« Blazing desert metal »
Et si le « Blazing desert metal »; cette pittoresque signature sonore du groupe de Metal Progressif, natif de ce petit Etat: Tunisie; petite portion de cette Afrique du Nord; endeuillée, cette semaine, par un tremblement de terre à l’Ouest, au Maroc, et un ouragan ravageur à l’Est, dans une Libye déjà meurtrie par une guerre civile de treize années; pouvait dans une parabole symbolique, concentré cette bouffée d’espoir, entrevue subrepticement en ce « printemps » de l’hiver 2010-2011 et son grand chambardement.
Myrath symbole?
Autrement dit:
- acte 1: un théâtre de Carthage, dont le prestigieux festival estival a prononcé une fin de non recevoir à la programmation de « Myrath », sous le prétexte fallacieux d’une impossibilité du dit festival d’assurer, convenablement!!!, la superbe machine technique bien huilée, du show Myrathien.
- acte 2: le même festival estival qui réserve à un Fadhel Jaziri près d’un milliard de nos millimes pour une énième « Takhmira » d’ouverture du dit festival, digne des joutes pseudos poétiques dont se gavait « feu », notre «Combattant Suprême », dans sa Monastir de naissance.
- acte 3: le même groupe de Metal, utilisant toute l’énergie de son « Blasing desert Metal », et son staff technique exceptionnel pour organiser de manière privative, leur concert qui a enflammé, cette nuit du 13 septembre 2023, Carthage, remuant les cendres de l’ancienne cité-Etat et faisant un super pied de nez à la Nomenklatura du Ministère de la culture et leurs pieds nickelés de responsables vivant, comme au temps de « feu » l’union soviétique stalinienne, où seuls les « artistes » de cour avaient droit aux prébendes de l’Etat.
Tarif dissuasif!
Certes le tarif: 60d pour les gradins et 80d (1) pour l’agora, restée presque vide, fut plus que dissuasif pour nombre d’entre nous, et en particulier notre jeunesse assoiffée de tout.
Zahir Zorgati, le magicien chanteur du groupe, a tout de suite expliqué que ces tarifs n’étaient pas de leur fait, et qu’il relevait de l’organisation « privative » du dit concert.
Le même Zahir Zorgati, dans un bel élan de générosité et de solidarité, qui demande au milieu du concert, et face à un public en furie, que l’on se lève pour une minute de silence en faveur de nos frères et soeurs des contrées sinistrées au Maroc et en Libye.
Ça aussi, c’est le secret du « Blasing desert metal ».
Atteindre le Graal de la perfection: un exemple à suivre!
Revenons à notre concert et son déroulement millimétré, sans la moindre fausse note, faisant taire à jamais les oiseaux de mauvaises augures, qui, à longueur d’années, nous serinent que ce pays va à vau-l’eau; où rien ne peut être entrepris sans se trouver pris dans les rets de la machinerie bureaucratique et ses travers quasi-mafieux; et où, seule la « Harga » (la fuite) vers les mirages de l’Eldorado euro-américain est digne de leur cerveaux congelés. (Makhakh Jammida...).
Contre-révolution rampante.
Insistons encore et encore: dans ce petit Etat, les alternatives existent face à la fureur de cette contre- révolution rampante, conduite par toute une génération de renégats, de poltrons, de larves rampantes devant les Séides qu’ils se nomment « Combattant Suprême », pour Bourguiba, et dont la fin de règne, embastillé par ce « Caporal de sous préfecture », auteur du « Coup d’Etat médical », est un parfait remake de ce que Bourguiba a fait subir à Lamine Bey... quand il ne s’est pas agit de liquidation physique de ses opposants, à l’instar de Salah Ben Youssef, trucidé à Francfort par ses portes flingues en 1961.
L’histoire adore resservir ses vieilles tambouilles et notre « Caporal » a fini, lui aussi, sa carrière, embastillé, avec sa « coiffeuse », dans une prison dorée appartenant à ses protecteurs des « Lieux », qui n’ont plus de « Saints » que le nom, de la fameuse tribu intégriste des Saoud.
Les diablotins du groupe de Metal: Myrath, qui ne l’oubliant pas, signifie «héritage », (mémorielle et de luttes multiformes pour le dit groupe qui hérite d’une longue tradition de résistances aux oppressions dont fourmillent notre histoire...), a littéralement mis le feu à Carthage dont l’environnement, sec depuis des mois; où pas une goutte d’eau n’est venue assouvir sa soif, et est propice à ce que la moindre étincelle fasse de nouveau embrasé le pays.
Un « feu » symbolique qui sera suivi d’un embrasement.
Sauf que le « feu » Myrathien est purement symbolique.
Par contre un feu, un vrai, couve sous la braise du soleil de plus en plus brûlant de ces mois d’été, où l’on suffoque du fait des changements climatiques dues aux émissions de CO2 largement répandues par la « folie » d’un Ben Ali qui a assassiné nos services publics, en particulier les transports publics, qui a encouragé la concentration démographique, à coups de spéculations foncières, dans cette capitale, Tunis, démesurément atrophiée ( à l’image de la politique assassine « gaullienne » pour la capitale, Paris, et sa périphérie...), où les déplacements ne peuvent plus être accomplis qu’au volant de voitures particulières énergivores, coutant un bras à des citoyens condamnés, à subir comme dans toutes les grandes métropoles de la planète, les affres des embouteillages qu’aucune infrastructure routière ne peut résorber, avec leur lot de maladies physiques et mentales.
Myrath a fait souffler un air frais dans une Tunisie en proie à une morosité due à une lassitude ambiante, après douze longues années d’une transition où, pour paraphraser Gramsci, plus d’une monstruosité a obstrué notre vue, massacrant l’espoir né du grand chambardement de l’hiver 2010-2011.
Myrath et c’est une véritable gageure, a fait une démonstration imparable que lorsque l’on a atteint une maturité dans quelque domaine que ce soit; eux c’est la musique, (depuis la fondation d’X-Tazy, l’ancêtre de Myrath, en 2001 par les compères, le guitariste Malek Ben Arbia, à peine treize bougies et deux amis d’enfance: Fahmi Chakroun, à la batterie et Oualid Issaoui à la guitare tous deux d’à peine quatorze années...); que l'on peut atteindre le Graal de la perfection. Que de chemin parcouru depuis 2001.
En cette soirée du 13 septembre, le groupe Myrath dans sa dernière mue avec les membres Anis Jouini (basse) Morgan Berthet, (batterie), Kevin Codfert (clavier) et le magicien chanteur Zaher Zorgati, nous ont régalé de leur savoir faire « métaleux ».
Les influences blues, heavy metal, death metal, mais aussi les « racines » orientales ont été égrenées de main de sorciers
« Métaleux ».
La première partie fut réservée au talentueux Radhi Chawali et son excellente fusion entre nos traditions nord africaines et les sonorités du monde musical de l’Ecosse. Le mariage entre le Mezoued (2) et la Cornemuse rappelle que les carthaginois, suivis par les musulmans d’Afrique du Nord commerçaient par les voies maritimes avec ces îles du nord. Des lettres de change rédigées en arabe et datant des derniers siècles du premier millénaire, furent découvertes récemment, ce qui est la preuve que des échanges commerciaux existaient depuis fort longtemps.
Carthage en transe.
Le résultat fut sublime. Carthage était en transe! Et ça, seul le travail et la persévérance en sont la marque et la garantie.
Les titres phares: Asl/Born To Survive, You’ve Lost Yourself, Darkness Arise, Lili Twil, Believer, Shehili, Danse, Madness, Nobody Lives entre autres ont fait chaviré un public en manque de qualité sonore.
Nous fumes comblés par une interprétation à la voix d’un Zaher Zorgati envoutante et qui signe à elle seule l’originalité d’un groupe internationalement connu aujourd’hui et dont la jeunesse pourrait en prendre de la graine.
Le fondateur Malek Ben Arbia peut être fière de ce qu’il a enfanté il y a vingt deux longues années.
(1) 60d et 80d sont les salaires journaliers de cadres quand le Smig traine autour des 25d!
(2) Mezoued: cornemuse des contrées nord africaines de l'Est
14 septembre 2023 Hamadi Aouina