L’âme est l’entéléchie du corps, selon Aristote, qui la définit ainsi dans De l’âme, livre II, chapitre 1.
Il affirme que tout être vivant est doué d’une âme qui est le principe de diverses fonctions vitales. Ainsi, il décrit l’être vivant comme une matière, un substrat, du latin « sub-stare » : se tenir dessous, recevant les déterminations d’une substance (du grec « ousia » : chez Aristote, la substance est le sujet et le support permettant tel ou tel changement ; la substance première est l’être individuel qui demeure le même tout en subissant des modifications), qui l’informe de son état et de ses mouvements.
Tout être vivant a la faculté de se nourrir, de croître et de dépérir. L’homme seul possède l’intellect (du grec « nous » : fonction de l’esprit grâce à laquelle celui-ci peut avoir l’intellection, « noêsis », des vérités intelligibles.) ou la rationalité (du grec « logos » signifiant à la fois « discours », « raison » ou « raisonnement », « rapport »), des propriétés qui le distingue des autres vivants et lui confère la connaissance de l’éthique, chez Aristote ,la science pratique ayant pour objet l’action de l’homme en tant qu’être de raison et pour fin la vertu dans la conduite de la vie.
Le corps et l’âme possèdent donc deux natures différentes : l’un est sujet et matière, l’autre est immatérielle et agissante dans la mesure où elle contient le modèle formel vers lequel le corps individuel tend par nature.
Le corps change et meurt. Ces notions de changement et de finalité sont en relations directes avec celles de puissance et d’acte.
Mais si le corps est un composé hylémorphique ( matière et forme) naturel, donc existant par soi-même dans la nature comme les autres corps vivants distingués par Aristote, végétaux et animaux, et qu’il possède, en tant que corps vivant, distinct des minéraux, une âme qui en est la fonction vitale, c’est-à-dire la cause même de son passage de la potentialité à l’actualité efficiente ; si l’âme est comme le code génétique du corps, son projet biologique se réalisant dès sa génération au gré des divers changements qui l’affectent, le corps se trouve réduit à n’être que l’instrument par l’intermédiaire duquel l’âme déploie toute son intelligence et sa rationalité. Autrement dit, l’âme humanise le corps.
La réunion du corps et de l’âme donnerait naissance à la vie. L’organisme vivant serait un composé de corps et d’âme doté d’une finalité propre.
Pour Aristote, la réalité est une nature, c’est-à-dire une totalité sensible et intelligible. Le corps est naturel dans la mesure où matière et forme lui sont inhérentes. Ce qui définit le corps naturel est son existence active et sa faculté conséquente d’être mobile. Ainsi, dans sa Métaphysique, Aristote définit la nature comme suit : « La nature dans son sens primitif et fondamental, c’est l’essence des êtres qui ont, en eux-mêmes et en tant que tels, le principe de leur mouvement. »
L’âme, pour Aristote, appartient au corps naturel dans le sens où elle lui confère la vie. Solidaire et indissociable du corps, elle est la cause de son appartenance aux êtres animés, ce qui en fait un organisme vivant.
Forme et matière engendrent conjointement un individu singulier. La forme organise la matière de telle sorte que l’on ne saurait distinguer l’une de l’autre.
Mais le vivant n’est que mouvance, perpétuelle transformation, un être dont la forme devient sans cesse ce qu’elle est appelée à être. C’est le sens des concepts de puissance ( dunamis) et d’acte (entelecheia) employés par Aristote pour rendre compte du processus par lequel un corps vivant devient progressivement ce qu’il doit être.
On comprend alors que le corps est en puissance ce que l’âme lui permet de devenir. L’âme informe le corps, c’est-à-dire qu’elle est l’acte qui le déforme continûment jusqu’à ce qu’il se réalise pleinement dans sa forme finale.
Là est toute la complexité dynamique du processus vitale activé par l’âme et réalisé par le corps.