Armand Ajzenberg (avatar)

Armand Ajzenberg

Abonné·e de Mediapart

47 Billets

1 Éditions

Billet de blog 18 juin 2014

Armand Ajzenberg (avatar)

Armand Ajzenberg

Abonné·e de Mediapart

Holocausto Brasiliero

 Non, ce ne sont pas des survivants d’Auschwitz ni des rescapés, après la seconde guerre mondiale, de l’hôpital psychiatrique de Clermont-de-l’Oise, mais quelques survivants des 60 000 morts de ce qu’une journaliste a nommé « un holocauste brésilien ».

Armand Ajzenberg (avatar)

Armand Ajzenberg

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

 Non, ce ne sont pas des survivants d’Auschwitz ni des rescapés, après la seconde guerre mondiale, de l’hôpital psychiatrique de Clermont-de-l’Oise, mais quelques survivants des 60 000 morts de ce qu’une journaliste a nommé « un holocauste brésilien ».

 Une grande enquête dénonce les conditions de vie à Colônia, le plus grand asile psychiatrique du Brésil, où périrent plus de 60 000 personnes, pour la plupart enfermées là sans raison médicale. Les images et l’histoire que vous allez découvrir vous évoqueront certainement les images des camps de la mort nazis.

 Le compte rendu du livre par Books éditions, le seul en France à ce jour et à ma connaissance, d’un ouvrage qui a été pendant six semaines un best-seller au Brésil commence ainsi :

 « “La folie ne tue pas”, lit-on en ouverture du livre d’enquête que vient de publier la journaliste Daniela Arbex. “Du moins pas à Barbacena”, une petite ville de l’État du Minas Gerais, à quelque 300 kilomètres au nord de Rio de Janeiro, où fut inauguré au début du XXe siècle le plus grand asile psychiatrique du pays : Colônia. Les 60 000 personnes qui perdirent la vie dans ce sombre hospice entre 1903 et le début des années 1980 – dont “70 % ne souffraient d’aucune maladie mentale”, écrit Daniela Arbex – succombèrent à la faim, au froid, à la pneumonie, aux électrochocs, au manque de soins ou encore à la torture ». En fait, le génocide (60 000 morts), qui a surtout concerné les noirs et les pauvres, s’est exercé entre 1930 et 1980, soit 1200 morts par an pendant 50 ans. L’établissement comptait, en 1960, 5 000 patients.

  Pour avoir un élément de comparaison, prenons Clermont-de-l’Oise (voir le billet précédent) : en 1940 il y avait 5 153 patients dans cet établissement. Sous le régime de Vichy il y eut 3 536  morts de 1941 à 1944, soit une moyenne annuelle de 884 morts. Si cela avait duré 50 ans, comme à Colônia, et qu’il n’y ai pas eu une diminution dans les admissions, cela aurait conduit à 44 200 morts. À Colônia, entre 1969 et 1980, on comptait en moyenne seize décès par jour. Calculez la moyenne annuelle !

  ooooo

 En 2009, la journaliste achevait un entretien avec un psychiatre, Juiz de Fora, quand celui-ci lui montra un livre : Colônia où figurait des photos prises dans les années 60 par le photographe Luiz Alfredo dans l’asile psychiatrique en question. « Dès le début, j’étais sûr de voir un camp de concentration » dit Daniela. Elle décida alors de retracer dans le journal où elle travaillait, Tribuna de Minas, dans une série de reportages intitulée Holocausto Brasileiro, l’histoire, des victimes de l’institution.

 « Les patients étaient amenés à Colônia dans des wagons à marchandises. Quand ils arrivaient là, ils avaient la tête rasée, étaient en uniforme et on leur avait confisqué leur identité, pareillement à ce qui s’est passé dans les camps de concentration » explique-t-elle.

 Daniela avoue que dans son immersion en un univers aussi lourd, les histoires les plus difficiles à entendre étaient celles des patientes enceintes à qui on arrachait les enfants à leur naissance. « Je venais d’accoucher et allaitait encore quand j’ai commencé les entretiens. À entendre leurs témoignages, je comprends pourquoi elles sont devenus folles ».

 Bébés gardés dans des crèches à l’intérieur de Colônia. Photo Jairo Toledo

 Une des raisons pour laquelle Daniela Arbex a écrit son livre, c’est dit-elle le fait que sa génération ne connaissait pas cette Histoire longue de 50 ans. Mais plus largement, « Il s’est avéré que le Brésil n’était pas au courant » ajoute-elle. Une situation pas très différente à celle régnant en France encore aujourd’hui à propos de l’abandon à la mort de 76 000 fous sous le régime de Vichy pendant l’occupation allemande. Au Brésil comme en France, il y avait la volonté d’abandonner ou de se débarrasser des êtres considérés comme socialement inutiles.

  Si pendant des dizaines d’années, à Colônia, des milliers de malades mentaux y furent internés de force, beaucoup le furent sans diagnostic précis. Il s’agissait aussi d’épileptiques, d’alcooliques, de prostituées, de filles enceintes de leurs employeurs, de femmes répudiées par leurs maris, de femmes ayant perdu leur virginité avant le mariage… « Les personnes les plus violentées étaient noires. Dans ma recherche, je n’ai pas compté le nombre de patients blanc ou noir, je ne pouvais avoir ces données, mais la quasi-totalité des victimes de l’holocauste étaient assurément noires. La seule chose qui différenciait les image faites à “Colônia” de celles des camps de concentration Nazis en Allemagne était précisément la couleur » dit Daniela. En France également il s’agissait de « la volonté du gouvernement de Vichy de se débarrasser des fardeaux inutiles » (Rita Thalmann, voir http://blogs.mediapart.fr/edition/les-invites-de-mediapart/article/220813/en-memoire-de-rita-thalmann).

  Si en France, en 1987, le livre de Max Lafont – L’extermination douce – fut une révélation pour beaucoup, il n’atteignit jamais, dans le grand public, le succès de celui de Daniela au Brésil. Cependant, si ce dernier fut là-bas un best-seller, chez nous il ne parvint pas à la notoriété. Rien dans Le Monde, qui se prétend pourtant « journal de référence » et qui a un correspondant permanent au Brésil. Rien dans Libération ou au Figaro. Rien dans L’Humanité. Rien chez les autres non plus.

 Rien encore à France culture où Emmanuel Laurentin tient une excellente émission quotidienne, La fabrique de l’Histoire, où pourtant chaque semaine sont traquées les nouveautés éditoriales et du Net. Silence radio partout.

  On les comprend. Comment parler d’un tel drame historique qui s’est passé de l’autre côté de l’océan tout en continuant à faire silence sur celui ayant eu lieu chez nous sous le régime de Pétain, Laval, Darlan…

  Daniela a raison de qualifier d’holocauste, de génocide ce qui s’est passé au Brésil, comme termes de comparaison avec une histoire  pas encore trop éloignée chez nous, en Europe. Dommage qu’elle ignore, dans cette comparaison, le gazage de 50 000 fous et la continuation de cette extermination, de 50 000 à 70 000 autres martyrs, par d’autres moyens en Allemagne sous Hitler. Dommage qu’elle ignore, dans cette comparaison, l’abandon à la mort, en France sous le régime de Vichy, des 76 000 malades mentaux : par la faim, le froid et des maladies qui s’en sont suivi, comme au Brésil. Les comparaisons n’auraient pas été moins judicieuses que celle faites avec la Shoah.

  Le livre de Daniela Arbex, Holocausto Brasileiro, fournit un compte rendu impressionnant de la vie quotidienne vécue par les internés. Les souris pullulaient et buvaient les mêmes eaux usées, voire, l’urine, que celles des patients. Dans les nuits glaciales de la région de la Serra de Montiqueira, beaucoup dormaient, nus, dehors sur l’herbe pour économiser de l’espace. Mais il y a encore plus révoltant. Si entre 1969 et 1980 on comptait en moyenne seize décès par jour, et que disparaissaient ainsi des individus sans valeur, leurs cadavres cependant, eux, rapportaient de l’argent.

 « Ce que nous ne savions pas et que nous avons mis à jour avec l’aide du Museu da Loucura, est que 1853 corps ont été vendu à 17 écoles médicales du pays pour la somme moyenne de 50 Cruzeriros (une ancienne monnaie). Ceci représente un total de 250 000 dollars américains […] De janvier à juin d’une année par exemple, l’Université Fédérale de Minas Gerais a reçu 76 “pièces”, comme on appelait les corps ». La référence au mot “pièce” est la même que celle donnée aux africains mis en esclavage à leur arrivée dans les ports brésiliens.

  Autre exemple signalé par Daniela : entre les 4 et 19 novembre 1970, 45 cadavres ont été négociés pour 2250 cruzeiros. En une décennie a-t-elle calculée, la vente de cadavres a atteint la somme de 600 000 dollars. Sans compter le commerce des os et des organes.

Interrogée sur l’attitude du gouvernement de Minas Gerais, après la publication par Tribuna de Minas de la série de reportages ayant conduit à la publication de son livre, Daniela Arbex indique : « C’est une histoire qu’on ne peut plus nier. D’abord parce qu’elle est très bien documentée. Les images de Luiz Alfredo sont la preuve de ce  qui s’est passé. Si elles n’existaient pas, il aurait été peut-être difficile de convaincre aujourd’hui, malgré les témoignages recueillis et malgré une bonne documentation. Les images donnent beaucoup de force au livre ».

 Effectivement : « Le choc des images, le poids des mots ». Il faut remarquer qu’en France, s’agissant de l’abandon à la mort des fous sous le régime de Vichy, l’absence de photos (sauf une, voir le billet précédent) fait argument pour taire « la chose ».

  Interrogée quant aux responsabilités de l’holocauste brésilien, Daniela répond : « La culpabilité est collective. Ces atrocités n’ont pas posé question à ce moment là. Au début du 20e siècle, il y avait un mouvement, une théorie eugéniste de nettoyage social accepté dans tout le Brésil ».

  Mais il n’y avait pas qu’au Brésil. En France aussi l’eugénisme était à l’honneur. Volontaire, certes, disait-on. En 1936, sous le Front populaire, on pouvait lire ceci à propos de prophylaxie mentale par l’eugénisme volontaire : « La commission de surveillance des Asiles publics d’aliénés de la Seine , dans sa séance du 8 juillet 1936 a adopté, sur proposition de M. Eugène RAIGA, l’importante motion suivante » :

 « Considérant que le nombre des aliénés augmente dans des proportions alarmantes, qu’il n’est pas douteux que l’hérédité soit l’une des causes principales de cette déplorable progression, et estimant qu’il appartient aux Pouvoirs publics de prendre d’urgence des mesures tendant à préserver l’avenir de la race française, a l’honneur de demander à M. le ministre de la Santé publique de rechercher les moyens de faire pénétrer dans les familles françaises, en vue d’encourager la pratique de l’eugénisme volontaire, la notion de l’hérédité propagatrice des maladies mentales ». Alexis Carrel n’était pas loin. Ces gens étaient-ils les mieux préparés, quelques années plus tard, à résister à l’abandon à la mort des malades mentaux sous le régime de Vichy ?

 Mais retournons au Brésil.

 À la question posée par le site CartaCapital, quelle est l’histoire de l’asile ?

 Daniela répond : « L’hôpital a été créé en 1903 par le gouvernement de l’État pour répondre à la maladie mentale. Des documents de 1914 montrent la surpopulation et des administrateurs se plaignant des conditions d’accueil des patients arrivant dans des wagons bondés. Ainsi, dès le début la Colônia ne pouvait remplir sa fonction de re-socialiser et rencontrer les patients. Sept patients sur dix ne souffraient pas d’une maladie mentale. Nous pouvons dire que les patients, qui ne répondaient pas aux normes sociales en vigueur, étaient de ceux dérangeant le pouvoir : alcooliques, militants noirs, pauvres ou politiques. Colônia est devenu ainsi un lieu de ségrégation locale… » […] Beaucoup des admissions ont été faites par des délégués des administrations. La jeune fille qui a perdu sa virginité  avant le mariage et envoyé à l’hospice par son père. Surtout, les médecins étaient rares sur le site jusque dans les années 50. Les employés embauchés comme gardiens y suffisaient. Si une cuisinière pouvait être transformé en infirmière, pourquoi embaucher d’autres personnes ayant des qualifications plus élevées ? Il n’y avait pas de soins médicaux, et Colônia était un dépôt pour personnes humaines ».

  Pourquoi ces violations n’ont-elles pas été remises en cause ? 16 morts par jour, c’était une chose naturelle ?

 « À cette époque, au début du 20e siècle, il y avait une théorie eugéniste de nettoyage social accepté dans tout le Brésil, qui en fait existe peut être encore aujourd’hui. Il y avait encore l’acceptation du fait que certaines vies valent moins que d’autres, parce que ces vies n’étaient pas considérées comme des personnes. Ces gens étaient l’écume sociale, la racaille dont il fallait nettoyer la société. L’éthique n’existait pas, de sorte que ces abus ont perduré aussi longtemps. Il y avait déshumanisation.

  Le scénario que vous décrivez rappelle les prisons d’aujourd’hui. Êtes-vous d’accord avec la comparaison ?

 « La Société admet encore que certaines vies valent moins que d’autres. Donc, si un méchant meurt, c’est un de moins de ceux qui méritent la peine de mort. Tous ces meurtres, depuis la prison de Carandiru à Sao Paulo à celle de Chatuba à Rio, sont de nouveaux noms pour de vieilles façons d’exterminer. Les meurtres de masse se produisent encore, et nous semblons ne pas les voir ».

  Le massacre de Carandiru s’est produit le 2 octobre 1992. 111 prisonniers furent tués à la suite d’une rébellion.

oooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooo

 Est-il possible de poursuivre l’État pour l’holocauste brésilien ? À cette question posée, sur le site Afropress, Daniela Arbex répond :

 « Je perçois un mouvement qui gagne en dynamique, qui prend forme au sein des organisations des droits humains qui cherchent à établir les responsabilités. Cette mission ne consiste pas juste à chercher les responsabilités d’État. Oui, parce que en dehors des officiels gouvernants (28 à cette époque), il y a aussi la responsabilité des membres de famille qui ont abandonné les leurs, les directeurs qui sont passés dans l’hôpital, les employés. Cette omission est collective. Ils étaient à la garde de l’État, et il a une grande responsabilité, mais cette expérience est de l’ordre d’une responsabilité collective. Ce que je constate, c’est que des familles engagent des poursuites contre l’État ».

  Afropress : l’État peut-il toujours être tenu pour responsable ?

 Daniela Arbex : « l’État a pris note. En 1961, Janio Quadros, président à l’époque, a déclaré publiquement qu’il donnerait des fonds pour aider l’hôpital financièrement pour qu’il puisse remplir sa mission ».

  Rien de tel en France. Il y eut 76 000 morts dans les hôpitaux psychiatriques sous le régime de Vichy, morts de faim, de froid et des maladies qui s’ensuivent. Comme à la Colônia au Brésil. À la sortie du livre d’une historienne pour qui Pétain, Laval, Darlan, bref l’État français d’alors, n’y étaient pour rien. « Le régime de Vichy est enfin innocenté d’avoir programmé un génocide » s’écria Rivarol, reprenant le compte rendu d’une autre historienne dans Le Monde. Toute la presse nationale applaudit, de L’Humanité à Rivarol donc, en passant bien sûr par Le Monde, Le Figaro, Libération, L’Express, etc., etc… et fait toujours silence sur les thèses opposées à celle de l’historienne. Sauf La Marseillaise qui, il y a peu, a consacré une page à L’abandon à la mort… de 76 000 fous par le régime de Vichy (L’Harmattan, nov. 2012).

  Question responsabilités, comme au Brésil, en France aussi les culpabilités sont collectives. Ce qui jusque-là avait été un peu mis sous le boisseau. Certains, on l’a vu, ne voulant  pas impliquer le régime de Vichy, d’autres ne voulant impliquer ni Vichy ni l’institution psychiatrique en l’affaire. Sauf Lucien Bonnafé. Pour lui, les responsabilités étaient partagées : 51 % pour Vichy, 49 % pour l’institution psychiatrique disait-il en forme de boutade, voulant marquer la responsabilité principale du régime de Pétain.

  Personnellement, il me semble que mettre des pourcentages est de nature à jeter le trouble dans l’analyse. Mon point de vue est qu’il est quelques hôpitaux psychiatrique où on a fait beaucoup pour limiter la mortalité, par exemple à Saint-Alban où résistaient Bonnafé, Tosquelles et Balvet. Il est des hôpitaux où des psychiatres ont essayé de faire quelque chose, sans y parvenir, comme à Montdevergues-les-Roses. Il en est d’autres où c’est la lâcheté qui a dominé.

  En 1987, quand Max Lafont publia son livre qui brisa le « silence » et que le 10 juin Le Monde publia un article, d’une psychiatre (la Dr Escoffier-Lambiotte), article sans nuances certes mais qui reprenait des éléments du livre de Max Lafont, et qui mit le feu aux poudres dans le monde psychiatrique.

 Exemples, puisés dans l’article :

 « Un unique médecin, le Docteur Requet, à qui l’on doit ce témoignage sur l’hôpital psychiatrique du Vinatier à Bron, près de Lyon, avait sous sa “garde”, avec l’aide d’un unique interne, 800 malades […]

 Ici, “les patients mangeaient toute l’herbe, pissenlits, trèfle ou plantain, qu’ils pouvaient arracher entre les pavés de la  cour”.

 Là, on se disputait les coquilles d’œufs de noix. Certains malades sont enfermés au moment des maigres “repas”, car ils se jettent sur les portions des autres et les attaquent sauvagement. […]

 L’hôpital psychiatrique du Vinatier  disposait, comme d’autres, en France, du plus grand domaine agricole de la région. […] Les hommes et les femmes mouraient de faim dans le même temps où […] le domaine appartenant à l’hôpital vendait à l’extérieur ses porcs, ses veaux, ses poulets, ses œufs et son lait ».

  Ces horreurs n’étaient donc pas réservées qu’au Brésil.

  Et la Dr Escoffier-Lambiotte continue : « La situation inspirait de la part des psychiatres et des soignants non de la révolte, l’indignation, les protestations, le désespoir, les démarches régionales ou nationales que l’on imaginerait, mais… des thèses ou des articles sur les mécanismes de la faim ou de l’œdème de dénutrition, sur “l’appétit exacerbé des aliénés (sic), sur l’origine exacte, physico-chimique, de la mort par cachexie. La preuve de cet “appétit exacerbé”, propre à la pathologie mentale, était donné par le fait que nombre de patients en étaient arrivés à manger tous les détritus qu’ils rencontraient ».

  Outré, un psychiatre, Charles Brisset, s’adressa alors, le 29 juin 1987, à Tosquelles, Balvet et Bonnafé : « Le livre de Max Lafont et surtout l’exploitation qui en  a été faite créent dans la psychiatrie un grand malaise. A-t-on le droit de jeter sur tous les psychiatres qui étaient dans les Asiles pendant la guerre, le regard dénonciateur indiqué avec un zeste de prudence dans le livre, mais affirmé sans aucune réserve (à partir du livre) dans les articles du Monde repris dans toute la presse ? ».

  Faut-il rappeler que sous l’Occupation allemande, la France avait fait retour à la dictature (les pleins pouvoirs à un Maréchal) et que sur les questions de libertés, des droits de l’homme, mais aussi du regard jeté sur les fous, le retour renvoyait à un âge antérieur. Et on voudrait que ce recul en matière de civilisation ait épargné en France les hôpitaux psychiatriques et leurs personnels ! Là, comme au Brésil, « la culpabilité est collective ».

 Question d’Afropress : « Comment se fait-il que le régime militaire utilisa cette expérience ?

 Daniela Arbex : « La dictature utilisa l’hôpital parce que c’est là que les activistes politiques étaient envoyés. 5 000 patients, une réelle masse humaine. À cette période, l’hôpital était une zone fermée. Personne de la presse n’y entrait. En 1979, Iran Firmino, de l’État de Minas Gerais, mis sur le devant de la scène l’histoire de la Colônia. Mon livre et les articles, ce n’était jamais une histoire racontée à travers les yeux des survivants, mais par ceux des journalistes. Il est important de briser le silence et de demander à la société : quel genre de société voulons-nous construire ?

  Propos qui rejoint celui de Lucien Bonnafé, cité par la Dr Escoffier-Lambiotte en conclusion de son article : « Sur tout cela a régné une grande conspiration du silence sur le sens de laquelle je ne cesse de demander éperdument que l’on s’interroge ».

  Une vidéo parmi d’autres :

 http://www.youtube.com/watch?v=1xBQr5zFAHs

 QUELQUES MOTS SUR DANIELA ARBEX :

 C’est une journaliste qui a 18 ans de carrière. Elle est reporter spéciale du journal Tribuna de Minas. Elle a reçu, en 2013, pour son reportage « Un holocauste brésilien », le Prix Esso du Journalisme. Prix qu’elle avait déjà reçu auparavant pour d’autres reportages, en 2 000 et 2 002. C’est le plus prestigieux prix de la presse brésilienne. L’équivalent du Prix Albert Londres en France ou du Prix Pulitzer aux Etats-Unis.

 Sources :

 Bien sûr Holocausto Brasileiro, Tribuna de Minas.

 Les sites en français : Books, African History-Histoire Africaine, La Tchipie (site Caribbean).

 Les sites brésiliens : Otempo, La Parola, Obvious, Vice Media.

 Remerciements :

 Remerciements à Rafael, un ami sociologue brésilien. C’est par lui que cette histoire m’est parvenue, il y a un an environ. Ensuite, il me fit parvenir le livre de Daniel Arbex.

 « Bon, autre chose. Je veux te dire que récemment est paru un livre sur le même sujet que tu travailles en France. Il s’agit d’un hôpital à Barbacena, dans le Minas Gerais, où sont morts environ 60 000 malades mentaux et prisonniers qui ont été arrêté comme malades mentaux. Ce sont des histoires qui ont besoin d'être racontées. Ci-après le lien avec le site d’un journal de São Paulo traitant du livre » :

 http://www1.folha.uol.com.br/livrariadafolha/2013/06/1290146-holocausto-brasileiro-resgata-historia-de-60-mil-mortos-em-hospicio-mineiro.shtml

 Rafael Padua

 Information :

 Le 22 juillet 2013, j’ai reçu ce courrier :

 Holocauste brésilienne 

 Paulo Schmidt editorial@geracaoeditorial.com.br, editorschmidt editorschmidt@gmail.com

A

Ajzenberg Ajzenberg@aol.com

  Cher Armand,

 Je suis editeur chez Geração, la maison d’editión qui a publié le livre Holocauste brésilienne, de Daniela Arbex. Votre intérêt pour cette oeuvre tellement importante nous rend très heureux, et nous sommes prêts à négocier les droits de publication avec votre maison d’editión en France.

 J’espère avoir bientôt de vos nouvelles.

 Cordialement.

 S’il se trouve un éditeur parmi les lecteurs de ce billet et que ce dernier l’a intéressé, et s’il a envie de prendre le risque de publier le livre de Daniela Arbex, à lui de jouer et de prendre contact avec Paulo Schmidt.

Si vous estimez que ce texte mérite une publicité plus grande, pourquoi ne pas reprendre l’information et la publier, un moment, sur votre propre site ou blog.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.