C'est une bien mauvaise séquence pour la liberté d'expression (le droit d'un auteur d'exposer son interprétation des déclarations du président), pour l'indépendance de la presse (le Pouvoir téléphone au journal pour dire son désagrément et comment il faut interpréter), pour la démocratie (quand l'ingérence de l’Élysée s'autorise à contester le droit d'une tribune à propos de "la droitisation de Macron sur l'Algérie et la colonisation").
Il s'agit d'une tribune commandée par le journal, validée par la rédaction mais voilà, écrit le Monde, le ‘‘service de presse de l’Élysée, nous ont fait savoir que la tribune contenait une erreur qui induisait une mauvaise interprétation des propos tenus à Alger par le chef de l’État’’.
Cela paraît étonnant que le "grand journal de référence" puisse se soumettre au diktat Élyséen, à savoir qu'un lecteur risquerait de faire "une mauvaise interprétation" en lisant la tribune. S’il avait des choses à rectifier pour éviter ce risque, Le Monde aurait pu publier un droit de réponse de l’Élysée pour souligner l'interprétation du Macronisme sur la tribune.
Il ne s’agit pas ici, de contester la critique de la tribune et la façon dont PM Morin a pu interpréter les propos du président. Il me paraît surtout un nouveau signe de l’appropriation de la démocratie par le pouvoir en place, dont la liberté d’expression (et d’interprétation) et l’indépendance de la presse sont les fondamentaux que la Macronie ne semble pas hésiter à passer outre. Et nous sommes nombreux, malgré l’air du temps, à attendre et estimer que le journal né en décembre 1944, garde autant que faire se peut une indépendance éditoriale.
Une bonne nouvelle tout de même, dans la version papier, nous avons accès à cette tribune... attention au marché noir qui se réjouira de marchander une tribune ‘‘censurée’’ qui déplaît en haut lieu!
* * Dans le premier commentaire, la tribune de Paul Max Morin et "à nos lecteurs" publié hier dans la page Le Monde et vous-débats