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Billet de blog 8 mars 2025

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Trump agit pour obtenir une paix russe, LFI en appelle à "la" paix !

Il ne suffit pas de brandir la carte de l'antifascisme à mobiliser depuis l'avènement de Trump comme fait LFI alors qu'elle continue à en appeler à la paix en Ukraine, laquelle, dans les conditions de guerre créées par les Etats-Unis, ne peut être que russe entérinant de fait la politique trumpiste en cours de désarmement de la résistance ukrainienne.

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Les Etats-Unis trumpistes sont devenus la bouée de secours de Poutine en Ukraine. La gauche, elle est où ? Tout de même pas à la traîne de Trump ?


La Russie n'arrive pas à vaincre militairement, no problem, Trump retourne l'aide américaine à l'Ukraine en son contraire, c'est une aide diplomatico-militaire qu'il met en oeuvre en faveur de la première. Diplomatico-militaire car, en privant les Ukrainiens des moyens de renseignements sur le théâtre de guerre, le néofasciste américain donne une aide précieuse à son alter ego néofasciste russe pour gagner sur le tapis vert ce qu'il a conquis laborieusement sur le terrain et, à terme, se relancer militairement après avoir reconstitué, le temps d'un cessez-le-feu ou de la paix, une armée en fragilisation avancée. Il s'est produit une inversion totale des paramètres de la guerre d'Ukraine qui fait désormais de celle-ci une guerre américano-russe contre les Ukrainien.ne.s. Toute autre façon de voir la situation signe une volonté de brouillage des signaux de compréhension des termes mêmes de la guerre. A quelles fins ? Démêlons le sinistre écheveau.

Illustration 1

Trump vise l'affaiblissement militaire de l'Ukraine pour arriver à une paix russe. LFI invoque incantatoirement la paix sans dire mot de l'affaiblissement ukrainien recherché par Trump!

Le décodage de la situation internationale instaurée depuis l'arrivée au pouvoir de Trump est important pour mettre au pied du mur toutes celles et tous ceux qui nous mènent en bateau sur la nécessité de la paix là maintenant. Là maintenant, plus que jamais, la paix aurait le goût du sang, le sang qu'ont versé et versent les Ukrainiennes (sans oublier celui des "chairs à canon" russes) pour échapper à la domination russe. Ce qui se passe en ce moment où les Russes profitent de l'aveuglement des moyens de renseignements que les Américains imposent à l'Ukraine, constitue les prémices de l'avènement d'une paix russe à laquelle pousse mi-hypocritement, mi-cyniquement Trump. Et qui, si elle finissait de se concrétiser comme telle, placerait l'Ukraine sous le bon vouloir géopolitique russe et sous l'éteignoir américain : un double bon vouloir géopolitique impérialiste rédupliquant ce qui prévaut en Russie même et dans les territoires ukrainiens qu'elle occupe ! Et ce qui se met en marche aux Etats-Unis ?
Face à tout ceci, il ne suffit pas de brandir la carte de l'antifascisme à mobiliser depuis l'avènement de Trump comme fait LFI alors qu'elle continue à en appeler à la paix en Ukraine, laquelle, dans les conditions de guerre créées par les Etats-Unis, ne peut être que russe. La non prise en compte par les gauches pacifistes de cette dynamique prorusse de l'actuelle politique américaine pour la paix prend tout son sens en l'absence chez elles, et pour cause, de dénonciation de la politique trumpiste de désarmement de la résistance ukrainienne. Je dis et pour cause, car il est clair que ce désarmement de l'Ukraine par les Etats-Unis colle exactement à ce que les élus Insoumis promeuvent en s'abstenant, voire en votant contre, comme on l'a vu au Parlement Européen, sur une motion de soutien à l'armement de l'Ukraine. Et comme on le voit aux discours de Mélenchon (1) ou de Bompard sur le sujet, tous tournés vers la dénonciation absolue de tout renforcement des moyens de défense, donc de toute politique de réarmement, en France (comme en Europe), travaillant à contribuer à approvisionner en armement l'Ukraine, à contrer la menace de la Russie s'exerçant d'abord sur les pays de l'Est européen et à prévenir toute autre menace d'elle en Europe. Négativisme d'un irénisme sous-estimant les dangers de guerre et inquiétant chez une gauche qui s'interroge paresseusement, pour critiquer la nécessité de se réarmer, sur le danger que Macron puisse financer une économie de guerre au détriment de la satisfaction des besoins sociaux déjà mis à mal par la brutale politique antisociale du susdit (2). Pirouette paresseuse inacceptable à gauche car 1/ elle désarme (décidément) par rapport aux menaces néofascistes en Europe qui s'alimentent au bellicisme poutinien à l'oeuvre en Ukraine et 2/ se dispense d'envisager la seule réponse à apporter à l'évidente tentation macronienne de faire payer l'augmentation des dépenses d'armement à la population : une mobilisation populaire d'envergure en faveur d'une  très forte augmentation de la pression fiscale, mesure pourtant chère aux Insoumis mais curieusement mise ici sous le boisseau, sur les plus riches ! Il est plus que suspect que l'on se contente, comme fait LFI, d'opposer, d'une part, le danger du développement des attaques gouvernementales pour financer l'effort de défense à, d'autre part, la nécessité, au contraire, de renforcer les politiques sociales, sans pour autant se positionner contre le financement de la défense et en recourant à ce que LFI se targue d'être sa raison d'être, l'appel à se mobiliser (3). Pour les besoins de défense et, c'est tout un, pour leur financement par celles et ceux que Macron n'a de cesse de favoriser fiscalement. Quel intérêt y a-t-il à renoncer à sa raison d'être mobilisatrice en tenant les deux bouts de deux revendications dont il faut déjouer qu'elles soient vues, dans les circonstances actuelles, par essence contradictoires ? Serait-ce que, comme on l'a vu plus haut, l'on n'est pas clair, c'est peu de le dire, sur la nécessité de dédier du budget à hauteur de la menace qui, s'exerçant aux portes de l'Europe, comme le reconnaît Manon Aubry (voir en note 2), s'exerce inévitablement, comme le méconnaît la même Manon Aubry, aux portes de la France ?    


Le révélateur de toute position sur la guerre en Ukraine : la question du désarmement de l'Ukraine engagé par les Etats-Unis


La politique trumpiste rebat les cartes en les retournant d'une façon qui prend totalement à revers, et même met sens dessus dessous, le positionnement supposément anti-impérialisme, précisons anti-impérialisme américain, de LFI, comme de quelques autres à l'extrême gauche fossilisée dogmatico-sectaire. Celles-ci, toutes, en croyant être dans l'évidence de l'anti-impérialisme classique à gauche en dénonçant un Biden qui fournissait au compte-gouttes des armes aux Ukrainiens, mais en oubliant (ou relativisant) l'agression poutinienne de l'Ukraine, se retrouvent aujourd'hui à partager DE FAIT anti-impérialistement ...avec l'impérialisme trumpiste, la politique de désarmement de l'Ukraine. Ce qui, logique imparable, ce faisant, les met à découvert, dans l'aveu, malgré le déni, d'être en miroir de l'Américain pour ce qu'il fait, sans se cacher de rien, lui, pour que la Russie gagne la guerre.
Tout discours, y compris dénonçant l'invasion de l'Ukraine, qui s'oppose à la capacité de l'Ukraine à résister militairement, revient à la désarmer, y compris, politiquement, comme il désarme le soutien international de gauche à la résistance armée ukrainienne. Il est incontournablement, quoi qu'il soit dit par ailleurs, et bien des mots cherchent à brouiller que l'on souhaite désarmer l'Ukraine, un cadeau politique à Poutine. Et désormais, ô paradoxe, à Trump !
Nos "désarmeurs" antiguerre, aux fondements pro-guerre russe désormais exposés, si l'on veut bien voir, en pleine lumière - l'une des plus belles réussites du néofascisme américain profitant aux néofascismes internationaux - ont beau jeu de prendre, comme fait, par exemple, Manon Aubry, probablement la moins "pacifiste béate" des Insoumis.e.s, la pose antifasciste ou de dénoncer, comme fait Mélenchon, le chaos que sème Trump, leurs dés sont pipés et visibles comme tels. Et ils préfigurent en nécessité une autodestruction de cette gauche, en tant que gauche, pour son refus du soutien sans conditions à accorder aux luttes, armées et non armées, des peuples pour leur émancipation.

Un pacifisme de gauche pris totalement à revers face aux paramètres (néo)fascistes et impérialistes de la guerre d'Ukraine


L'aveuglement imposé sur le terrain militaire aux Ukrainiens par l'emblématique décision trumpienne de désarmement radical de la résistance aux Russes, par le fait même d'être décodable comme étant pleinement compatible, convergente, avec la proposition "désarmante" de LFI et compagnie, donne la mesure de la nature intrinsèquement et (inconsciemment chez certain.e.s ?) belliciste du pacifisme de gauche (qui est également d'extrême droite car on partage large). En corollaire, l'antifascisme porté par cette gauche en France (mais cela vaut à l'échelle internationale) autodétruit sa crédibilité. On ne fait pas plus de l'antifascisme que de l'anti-impérialisme en proxy...malgré soi ou délibérément, du néofascisme impérialiste américain (et en proximité du RN et de l'internationale néofasciste proclamée à Madrid) qui vient en aide au néofascisme sous-impérialiste russe. Sous-impérialisme russe, que LFI ne désigne jamais comme tel ni comme néofasciste et qui nous montre aujourd'hui toute la latitude qu'il a gagnée, grâce à cette convergence des énergies pacifistes depuis la gauche jusqu'à l'extrême droite, en confluence avec les décisions "pour la paix" américaines, pour bombarder à tout va une Ukraine dont on a supprimé la visibilité satellitaire du terrain de la guerre.
Une seule solution face à cette chaîne d'infamies : la solidarité internationaliste de gauche (pardon pour la redondance qu'imposent les lâchetés et reniements du moment) pour que l'Ukraine retrouve au plus vite ses moyens militaires de résistance. Une résistance militaire qui reste l'unique voie qui donne à l'agressé le pouvoir de résister à l'agresseur et de lui imposer les conditions d'une paix qui soit réellement la paix. Voie qui s'accommode d'un cessez-le-feu pour autant que l'agressé voit reconnues ses propositions pour qu'il ne soit pas un cessez-le-feu pour la relance à terme, par l'ennemi, de la guerre ni pour l'abandon du territoire illégalement occupé par lui. Toutes choses que soutient en France le RESU : ukrainesolidaritefrance@gmail.com
(1) Le billet de 2024 de Philippe Marlière sur Mélenchon reste d'actualité en ces temps devenus trumpisés : https://www.nouvelobs.com/idees/20240327.OBS86310/melenchon-et-l-ukraine-un-campisme-reactionnaire-par-philippe-marliere.html

(2) Ecoutons Manon Aubry : https://www.youtube.com/watch?v=2C-TvMbrhV8

(3) Si l'on veut aller au fond des choses, posons la question qui éclaire beaucoup de ce que j'écris ici : quand a-t-on vu LFI participer aux mobilisations de solidarité avec la résistance ukrainienne ?

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