — ce qui pose quand même question quand juste un peu plus loin dans le même évangile Jésus invite au contraire expressément Thomas à venir mettre ses doigts dans les plaies de ses mains ou sa main dans celle de son flanc... Mais c'est que le verbe grec ici employé signifie quand même en premier sens "attacher" (quelque chose pour soi-même), donc se l'approprier, l'utiliser pour son profit personnel ! et même dans son sens plus général de "toucher", il n'en conserve pas moins alors encore une notion d'appropriation, ou à l'inverse celle de détruire s'il s'agit du bien appartenant à quelqu'un d'autre, autrement dit empêcher l'autre d'être propriétaire de ce qu'on ne peut pas s'approprier pour soi-même !

On comprend alors que, si Thomas est invité à aller jusqu'au contact avec les plaies de la Passion, c'est uniquement parce que lui en aurait besoin, besoin de s'approprier en quelque sorte du moins ces signes (non la personne elle-même) qui lui permettront d'être certain de la réalité que c'est bien Jésus (et on note d'ailleurs qu'il n'est pas dit qu'il en aura effectivement besoin, le seul fait de voir ces plaies semble lui suffire), et que par contre pour Madeleine à qui il a suffi de s'entendre appeler par son nom, et aussi pour tout le monde, il n'est pas bon de vouloir ainsi retenir de force dans notre monde ceux qui l'ont quitté, tel n'est pas leur destin ni le nôtre. Cela ne signifie pas non plus qu'il n'y ait plus de lien entre eux et nous, bien au contraire, eux nous sont présents et bien plus essentiellement qu'ils ne l'avaient jamais été auparavant, mais cette présence ne passe plus par nos "cinq sens".

Femme ! qui cherches-tu ? Celui qui t'a aimée t'aime toujours, et c'est justement parce qu'il t'aime qu'il t'invite maintenant à grandir toi aussi, à ne pas rester dans sa seule dépendance, à prendre toute ta stature de fille, toi aussi, de son Père, qui est ton Père exactement au même titre que pour lui.

Illustration 1

or Marie se tenait près du tombeau au-dehors pleurant
alors tandis qu'elle pleurait
    elle regarda à l'intérieur du tombeau
    et vit deux anges en blanc
assis un à la tête et un aux pieds
de là où avait reposé le corps de Jésus
    et ceux-ci lui disent
« femme ! pourquoi pleures-tu ? »
    elle leur dit
« c'est qu'on a enlevé mon seigneur
et je ne sais pas où on l'a mis »
    ayant dit cela elle se retourna en arrière
et elle voit Jésus qui se tenait là
mais elle n'a pas su que c'est Jésus
    Jésus lui dit
« femme ! pourquoi pleures-tu ? qui cherches-tu ? »
    elle croyant qu'il est le jardinier elle lui dit
« seigneur ! si c'est toi qui l'as retiré
    dis-moi où tu l'as mis
et moi je le prendrai »
    Jésus lui dit
« Mariam ! »
    bouleversée elle lui dit en hébreu
« rabbouni ! »
    ce qui veut dire
« maître ! »
    Jésus lui dit
« ne t'empare pas de moi !
car je ne suis pas encore monté vers le Père
    mais va vers mes frères et dis-leur
"je monte vers mon Père et votre Père
et mon Dieu et votre Dieu »
    Marie la Magdaléenne va annoncer aux disciples
« j'ai vu le seigneur »
et ce qu'il lui a dit

(Jean 20, 11-18)

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