Le texte insiste : il n'y a pas eu de "plan", de complot, pour organiser la "résurrection" de Jésus. Il n'était pas gagné d'avance que Pilate autorise Joseph d'Arimathie ni personne d'autre à récupérer le corps. Et le tombeau dans lequel il a été mis n'avait pas été prévu non plus dans ce but, pas de cachette, de double fond, de truc de prestidigitateur : c'était juste qu'ils n'avaient pas le temps de l'emporter plus loin avant le début du shabbat. Et encore, ce tombeau était "neuf", il n'y avait pas déjà un ou plusieurs autres cadavres qui s'y trouveraient, ce qui pourrait mettre un doute : Jésus aura-t-il vraiment disparu du tombeau, ou on avait mal compté au départ le nombre des cadavres et on aura seulement cru qu'il avait disparu ?
Évidemment, tant de précautions pour soutenir la réalité de la disparition du corps, peut provoquer le résultat inverse de celui escompté, surtout à l'ère du soupçon généralisé comme mode de base de fonctionnement. Ce même évangile tentera pourtant de donner à réfléchir, en disant déjà que les linges qui avaient été utilisés pour envelopper le corps seront restés dans le tombeau : ceci écarte la possibilité d'un vol du corps, les voleurs n'auraient eu aucune raison de perdre du temps à les défaire sur place. Et puis l'évangile précise même que ces linges sont restés en place, le linceul est bien à plat : soit ces voleurs avaient vraiment du temps à perdre pour, non seulement enlever les linges, mais en plus les disposer soigneusement en place, soit...
Soit c'est le corps qui s'est comme volatilisé, laissant tous ces linges simplement retomber là où ils étaient, comme l'indique l'évangéliste, et cette possibilité se trouve de plus coïncider avec certaines caractéristiques du linceul de Turin. Ce qu'on ne sait pas du tout, par contre, c'est quand cet événement pour le moins inhabituel, voire singulier, a pu se produire : la mise au tombeau s'est faite le vendredi soir juste avant la tombée de la nuit, la découverte du tombeau vide le dimanche matin à l'aube ; il s'est passé un jour et deux nuits, et en fait cela a pu arriver n'importe quand dans cet intervalle de temps, de à peine le tombeau refermé jusqu'à juste avant que les femmes n'y reviennent après le shabbat.
Quoi qu'il en soit, la disparition est une chose, et les apparitions en sont une autre. Il n'est pas sûr que ces apparitions soient bien différentes de celles rapportées à propos de cas assez nombreux d'autres personnes, publiques ou anonymes. La disparition, par contre, sans qu'on puisse écarter la possibilité que cela soit arrivé pour d'autres personnes, c'est en tout cas la seule occurrence, à ma connaissance, qui en ait été recensée. Elle est certainement à mettre en lien avec la transfiguration, il est possible que ce soit "simplement" le même phénomène qui se soit produit, et cette fois irréversiblement, la matière irrémédiablement transmutée en énergie ?
De la science-fiction ? non. Seulement une singularité. Mais ensuite ? qu'en faire ?
Agrandissement : Illustration 1
alors les Judéens, parce que c'était la Préparation
pour que les corps ne restent pas sur la croix pendant le shabbat
– et c'était le grand jour que ce shabbat –
demandèrent à Pilate que soient brisées leurs jambes
et qu'ils soient enlevés
alors les soldats vinrent
et effectivement ils brisèrent les jambes du premier
et de l'autre qui avait été crucifié avec lui
cependant en arrivant à Jésus, comme ils virent qu'il était déjà mort
ils ne lui brisèrent pas les jambes
mais un des soldats avec une lance perça son côté
et aussitôt en sortit du sang et de l'eau
et celui qui a vu a témoigné
et véridique est son témoignage
et lui savait qu'il disait vrai
afin que vous aussi croyiez
car ces choses sont arrivées
pour que l'Écriture soit accomplie
"aucun de ses os ne sera brisé"
et encore une autre Écriture dit
"ils regarderont vers celui qu'ils ont transpercé"
après ces choses Joseph d'Arimathie
— c'était un disciple de Jésus
mais en secret par peur des Judéens —
demanda à Pilate de pouvoir enlever le corps de Jésus
et Pilate autorisa
alors il vint et enleva son corps
et vint aussi Nicodème
— celui qui était venu vers lui de nuit au début —
portant un mélange de myrrhe et d'aloès
d'environ cent livres
alors ils prirent le corps de Jésus
et ils le serrèrent dans un drap de lin avec les aromates
comme c'est la coutume des Judéens pour ensevelir
puis sur le lieu où il avait été crucifié
il y avait un jardin
et dans le jardin un tombeau neuf
dans lequel personne n'avait jamais été mis
alors là
à cause de la Préparation des Judéens
parce que le tombeau était proche
ils mirent Jésus
(Jean 19, 31-42)