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Billet de blog 3 avril 2022

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‘‘Nous sommes venus’’, ou la mémoire de l’immigration

Comment regarder les images des réfugiés d’aujourd’hui quand soi-même il y a plus de cinquante ans, vivait la même ‘‘aventure’’, la même violence, la même errance? Que garde-t-on dans sa mémoire, quel souvenir, quel réveil? C’est la ‘‘leçon de vie’’ que José Vieira partage avec nous dans son film ‘‘Nous sommes venus’’, présenté mardi au Forum des Images dans ses mardis de 100 % doc.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

‘‘2015 : des trains sont pris d’assaut par des réfugiés. Je crédite ces images de gens en fuite à mon histoire : j’avais sept ans quand j’ai passé la frontière, le 23 janvier 1965 à Hendaye. Dans ma mémoire, nulle trace de mon arrivée en France. Comment raconter un événement dont on a aucun souvenir, sinon en cherchant notre histoire dans celle des autres ?’’

Voilà comment José Vieira nous présente sa démarche de cinéaste et de citoyen observateur du monde, des bouleversements humains et de son engagement car ses images ce sont des alertes sur ce qui se passe autour de nous.

C’est comme une lettre-filmée à sa fille, avec un beau et poétique texte sur la mémoire de l’immigration. Et il se questionne, ‘‘à quoi sert notre mémoire de l’immigration?’’ Pas à nous lamenter, ça ne sert à rien, mais plutôt à nous dire ‘‘ne regarde pas ce que nous sommes mais ce que nous allons devenir, ce que nous voulons devenir’’.

Et c’est tout l’intérêt de ce documentaire de nous inviter, de nous permettre de suivre dans ces images d’aujourd’hui et dans d’autres d’hier, comment cette histoire est présente, et nous suit avec la même force et acuité de l’histoire qui nous a précédé. C’est un document de transmission de ce qui fait continuité dans nos vies même si c’est l’histoire d’une rupture!

Son film nous parle d’hier, des milliers de portugais qui ont traversé la frontière clandestinement, notamment à Hendaye, dans les années 60 et début de 70, et nous parle aussi d’aujourd’hui des réfugiés d’Afrique, qui ont les mêmes paroles, les mêmes regards, les mêmes attentes.

Nous sommes pris par les images de train, que José Vieira sait et aime filmer, de gares et de celle de Hendaye, lieu d’arrivée et de transit, qui a marqué durablement des générations de clandestins. Les migrants des années 30, les réfugiés espagnols fuyant Franco, des portugais, migrants économiques et politiques fuyant Salazar et refusant de participer à la guerre coloniale...

L’actualité autour des réfugiés de ce mois de mars 2022 nous relance, dans d’autres gares, et le sujet est toujours là, dans cette ‘‘destinée’’ humaine.

Présent lors de la présentation de son film, José Vieira précise aussi que si l’image de l’immigration est pour lui autant présente, c’est ‘‘aussi du fait de ce qui se passe aujourd’hui en France’’ de la façon dont les réfugiés sont traités, discriminés. Et il a raison, entre les jeunes migrants-réfugiés à la Chapelle ou à Calais, fuyant des guerres, et l’arrivée massive des réfugiés Ukrainiens fuyant une autre guerre, que de différences et que de similitudes.

‘‘Nous sommes venus’’, d’autres arriveront encore, saurons-nous être là pour accueillir ces Autres que nous...?

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* * * Dans le premier commentaire, la filmographie de José Vieira et extrait d’un bref texte qu’il a écrit sur le photographe Gérald Bloncourt: [in blog/041118/gerald-bloncourt-le-photographe-de-mon-enfance.]

* * * * Dans le deuxième commentaire, référence au film de Robert Bozzi, ‘‘Les Gens des Baraques’’, présenté également ce mardi au Forum des Images en première partie de 100% doc.

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Et puisque José Vieira nous a montré Hendaye, ci-dessous image d’une manifestation en décembre 2019.

A Hendaye, 150 personnes ont manifesté pour réclamer l'ouverture d'une commission d'enquête parlementaire sur les "atteintes aux droits" des migrants. "On veut sortir du face à face stérile entre associations et ministère de l'Intérieur", a expliqué Véronique Fayet, du Secours Catholique. La Cimade dénonce les conditions de rétention au centre d’Hendaye.  • merci pour la photo © GAIZKA IROZ / AFP.

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