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Billet de blog 1 mai 2014

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Du côté de la Porte Dorée (2): GIRAFES et GIRAFADA

C'est en effet une des attractions du zoo de Vincennes nouvelle version (réouverture le 12 avril), l'espace consacré aux girafes qui le remplissent bien par leurs allées et venues, leur danse, leur vie en communauté. Et quinze jours après, sort un film dont la star est un couple de girafes, Girafada, un conte comme une fable, tourné à Naplouse en Cisjordanie.

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C'est en effet une des attractions du zoo de Vincennes nouvelle version (réouverture le 12 avril), l'espace consacré aux girafes qui le remplissent bien par leurs allées et venues, leur danse, leur vie en communauté. Et quinze jours après, sort un film dont la star est un couple de girafes, Girafada, un conte comme une fable, tourné à Naplouse en Cisjordanie.

Le zoo tire-lire !

Mais arrêtons-nous au zoo. A cause de sa vétusté, il avait fermé pour travaux de rénovation, le zoo de Vincennes situé à l'orée du Bois, tout de suite après le boulevard des Maréchaux, à coté du Musée de l’Histoire de l'Immigration et de l'Aquarium, ayant actuellement pour voisin la Foire du Trône, traditionnellement installée de l'autre côté du lac Daumesnil. La Porte Dorée c'est la nouvelle destination par le tramway... pour petits et grands !

Le lancement a été fait avec grands renforts de publicité, radio, télé, Mme Royal, marketing, s'agissant de la réhabilitation des parques zoologiques, avec une nouvelle conception du rapport entre le visiteur et l'animal toujours enfermé mais autrement traité et considéré. «Il s'agit d'aller rendre visite, chez eux, aux animaux qui pour certains c'est le lieu de protection de l'espèce», nous disait un des jeunes agents chargé d'expliquer et de montrer des moments de nourrissage où on peut avoir la chance de voir les résidents et d'apprécier leur façon de marcher et de se mettre à table.

Le parcours est en effet fort bien présenté, le visiteur pouvant aller, en quelques deux bonnes heures de l'Europe, au Sahel-Soudan, Madagascar, Guyane, Pantagonie. Démarche pédagogique, opportunité unique pour voir en vrai ce que les images de la télé donnent à voir, voilà les arguments qui pour l'heure font la réussite du projet. Quelques manifestants, dans les premiers jours, exprimaient à l'extérieur leur critique sur les «animaux en captivité».

Il s'avère qu'un certain nombre de visiteurs ont manifesté leur déception, voire leur colère, devant le fait que tous les animaux ne sont pas encore arrivés, leur emplacement étant vide, comme si l'ouverture avait été précipitée, congés scolaires de Pâques oblige. C'est en effet surprenant le type d'arguments utilisés, «nous sommes encore en rodage» et la vague promesse d'un «geste commercial» de la dynamique directrice du parc de zoologique de Paris, Sophie Ferreira Le Morvan qui, n’étant pas du sérail, revendique un discours de marketing... même si ça ressemble à ce qu'on appelle «tromperie sur la marchandise»...

Le prix est extrêmement élevé (22€ adulte, 14€ enfants entre 3-11 ans et 16€50 pour les jeunes 12-25 ans; si on réserve par internet 1€ par billet en plus). Le Directeur du Muséum d'Histoire Naturelle, qui gère le zoo, justifie ces tarifs qui ne seraient pas plus élevés que pour d'autres zoos et parcs d'attractions. Peu de réductions et un professeur de mathématiques, rencontré le jour où j'y suis allé, qui apprécie d'amener à l'extérieur ses élèves ou autres jeunes du Collège privé où il enseigne, regrette que pour les particuliers il n'y ait pas de partenariats avec les abonnées de la Cité des Sciences et du Mussée de la Découverte, ou du Musée de l'Immigration et Aquarium, voisin.

Le Professeur Canardeau du Canard Enchaîné relevait que les personnes handicapées, ne bénéficiaient pas non plus d'un tarif préférentiel. Selon M. Grenon «Nous avons réalisé un investissement important pour favoriser l'accessibilité du zoo aux personnes à mobilité réduite. Leur qualité de visite étant la même que celle d'un valide, ne peut-on pas, dès lors, se poser la question du maintien d'un tarif réduit, voire gratuit, pour ces personnes?» Tant de pertinence dans une seule phrase doit être saluée. "Pas seulement ils nous coûtent cher ces handicapés, en plus il faudrait leur faire un prix". Bravo!

Mais M. le Directeur est sincère et explique, «l'augmentation des prix est clairement motivée par le choix du PPP», toujours selon le Canard du 9 avril 2014. En effet, le Muséum a signé un PPP, Partenariat Public-Privé, avec une société créée pour ce chantier, la Chrysalis, bonne pioche, dont le cœur de l'affaire est Bouygues. Mais cette tire-lire c'est de la politique... on en parle pas!

*  *

GIRAFADA

C'est d'un autre zoo dont il nous raconte l'histoire dans ce film. C'est un fait-divers qui a inspiré le réalisateur, Rani Massalha. Une girafe est morte dans le zoo de Qalqiliya. Suite à un bombardement, elle a paniqué et s’est heurtée la tête contre la barrière de son enclos. Sa première idée, farfelue voire incongrue, était de faire venir du zoo de Tel-Aviv une autre girafe et ainsi est né le projet. Pour la fiction, l'histoire se déroule autour de l’attachement d'un petit garçon, fils du vétérinaire du zoo, à ces girafes, lui qui les soigne, leur donne à manger et à boire.

Ziad (Ahmad Bayatra)

On voit bien dans ce Girafada le milieu étriqué des pouvoirs locaux, qui se croisent dans la population palestinienne où ce zoo est la seule «attraction» pour les enfants. Dans cette ville, à 12 km de la mer et néanmoins entourée et fermée par le mur que les autorités d'Israël ont érigé partout.

Premier film, avec une équipe internationale composée de Palestiniens, Israéliens, Français, Allemandes, Italiens, Canadiens, Américains, et même un Congolais, est une œuvre généreuse, de bonnes intentions, avec quelques longueurs et redondances, quelques parti-pris qui, dans le contexte du conflit actuel peuvent être réducteurs.

Le seul juif dans le civil du film est un colon, qui se comporte comme l'image commune le présente habituellement, violent et obtus. Les jeunes soldats de la troupe d'Israël ont le même comportement que celui qui est décrit depuis longtemps sur l'armée israélienne en position d'occupation.

Mais ce film est autre chose que cela et ce qui m'intéresse de souligner ici c'est l'amitié entre les deux vétérinaires, un juif et l'autre palestinien, qui vont réussir à remplacer la girafe disparue; et la relation de tendresse et de grande complicité de ce père seul avec son garçon.

Les deux vétérinaires, Roschdy Zem dans le rôle de Yohav et Saleh Bakri dans celui de Yacine

On sait que la girafe est l'animal qui a le plus gros cœur (11 kg). La communication non-violente l'utilise comme symbole, une forme d'empathie envers l'autre en opposition au parler "chacal", emblème de la violence. De ce film, de sa fable,  je tire la volonté qu'un autre rapport soit possible, un jour, entre ces deux peuples, plutôt girafe que chacal. Et si vous allez au zoo de Vincennes ayez une pensée pour Ziad  et pour Rita et Roméo le nouveau couple de girafes du zoo de Qalqiliya. Peut-être que les responsables du parc de zoologique de Paris y penseront...!

*  *  *

Les précédentes nouvelles de la Porte Dorée:    http://blogs.mediapart.fr/blog/arthur-porto/120414/du-cote-de-la-porte-doree

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Deux billets dans Mediapart qui questionnent et analysent différemment le zoo de Vincennes:

http://blogs.mediapart.fr/blog/daniel-borrillo/150414/le-nouveau-zoo-de-vincennes-et-les-vieux-demons-du-colonialisme-animal

http://blogs.mediapart.fr/blog/lepistolero/160414/le-zoo-devient-cene

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