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Billet de blog 22 juillet 2025

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Qui est mon frère

Il est difficile de comprendre comment les premiers chrétiens, à partir de leur expérience vécue de l'Esprit en eux, en sont pourtant venus à considérer que leur filiation divine à eux ne serait pas d'origine, contrairement à celle de Jésus.

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Ses frères et sœurs, ce sont ceux qui vivent la même aventure que lui, celle d'être comme lui fils et filles du même père, ce n'est pas très compliqué à comprendre : une telle filiation, une fois qu'on y est entré — et c'est son cas à lui, notamment — devient évidemment prioritaire sur la filiation naturelle, biologique ; non pas forcément incompatible, il ne s'agit pas nécessairement de couper les ponts, mais il ne faut pas non plus que ladite famille prétende venir s'interposer. Jésus a découvert cette présence de l'Esprit en lui lors de cet événement rapporté comme étant son baptême par Jean, et à partir de là c'est cette filiation-là qui s'est mise à inspirer ses choix de vie : pour commencer de poursuivre en Galilée l'œuvre du Baptiste après son arrestation, puis les premières guérisons se sont produites, et l'histoire s'est mise à lui échapper plus ou moins, c'était bien l'Esprit qui menait la danse...

Il est difficile de comprendre, alors que les premiers chrétiens se sont mis à vivre eux aussi de cette même "filiation" divine, c'est à dire de la même présence de l'Esprit en eux, comment ils en sont venus par la suite à prétendre que leur filiation à eux ne serait cependant pas de même nature que celle de Jésus. Il est pourtant impossible, à partir des seuls textes du "Nouveau Testament" — des textes canoniques, les textes officiels servant de base à toute la théologie chrétienne — de justifier ce mouvement qui a fini par identifier Jésus à Dieu lui-même, d'en faire ce "Fils" deuxième "personne" de la "Trinité", ce qui lui a alors effectivement accordé un statut absolument unique, un statut qui lui soit propre à lui seul, en sorte que c'est désormais lui seul qui aurait eu de toute éternité la double nature, humaine et divine, tandis que tous les autres humains ne pourraient tout au plus que recevoir la nature divine par une sorte d'adoption, en somme que pour eux cette nature ne leur serait pas innée...

En fait si, on comprend globalement pourquoi il y a eu dans les premiers siècles de l'histoire du christianisme cette régression, qui est malheureusement une trahison, des tout débuts ; c'est d'ailleurs une histoire parfaitement banale, que suit toute révélation, toute percée de la transcendance dans l'immanence. C'est la même histoire qui s'est passée au fil des siècles dans le judaïsme, mais aussi dans le bouddhisme entre autres : le "message", mais mieux "l'expérience vécue", des débuts, s'affadit progressivement au fur et à mesure de sa diffusion et des ses succès et perd ainsi peu à peu de sa saveur d'origine, de son authenticité, jusqu'à devenir une sorte d'ersatz, le "Canada dry" de la spiritualité, un pastiche presque, qui évoque quand même encore quelque peu ses débuts, il y a comme une odeur de ces derniers qui y flotte encore, suffisamment pour attirer et même porter malgré tout comme un appel, éveiller une vague nostalgie qu'il existe pourtant une réalité, mais qu'elle est bien cachée...

De là, quelques uns et quelques unes, prenant au sérieux cette intuition enfouie sous les couches de poussière et de gravats de la tradition, chercheront à atteindre cet or pur, à le ressusciter en eux, cet or pur qui est donc leur nature divine, leur nature d'origine éternelle, inséparable de leur nature humaine dès avant même leur conception... Ce sont ceux-là qui justifient la formule qui dit que les chrétiens soient un "peuple de rois, peuple de prêtres, peuple de prophètes". Ils s'efforcent le plus souvent de ne pas se faire remarquer, tant il est vrai que donner des perles aux cochons est le meilleur moyen pour qu'on se retourne contre eux, mais ils se comportent surtout, ou du moins y tendent autant qu'il leur est possible, selon ce que l'Esprit, leur nature première, leur inspire pour le bien, le bien spirituel bien évidemment, du plus grand nombre, de quelque peuple, nation, "race", culture, religion, sexe, qu'ils soient.

Illustration 1

    et alors qu'il parlait aux foules
voici que sa mère et ses frères
se tenaient dehors cherchant à lui parler
    alors quelqu'un lui dit
« voici que ta mère et tes frères
se tiennent dehors cherchant à te parler »
    et répondant il a dit à celui qui lui parlait
« qui est ma mère et qui sont mes frères ? »
    et ayant tendu sa main vers ses disciples il a dit
« voici ma mère et mes frères !
    car quiconque fait
    la volonté de mon père qui est dans les cieux
c'est lui qui est mon frère et ma sœur et ma mère »

(Matthieu 12, 46-50)

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