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Billet de blog 25 juin 2025

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Croyez-moi sur parole !

Depuis le concile de Vatican II, l'Église catholique a enfin reconnu que la conscience individuelle de chaque chrétien doive être en dernier ressort la seule juge de ce en quoi il croit ; une révolution dont les fruits sont encore loin d'avoir mûri !

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Une autre caractéristique des premiers temps du christianisme : les faux prophètes. Par "prophètes", il faut entendre ici des prédicateurs itinérants, qui se rendaient de communauté en communauté pour prêcher la bonne parole, réveiller les ardeurs qui pouvaient s'affaiblir, ou redresser quelques déviations doctrinales ayant pu surgir, encourager, susciter de nouvelles énergies, etc. Si on lit les lettres de Paul, on se rend compte que tel en est le contenu essentiel, c'était déjà le rôle qu'il avait, et cela ne s'est pas arrêté avec lui. Il y a bien eu dans ces premiers temps du christianisme de ces "prophètes", des personnes qui se disaient inspirées directement par Dieu, sans avoir nécessairement connu Jésus de son vivant, et à une époque où il n'y avait pas encore d'organisation centralisée, de contrôle sur ce que disaient les uns ou les autres.

Comment alors savoir, comment discerner, est-ce que la parole de tel ou tel "prophète" est bien ce qu'elle prétend être, inspirée par Dieu, ou pas, sans d'ailleurs qu'il y ait ou non duperie volontaire de la part de l'auteur. On pourrait alors déjà se demander : est-ce vraiment Jésus qui avait prévu que cela se passerait ainsi parmi ceux qui se réclameraient de son héritage ? cela semble difficilement crédible si on considère qu'en se résolvant à se laisser mettre à mort, c'était comme s'il jouait son va-tout, c'était le geste de la dernière chance pour faire sortir ses disciples de leur attente d'un messie politico-militaire. On ne pense jamais assez à ce gouffre qu'il y avait entre eux et lui, mais qui impliquait alors qu'il ne pouvait absolument pas prévoir ce qu'il se passerait après sa mort.

Non, il est vraiment difficile de ne pas considérer ce genre de recommandation comme une création des premiers chrétiens après les débuts de leur histoire. Pour celle-ci d'aujourd'hui, on peut d'ailleurs préciser que l'image de l'arbre qu'on reconnaît à ses fruits provient vraisemblablement de Jésus, puisqu'on la retrouve ailleurs (Matthieu 12, 33s // Luc 6, 43s), mais dans le contexte général de comment évaluer la valeur d'une personne. On peut alors soupçonner Matthieu d'avoir simplement repris ce même critère en l'appliquant à cette problématique surgie bien postérieurement à Jésus de ces prédicateurs se prétendant inspirés par Dieu mais pouvant parfois poser des affirmations pour le moins surprenantes.

Une telle problématique s'est certainement effectivement posée dans ces débuts du christianisme, avant que ne soit instituée une hiérarchie qui soit officiellement garante de la "bonne" doctrine, de celle qu'il faut tenir comme autorisée. On notera cependant que cette notion de faux prophètes était déjà fortement d'actualité tout du long du judaïsme, du moins du judaïsme installé sur "sa" terre, et que d'une manière générale c'est une question qui se pose dans toute religion : qui détient l'autorité pour asserter quelle est la vérité à laquelle adhérer, car toute religion est sujette à de nombreuses questions d'interprétation et de compréhension de ses propres principes et références, lesquels ne peuvent pas, par nature, être figés, faute de quoi la religion en question mourra inéluctablement.

Enfin, il serait difficile, à propos de cette question des faux prophètes dans le christianisme naissant, de ne pas l'interroger au sujet de Paul, car c'est très exactement ce qu'a été Paul : un homme qui n'a jamais connu Jésus de son vivant et qui s'est réclamé tout du long de sa prédication beaucoup plus de ses révélations reçues directement de Dieu que du témoignage reçu des disciples qui, eux, avaient vécu avec Jésus. On peut à ce sujet se poser particulièrement la question du culte eucharistique, cette pratique quand même centrale dans ce qu'est devenu le christianisme tout au long des siècles. On remarque que ni Matthieu ni Marc ne prétendent que Jésus aurait dit à la Cène de refaire à l'avenir ce même geste de partage du pain et du vin, Luc seul le prétend. Or Luc était un disciple de Paul, et Paul, lui, affirme avoir reçu cette injonction à refaire ce geste de ...Jésus ! il ne dit pas l'avoir reçu des disciples présents au dernier repas, mais "du Seigneur"...

Étant donné le rôle vraiment central dans tout le christianisme depuis deux mille ans de cette pratique du "repas du Seigneur", qu'elle ne soit donc selon toute vraisemblance basée que sur une "révélation" d'ordre mystique reçue par Paul, et non sur des paroles prononcées de manière dûment attestée par leur auteur putatif, ne devrait-il pas pour le moins demander un minimum de clarification, pour ne pas dire de discernement des esprits : le fruit de cette parole-là qui nous est venue de Paul atteste-t-il de sa qualité de vrai ou de faux prophète ?

Illustration 1

prenez garde aux faux prophètes
    qui viennent vers vous en vêtements de moutons
    mais au-dedans ce sont des loups rapaces
c'est à leurs fruits
    que vous les reconnaîtrez

est-ce qu'on ramasse des raisins sur des épines
    ou des figues sur des ronces ?
ainsi tout arbre sain
    fait de beaux fruits
mais un arbre malsain
    fait des fruits laids
un arbre sain ne peut pas
    faire des fruits laids
ni un arbre malsain
    faire de beaux fruits
tout arbre qui ne fait pas un beau fruit
    est coupé et jeté au feu

ainsi c'est vraiment à leurs fruits
    que vous les reconnaîtrez

(Matthieu 7, 15-20)

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