L’alcool est un produit de consommation que l’on peut se procurer, comme n’importe quelle autre boisson, dans le supermarché le plus proche de chez soi. Il est considéré, en tant qu’apéritif, par exemple, comme l’accompagnement qui, parmi les chips, les cacahuètes, les noix de cajou, les fruits secs, les biscuits salés, les olives, les rondelles de saucisson et les cornichons, participe tout naturellement à la dimension conviviale du partage.
De la même façon, à l’occasion du repas familial dominical ou lors du dîner du samedi soir entre amis, la présence de quelques bouteilles de boissons alcoolisées est prévue afin de parfaire le caractère sympathique et chaleureux du repas. Il n’y a rien là de répréhensible ou qui soit la manifestation d’un quelconque comportement névrotique antisocial, bien au contraire. Tout le monde est ravi, détendu et la nature anxiolytique de l’alcool favorise l’ouverture à l’autre, désinhibe les plus timides, rend loquaces les êtres habituellement murés dans leur introversion et volubiles et joyeux les taciturnes ronchons du quotidien.
On peut constater qu’il est doué de multiples vertus favorisant le resserrement des fils de la trame du tissu social.
Cependant, de la vertu au vice la distance est ténue. De la joie exhibée de faire partie du groupe à la tristesse morbide d’en être exclu, le pas de côté est aisément réalisé. Et cela, incidemment, insidieusement, presque par inadvertance…
La fiction, « la soif de vivre », proposée par France 2, le mercredi 7 février 2018, à 21 heures, illustre de façon particulièrement bouleversante, notamment grâce à l’excellente performance d’actrice de Claire Keim, et au jeu non moins talentueux d’Helie Thonnat et de Grégory Montel, la facilité, lorsque l’on est confronté à une des nombreuses épreuves de la vie, de recourir aux propriétés euphorisantes et illusoirement palliatives, provisoirement seulement et juste au début, mais rapidement délétères et dévastatrices parce qu’addictives, de l’alcool consommé dans la solitude et la culpabilité, la faiblesse et le dégoût de soi.
L’alcool révèle alors la drogue qu’il est vraiment, ce poison lentement létal qui déstructure le psychisme de l’individu soumis à sa puissante intoxication insoupçonnée, délivrant le monstre que chacun ignore qu’il puisse devenir quand l’aliénation cède la place à l’épanouissement de l’homme libre de réaliser la potentialité de sa grandeur humaine.
C’est dans ce processus de maturation lente et parfois douloureuse, dans cette ascèse progressive permise par l’être en constant développement que nous sommes, toujours en passe d’accéder à soi-même, cet idéal de surhomme virtuel qui nous fait continuer de désirer durer, c’est dans l’angoissante et sublime liberté de choisir sa propre identité que nous pouvons puiser la force de nous approcher toujours plus près de la réponse qui révélera peut-être un jour le mystère de l’énigme du bonheur…