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Billet de blog 28 août 2025

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Il vient

Nous vivons tellement hors de nous-mêmes, toujours tirés vers l'extérieur, vers des mirages, vers du pseudo-mieux, vers toujours plus d'avoir, de sensations fortes, d'ivresses, de tout ce qui nous sépare de notre être-même...

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Ce qui marque peut-être le plus dans la première partie de ce passage, ce sont ces temps au présent concernant les fins dernières : vous ne savez pas quel jour votre seigneur "vient", c'est à l'heure que vous ne pensez pas que le fils de l'homme "vient". Dans la petite parabole qui suit, où il est question aussi du retour d'un seigneur, ces temps sont au futur, mais dans cette exhortation qui la précède et qu'elle est censée illustrée, ce retour est au présent, c'est d'un événement en train de se produire qu'il est question, non pas d'un événement à venir (et donc en fait plus ou moins hypothétique). Non : le seigneur vient ! le fils de l'homme vient ! c'est maintenant que cela se passe, c'est maintenant que cela se produit.

On sait que, dans les tout premiers temps du christianisme, on pensait que ce retour était très proche : Paul pensait qu'ils n'auraient pas à passer par la mort, l'établissement du royaume aurait eu lieu avant ; certains ne se donnaient même plus la peine de travailler pour gagner leur vie, Paul à nouveau devra leur dire de ne donc plus manger non plus ; d'autres s'inquiétaient de ce que certains de leurs proches soient décédés avant la survenue de cet événement, Paul encore les rassurera : ceux-là, ressuscités, entreront même avant les vivants dans le royaume... Il y avait vraiment une notion d'imminence de ce retour ; on ne savait pas trop pourquoi il en était ainsi, pourquoi Jésus n'avait pas pu instaurer immédiatement son royaume, sitôt ressuscité, mais on n'envisageait donc absolument pas que cela puisse beaucoup tarder, sans doute n'était-ce qu'un très léger contretemps...

Peut-être est-ce alors là l'explication de ces verbes au présent : on vit dans l'anticipation de cet événement, c'est comme s'il était déjà en marche, comme quand on anticipe déjà le printemps lorsque les jours commencent à s'allonger notablement début février, on en sent les prémices, on fait déjà comme si ; mais non ! ce n'est même pas du "comme si", on le pense vraiment, on s'y sent, on en est persuadé, c'est déjà commencé !

Que de changement depuis... Comment croire encore à cette venue imminente, quand on sait ce que nous savons maintenant, que notre système solaire existe depuis quatre à cinq milliards d'années et l'humanité sur la Terre depuis près de trois millions d'années ? Car il ne faut pas s'y tromper, le retour de Jésus, le début du royaume, c'était un événement mondial, la fin de ce monde où existent et le bien et le mal, les bons et les méchants, les plaisirs et la souffrance, pour un monde où n'existerait plus que le bien, que les bons, que les plaisirs, le mal et la souffrance en ayant été bannis définitivement et les méchants de même en enfer. Une telle perspective, commune pour toute l'humanité et même pour toute la "création", autrement dit tout l'univers, ne semble vraiment plus pouvoir avoir encore un sens de nos jours !

On ne peut plus alors penser au royaume de cette manière, comme à un événement collectif, universel ; reste seule sa venue pour chacune et chacun, personnellement, un royaume déjà là comme le dit Luc (17, 21) : le royaume est en nous, à l'intérieur de nous ; l'au-delà n'est pas un autre monde lointain, mais c'est l'inverse, c'est nous qui en sommes loin, alors qu'il est là présent, mais nous vivons tellement hors de nous-mêmes, tellement à côté de nos pompes, tellement inconscients de notre nature réelle, toujours tirés vers l'extérieur, vers des mirages, vers du pseudo-mieux, vers toujours plus d'avoir, de sensations fortes, d'ivresses, de passions, de tout ce qui nous sépare de notre être-même en fait : que fuyons-nous donc ainsi, alors que nous avons tout en nous pour être heureux ?

Illustration 1

veillez donc car vous ne savez pas
    quel jour votre seigneur vient
et comprenez ceci
    que si le maître de maison avait su
    à quelle veille le voleur vient
il aurait veillé
    et n'aurait pas laissé sa maison être fracturée
c'est pourquoi vous aussi soyez prêts !
    car c'est à l'heure que vous ne pensez pas
    que le fils de l'homme vient

qui donc est-il le serviteur de confiance et sage
    que le seigneur a établi sur sa maisonnée
    pour leur donner la nourriture en temps voulu ?
heureux ce serviteur-là
    que son seigneur en venant
    trouvera faisant ainsi !
amen ! je vous dis
qu'il l'établira sur tous ses biens
 
mais si méchant
    ce serviteur-là dit en son cœur
"mon seigneur tarde"
    et il commence à battre ses compagnons serviteurs
    et à manger et à boire avec les ivrognes
le seigneur de ce serviteur-là viendra
    en un jour qu'il ne s'attend pas
    et à une heure qu'il ne connaît pas
et il le mettra en pièces
et sa part c'est avec les mécréants qu'il l'établira
    là seront le pleur et le grincement des dents

(Matthieu 24, 42-51)

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