Aristote est le disciple particulièrement assidu et fidèle de Platon. C‘est très justement par amour de son maître à penser qu’il fera de son mieux pour en bouleverser la philosophie ! En effet, tout comme Platon, Aristote poursuit inlassablement la quête de la vérité du principe originel : cette pulsion primordiale à cause de laquelle existe tout ce qui est.
Sous l’éternelle immobilité d’une voute céleste, mue d’une circularité parfaite, l’univers d’Aristote déploie sa multiplicité existentielle. Le bonheur dissimule la complexité de son secret dans l’inclassable mouvance du vivant qu’Aristote va s’atteler à circonscrire. Quelques concepts sont indispensables pour entrer dans la clairvoyance du regard du philosophe : ( en acte, en puissance, le bonheur, le principe de génération, de croissance et de dépérissement du vivant, la politique et l’amitié, la contemplation, le syllogisme, l’idéalisme platonicien venant heurter de front l’empirisme des prémisses majeures et des conclusions vérifiables de la logique aristotelicienne, la revalorisation de la sensation et du système de traitement des données sensorielles innées en l’homme et donc, selon lui, d’origine divine : ce qui remet en question la réminiscence platonicienne du jeune esclave qui ignore savoir déjà, et ne pas omettre la distinction qu’il opère entre le syllogisme scientifique et le syllogisme dialectique). On prend, ainsi, conscience, que lire et comprendre Aristote n’est pas tout à fait assimilable à l’incroyable et désinvolte aisance du buzz, accidentellement créé par la dernière facétie de son chaton, maladroit, innocemment filmée et postée sur le net !
Avec Aristote, de soi l’on pourrait dire : je suis mais je ne suis pas encore tout à fait, car je deviens celui que je suis appelé à être…Je n’ai pas encore atteint la perfection de l’accomplissement de mon être. Mais n’y-a-t-il pas là, la source d’un bonheur immense que de devenir sans cesse un peu plus celui que l’on doit être ? Ne s’agit-il pas de l’imminence d’une permanente apogée ? D’une existence vécue comme une constante épiphanie, toujours déjà là, mais cependant, encore à venir ?
Pour faire preuve de pragmatisme, et parce qu’il faut bien commencer par le commencement, nous nous intéresserons à ce qu’Aristote désigne par le concept d’ « âme ». Précisons d’emblée qu’il ne lui accorde pas la dimension religieuse dont le terme est généralement connoté aujourd’hui. Pour Aristote, l’âme est le principe d’animation du vivant. Ce pourquoi elle est plurielle. Ainsi, le philosophe distingue l’âme nutritive, sensitive, locomotrice et intellective dans un élan biologique de progression inclusive ascendante, conduisant du végétal, passant par l’animal, pour aboutir à l’être humain !
Elle exerce alors, à l’intérieur des corps vivants qu’elle anime, diverses fonctions : la fonction nutritive est présente chez tous les êtres vivants dont elle assure la croissance et la reproduction ; la fonction sensitive, se manifeste chez les animaux inférieurs ; la fonction motrice se rajoute aux deux précédentes chez les animaux supérieurs ; au sommet de cette hiérarchie, des fonctions exercées par l’âme, on trouve la fonction intellective, chez l’homme.
Il semble évident que l’on ne saurait partager arbitrairement et méthodologiquement, comme l’a fait toute l’époque obscurantiste médiévale, l’œuvre d’Aristote selon qu’elle se préoccupe de logique, de biologie, de politique ou encore de métaphysique. Il est cependant nécessaire, d’en garder en mémoire, le caractère encyclopédique, et heuristique incontestable !
Point essentiel sur lequel nous reviendrons très bientôt…