Billet de blog 15 mars 2008
Le 11 novembre, ou comment s'en débarrasser...
« On croit mourir pour la patrie ; on meurt pour les industriels», écrivit, avec un salutaire toupet, Anatole France durant le premier conflit mondial. 1914-1918 était la guerre qu'il ne fallait pas faire, une guerre civile européenne, absurde et grosse d'horreurs : les Français y partirent comme un seul homme.
En 1939 (et même plus tôt), il fallait au contraire combattre Hitler, ses pompes et ses œuvres : les Français s'avérèrent alors fourbus sur leur litière.
Après son élection, en 1974, Valéry Giscard d'Estaing supprima le 8 mai comme jour férié pour mieux nous rapprocher de l'Allemagne. C'était un geste sot. Histoire de commémorer, malgré tout, la victoire sur la barbarie nazie, une petite tribu — dont le signataire de ces lignes devait être le benjamin — se réunissait sur les marches du Panthéon chaque 8 mai, fustigeant la « cleptomanie giscardienne », autour de vieux gaullistes comme Jacques Debû-Bridel et de vieux communistes comme Pierre Villon. Le 8 mai fut rétabli.
Pourquoi, après qu'a disparu le dernier poilu français — précédé dans la tombe, quelques semaines auparavant, par l'ultime combattant allemand de la Grande Guerre —, persévérer dans la célébration du 11 novembre ?
Ne pourrait-on pas imaginer une fête européenne, dont la scénographie serait confiée à Jack Lang et qui verrait Otto de Habsbourg, né en 1912 (c'est lui, âgé de 4 ans, garçonnet en deuil avec ses cheveux longs, qui suit le convoi funèbre de son grand-père François-Joseph sur un fameux cliché maintes fois reproduit), déclarer l'abolition du 11 novembre ? C'en serait alors fini de cette plaie originelle. Le Vieux Continent s'unirait davantage encore en comblant le gouffre de 1914-1918, tout en continuant de réfléchir en frissonnant sur les crimes et les béances de 1939-1945.
Et en France, pourquoi ne pas pousser l'avantage et parvenir à un accord entre droite et gauche — du Raffarin conscientisé ! — en établissant, le 11 novembre, ce qui fut mis en place avant que d'être laissé au libre arbitre de chaque entreprise, à propos du lundi de Pentecôte ?
Non seulement ce serait remettre Giscard sur ses pieds, comme disait Marx au sujet de Hegel, mais encore ce serait remettre d'aplomb les consciences européennes (préalable à la constitution d'une opinion publique digne de ce nom de Brest à Brest-Litovsk). Enfin, ce serait obliger la France à faire le tri parmi les spectres dont elle regorge. Elle passerait du soldat au retraité inconnu, pour lequel chacun travaillerait bénévolement, chaque 11 novembre. En espérant ne pas avoir à tonner un jour : « On croit secourir la grand-patrie ; on secourt les industriels»...
En 1939 (et même plus tôt), il fallait au contraire combattre Hitler, ses pompes et ses œuvres : les Français s'avérèrent alors fourbus sur leur litière.
Après son élection, en 1974, Valéry Giscard d'Estaing supprima le 8 mai comme jour férié pour mieux nous rapprocher de l'Allemagne. C'était un geste sot. Histoire de commémorer, malgré tout, la victoire sur la barbarie nazie, une petite tribu — dont le signataire de ces lignes devait être le benjamin — se réunissait sur les marches du Panthéon chaque 8 mai, fustigeant la « cleptomanie giscardienne », autour de vieux gaullistes comme Jacques Debû-Bridel et de vieux communistes comme Pierre Villon. Le 8 mai fut rétabli.
Pourquoi, après qu'a disparu le dernier poilu français — précédé dans la tombe, quelques semaines auparavant, par l'ultime combattant allemand de la Grande Guerre —, persévérer dans la célébration du 11 novembre ?
Ne pourrait-on pas imaginer une fête européenne, dont la scénographie serait confiée à Jack Lang et qui verrait Otto de Habsbourg, né en 1912 (c'est lui, âgé de 4 ans, garçonnet en deuil avec ses cheveux longs, qui suit le convoi funèbre de son grand-père François-Joseph sur un fameux cliché maintes fois reproduit), déclarer l'abolition du 11 novembre ? C'en serait alors fini de cette plaie originelle. Le Vieux Continent s'unirait davantage encore en comblant le gouffre de 1914-1918, tout en continuant de réfléchir en frissonnant sur les crimes et les béances de 1939-1945.
Et en France, pourquoi ne pas pousser l'avantage et parvenir à un accord entre droite et gauche — du Raffarin conscientisé ! — en établissant, le 11 novembre, ce qui fut mis en place avant que d'être laissé au libre arbitre de chaque entreprise, à propos du lundi de Pentecôte ?
Non seulement ce serait remettre Giscard sur ses pieds, comme disait Marx au sujet de Hegel, mais encore ce serait remettre d'aplomb les consciences européennes (préalable à la constitution d'une opinion publique digne de ce nom de Brest à Brest-Litovsk). Enfin, ce serait obliger la France à faire le tri parmi les spectres dont elle regorge. Elle passerait du soldat au retraité inconnu, pour lequel chacun travaillerait bénévolement, chaque 11 novembre. En espérant ne pas avoir à tonner un jour : « On croit secourir la grand-patrie ; on secourt les industriels»...